L’amour ! Encore l’amour ! Toujours l’amour ! Quand ce dernier vous tient, qui peut vous arracher de ses serres ? Dans son Roman ‘’Celle qui ne devait pas naître’’, (247 pages), paru aux Editions Plurielles, Sèna AGBOFOUN, l’auteure de cette œuvre, nous envoie dans un monde où on pourrait contempler les doubles facettes de l’amour. Un monde où sont suspendus au cou du sort la vie et l’avenir des personnes qui constituent les pions nécessaires formant l’authenticité et la complexité de toute la trame. Une créature radieuse, bien moulée dans les mains du créateur avant d’être jetée dans le monde, Flora, avec ses formes arrondies et rebondies, était dotée d’immenses atouts esthétiques qui faisaient battre le cœur de tout venant. Et c’est une tautologie que de dire qu’elle était belle. Elle était la beauté incarnée. Stagiaire à la radio Marina Fm, après ses trois ans de formation en journalisme, Flora devra suivre les sillons tracés pour elle par la vie, fussent-ils sinueux ou radieux. Le sort est un étranger improviste qui surprend quand on s’y attend le moins. Sa relation avec Ishola, le Directeur (temporaire) de cette radio ne tarda pas à voir le jour. Parfois, l’amour vient par la porte étroite et sort par les persiennes. Son idylle avec Ishola ne durera que l’instant d’un battement de cœur. Car bientôt, les fruits idylliques feront parade de leur gout aussi doux qu’amer. Tout ce qui brille n’est pas de l’or, dit le proverbe. Flora l’apprendra à ses dépens. Elle ignorait que pour Ishola, cette relation n’était qu’une amourette, basée sur la satisfaction unique de ses instincts de mâle insatiable, étant bien conscient qu’il ne durerait pas longtemps à ce poste qui faisait son charme et son arme de séduction. Et comme tout bon séducteur infidèle et tricheur, Ishola prit soin de le cacher à Flora qui pensait avoir trouvé le grand amour. Mais quelle sera sa réaction quand elle apprendra que son amoureux avait déjà une fiancée ? Moins encore qu’ils faisaient déjà leur projet de mariage ? Mais Ishola comprendra qu’ « une femme malheureuse est une femme dangereuse » (P.136.) Pire, son cœur pouvait subir l’effet des braises ardentes quand il apprit que Flora était enceinte, au même moment que sa fiancée. Papa à la maison, comme au dehors. Mais il pouvait comprendre vraiment le sens du ‘’le monde s’effondre’’ quand il apprendra que Flora n’était rien d’autre que la petite sœur de sa fiancée. Mais quand une femme veut réellement une chose, même le diable s’agenouille à son passage. Jalousie entre sœurs pour un même homme ? Mais le monde qui s’effondre pourra-t-il se relever encore quand on voit Flora user des moyens sordides pour pouvoir garder pour elle et elle seule Ishola? Sa grande-sœur survivra-t-elle à ses manigances et diableries?  ‘’Celle qui ne devait pas naître’ peut être caricaturé ainsi: un homme, deux sœurs: qui gagnera? L’on pourrait trouver une situation atténuante pour Flora dont l’équilibre psychique, tel que décrit par l’auteure, souffre de quelques maux. Mais il faut réaliser qu’elle n’a pas su raison garder pour savoir qu’il y a des lignes qu’on ne franchit pas impunément. Flora  a semblé aller un peu trop loin…

 

L’œuvre est tissée de suspenses et incite le lecteur à vite se délecter de la page en cours pour embrasser la suivante. Avec un style simple, charmant, quoique lascif  dressant par endroit le tapis rouge devant Eros, l’auteure peint un monde ordinaire qui nous est familier et qui se déploie sous nos yeux. On y rencontre Cotonou et Porto-Novo et bien d’autres réalités socioculturelles propres au terroir béninois. En cela, on peut dire que l’œuvre de Sène Agbofoun est une œuvre foncièrement béninoise qui s’ouvre à l’universel car les problèmes de cœur et de sentiments, de jalousie et rivalités entre femmes, d’infidélité et d’ingratitude sont les mêmes sous tous les cieux. Nos réalités quotidiennes y trouvent leur place. Mais derrière le titre, comme une métaphore,  ‘’Celle qui ne devait pas naître’’, c’est aussi celle qui devrait naître, c’est à-dire cette œuvre, ce roman de Sèna Agbofoun qui a vu le jour grâce à une collecte de fonds, une première au Bénin.

C’est ici le lieu se saluer Yann Colince pour ce projet qui fera certainement naître d’autres manuscrits condamnés à ne pas naître et qui somnolent dans les tiroirs ou les ordinateurs. Une chose intrigue dans le titre : « qui est celle-là qui ne devrait pas naître? » Et Si c’est Flora, est-ce à cause de tout ce qu’elle a fait, que l’auteure aurait souhaité qu’elle ne naquît jamais? En tout cas, prenez le livre, lisez-le, et découvrez par vous-même si c’est vraiment Flora celle qui ne devait pas naître ou plutôt Clara ou encore si c’était un sort scellé entre la vie et le destin.

 

RICARDO AKPO

Ricardo AKPO est étudiant en troisième année Histoire et Géographie  à Ecole Normale Supérieure de Porto-Novo.

  1. Très intéressant comme ouvrage. La jeunesse béninoise aime sans doute les ouvrages qui abordent les thématiques de son temps. Le livre est véritablement un miroir pour la société. Bonne chance à l’auteure.
    Merci Ricardo AKPO

    • Entièrement d’accord avec vous, Monsieur ADANKPO. Nous espérons que vous nous ferez un de ces quatre, la surprise d’un compte rendu de lecture