Publié aux éditions Ruisseaux d’Afrique, cet ouvrage de 09 chapitres nous amène dès les premières lignes à la rencontre d’un couple déchiré où pugilats et disputes sont le lot quotidien. M. Donald, père de Moïse, grossit les traits de ce ménage burlesque où l’on découvre Isabelle une femme obèse et paresseuse. Et le clou, le savez-vous? Eh bien M. Donald est complètement fou de sa femme aux sens propre et figuré du terme. Et ce n’est pas tout. De la paresse de la grosse caisse qu’est Isabelle, l’obèse, on ne saurait en parler avec justesse sans en trahir la réalité. Mais quand on aime, on oublie les tares de l’être aimé, même si on en souffre intérieurement. Doux martyre! Délicate souffrance. N’est-ce pas que son amour le « ronge de jour en jour comme un produit corrosif » ? P13. De toute évidence, ce livre est un carrefour de vices où l’on n’est sûr de rien. Le lecteur est surpris au détour de chaque ligne. Et l’auteur, sans fard ni feinte, évoque les dégâts des pulsions passionnelles non maîtrisées et aux origines peu orthodoxes, tout en usant d’un humour fin et subtile qu’il faut être fin d’esprit pour percevoir. En peignant Donald sous les traits d’un mari cocu et ridicule, l’auteur évoque ici la problématique des mariages basés sur des « solutions miracles pour les mariages à risque » (P14). Ici le mari devient « un chien fidèle ». Mais comme le sort ne se soucie pas toujours des désirs humains, et aussi pour dépeindre que la nature, vengeresse par essence, ne supporte pas l’infamie, l’auteur fait périr en une matinée les deux parents: Donald se suicidait, alors que sa femme se faisait électrocuter suite à un coup de tonnerre. Un peu plus loin, l’auteur fait un réquisitoire des cercles secrets pour qui « Satan est un instrument créé par Dieu » et qu’on pouvait « utiliser pour le progrès du monde. ». Ici appelé « Cercle des progressistes », dans ces groupes qui ouvraient « la porte de la gloire » et des « privilèges inouïs » P21, une mise en garde était de mise « Le bien acquis peut se dissiper comme la fumée si on n’honore pas les engagements liés à son obtention. » P27. Le bien qu’avait acquis Donald était la belle Isabelle, sa future épouse qui n’était que l’appât d’un stratagème diabolique.

Dans les derniers chapitres du roman, l’auteur met en relief Moïse dans un dilemme : le choix entre l’amour d’une femme et le sacerdoce. Et c’est là le sommet du livre! Imaginez le pauvre Moïse, orphelin de père et mère! Quel avenir pour ce dernier? L’auteur allie espérance et fatalité et place sur le chemin de Moïse le Père Samuel. En effet, après son BAC, le père Samuel entreprit de l’envoyer chez son frère en Belgique. Mais peu avant son départ, l’amour s’introduisit dans la vie de Moïse en la personne de Rebecca. Rebecca finit par rejoindre son prince charmant à Bruxelles. Quand deux amoureux se retrouvent enfin… Mais très tôt, Moïse se sentit tout d’un coup attiré par une cause beaucoup plus grande : la prêtrise. Cette vocation subitement renouvelée ébranla la relation entre les deux amants. Mais est-ce pour longtemps? Quel sera le choix de Moïse? « Entre l’étole et la bague » ou entre le marteau et l’enclume? Comment gérer deux désirs forts et jaloux qui ne permettent aucun compromis ni aucune compromission? En tout cas, « Entre l’étole et la bague », sans être une leçon de catéchèse de la part de l’auteur qui est prêtre, se veut une invite à la quête de buts nobles dans nos vies. L’œuvre est invite à faire la vérité avec soi-même. Mûrir les motivations, penser et raisonner ses choix et les assumer au lieu de se laisser à de vagues moments d’extases illusoires. Mais que d’humour! Que d’intertextualités bibliques? L’œuvre est belle, agréable et élégante. D’une profondeur édifiante, elle recentre le débat sur la qualité de nos familles. L’amour y règne-t-il toujours? Comment les enfants y sont-ils éduqués? Quelles valeurs leur transmettons-nous? On ne saurait sortir de ce livre sans se demander : « si j’étais Moïse, qu’aurais-je fait? Sacrifier l’amour de Dieu pour celui de Rebecca? Sacrifier l’amour de Rebecca pour un appel dont je ne suis pas sûr qu’il aboutira ou pas? Que faire?  » La réponse à ces questions réside en un seul acte: prendre le livre et le lire. N’hésitez donc pas, car vous attend au carrefour de rire et du délire un personnage d’un autre âge : Isabelle, la belle, Isabelle, l’obèse…

 

Théodore Gildas ZINKPE Adanchédé.

  1. J’ai lu ce livre. La chronique m’a suffi pour me replonger dans les beaux épisodes de ce long récit. Merci Gildas