Du haut de ses vingt-deux ans, Alida est de la catégorie de ces filles qui ne laissent personne indifférent. Teint clair, cheveux bruns, un visage angélique, elle est d’une carrure disons, femme canon. Avec son sourire envoûtant, il n’est point rare qu’elle constitue un sujet d’attraction pour ces nombreux jeunes de son quartier, surtout de sa classe.

En 3ème année de Marketing Action Commerciale, elle fait la fierté de sa famille et de ses professeurs, surtout le trentenaire Atamin-Vivi Antonin. Quand on dit que les noms suivent les individus qui les portent, ce n’est pas toujours faux. Comment un homme peut-il s’appeler ainsi: Atamin-Vivi? ». Qu’est-ce que son aïeul avait fumé en choisissant pour sa descendance un tel nom? Atamin-Vivi? De toute façon, Antonin Atamin-Vivi était tellement obsédé par sa propre étudiante qu’il avait mis en demeure tous les garçons de l’université de converser, ne serait-ce que durant quinze secondes avec Alida : la sentence est claire: tout contrevenant est passible d’un renvoi définitif pour convoitise et affront aux désirs de l’autorité compétente.

Atamin-Vivi Antonin, de mœurs légères a la réputation d’un coureur de slips qui a un faible pour les nanas de teint clair ou café au lait. On le reconnaissait à son crane de daba et à ses lunettes de carapace de torture. Avec ses lèvres démesurément charnues et son menton de bouc errant, il se faisait menaçant envers les garçons et toujours gentil à l’endroit des filles. Dès la rentrée, ce professeur, à maintes reprises, a essayé de se rapprocher de la belle jeune fille. Mais c’était sans succès. L’année académique finie, et ayant échoué à rentrer sous la jupe de celle qui est devenue son obsession, il n’avait que ses yeux pour pleurer impuissance. Il n’avait même pas réussi à prendre son numéro de téléphone, tant la fille était stricte et intouchable. D’ailleurs, elle n’avait jamais rien su, rien de toutes ces choses qui se passaient, de tous ses hommes qui la désiraient, ces hommes qui avaient tout le temps  fait l’amour, seulement dans leur tête et leurs rêves.

Fille aînée d’une famille de quatre enfants, Alida a une sœur aussi intraitable qu’exigeante. Etant en location à Cotonou, ils ont déménagé au cours de l’année à Calavi, pour rejoindre la maison familiale. Il ne fait jamais mieux vivre que chez soi. Mais ce déménagement causa assez de soucis à Alida. Elle devrait affronter tous les matins à l’aller et tous les soirs au retour, sur la route, un embouteillage qui ne dit pas son nom. Etant la seule et principale route ralliant Calavi à Cotonou, ce tronçon est aussi fréquenté que le marché international de Cotonou, Dantokpa. La plupart des Béninois, fuyant l’air pollué de Cotonou, se sont réfugiés à Calavi. Malgré cela, Cotonou n’est toujours pas désengorgé. Au contraire, on dirait que chaque jour que le bon Dieu fait, des centaines de personnes, sorties de nulle part, y viennent habiter. Et c’est ce quotidien qu’elle doit affronter.

Ayant connu l’amour trop tôt, à l’âge de dix-sept ans, mais gardant un mauvais souvenir de ce romantisme amer qui n’a duré que le temps d’un battement de cils, elle portait dans son cœur les séquelles de sa mésaventure amoureuse avec Tagladja qui l’avait flouée et abandonnée. Et toutes les fois qu’elle réussissait à tomber amoureuse, il se fait que ce n’était pas réciproque. La meilleure partie qu’elle en tirait était d’ailleurs  la souffrance amoureuse. La prenant pour une fille facile, le rêve de ces hommes était de la posséder. Si son cœur n’est pas trop attaché à ces affaires de sentiments ou de relations sérieuses, Atamin-vivi quant à lui avait une règle d’or à laquelle il tenait par-dessus tout: « tirer sur tout ce qui bouge ». Que réserve-t-il à la pauvre Alida? La Bête et la Belle: une lutte acharnée s’annonce; un combat sans merci se profile à l’horizon…

 

 

Claude K. OBOE