Introduction
L’imagination nous conduit, le plus souvent, loin de la réalité mais nos pensées nous situent, le plus près possible, dans le réel. Notre entourage détermine nos pensées, et alors, nos mots n’en viennent qu’à peindre que des maux. La société souffre puis s’étouffe face à ses nombreux problèmes et défis. Ce qui est intéressant est que nos pensées peuvent nous amener également à dénoncer les tares sociales pour que des solutions soient trouvées ou juste pour informer ceux qui se cachent sous le pagne de l’ignorance : graines de pensées. L’œuvre Les graines de pensées est un ensemble de cinq nouvelles écrites par le béninois Christophe Hlouin.

Biobibliographie de l’auteur
De nationalité béninoise Christophe Houékpon HLOUIN est diplômé en Lettres Modernes et en Sociologie Anthropologie de l’Université d Abomey-Calavi. Son attachement pour la presse le poussa aussi à se faire former en journalisme. Très engage en Littérature il fonda et dirige sa propre maison d’éditions « Taka Editions » depuis plusieurs années.
Auteur de plusieurs ouvrages, il a à son actif des recueils de poèmes tels que:

  • Le rosé en 2008
  • Regards vers le ciel en 2012
  • Je romps avec le silence en 2014
  • Si ma belle mère était sage, suivi de « femme je te célèbre » en 2015
  • Le secret du trésor en 2016
  • Les paysages pittoresques de l’Arrondissement de Sodohomey en 2017

Il est aussi l’auteur du recueil de nouvelles « Les graines de pensées  » (2016 ) qui fait l’objet de notre étude.

Résumé
La première nouvelle baptisée « Les Epines de l’enfant placée’’ nous confronte au phénomène de Vidomegon et ses affres, un réel problème du 21e siècle considéré comme une autre forme de l’esclavage. En effet, l’histoire s’articule autour de Houenoukpo, une très belle jeune fille, confiée à sa tante à cause de la précarité déshumanisante dans laquelle vivaient ses parents. Arrivée chez ses parents adoptifs, on lui assigna rapidement d’imposantes tâches domestiques qu’elle devrait exécuter tous les jours : se lever avant tous, se coucher après tous, aller vendre pour rapporter de l’argent, servir tout le monde jusqu’aux petits maitres de maison, ses cousins, les enfants de sa tante. Vu les conditions de plus en plus précaires et austères dans laquelle elle vivait désormais dans sa nouvelle famille, elle se livra à la prostitution pour subvenir à ses petits besoins. Sa beauté rayonnant malgré tout, elle tombera enceinte de son cousin Rigobert à qui, au cours d’une nuit, elle offrit le service de lit. Inceste ? …

La deuxième nouvelle intitulée ‘’La loi du couvent’’ peint les maux que l’on reproche de plus en plus aux religieux, les hommes de temples. Il s’agit principalement des luttes grégaires qu’ils se font entre eux pour s’accaparer du fruit qui leur est cependant défendu, les femmes devant lesquelles ils succombent de plus en plus. Ils unissent au mariage les hommes et les femmes mais détournent les femmes quand celles-ci viennent leur demander de l’aide. Le récit fait mention également de l’un des chefs de temple appelé Lucifer qui endormit Forceline, la femme de Honikou venue lui faire le compte des quêtes et abusa d’elle, alors que son mari, un bienfaiteur du temple l’ayant accompagnée, l’attendait au portail depuis fort longtemps. N’en pouvant plus d’attendre, il ira surprendre les deux en mauvaise posture. Sacrilège !

Dans la troisième nouvelle ‘’Mon sort d’amour’’, il nous est donné de contempler Tranquilien, un jeune garçon intelligent, studieux et appliqué. Depuis son bas âge, seule sa mère s’occupa de lui après la mort de son père. Ses performances scolaires Lui ont valu l’aide du maire de sa commune jusqu’à l’enseignement supérieur. Après sa soutenance, il s’éprit d’amour pour Odile, une hôtesse qui avait un passé lourd soldé par une petite fille, Gbèmèho que Tranquilien accepta volontiers cependant de garder. Les années trépassant, un oncle maternel de Odile vient chercher Gbèmèho pour la donner en mariage à son fils Noudazé qui l’engrossa mais demeurant incapable de prendre ses responsabilités. Tranquilien au coeur bon accepta à nouveau de s’occuper de la mère et de l’enfant. Les conditions réunies, Lodonou grandit et devint inspecteur de police… C’est alors que le père revint se révéler à lui. Mais il refusa catégoriquement de le reconnaître comme son géniteur malgré tout ce que Tranquilien, Odile et maman kiki essayaient de lui faire comprendre. Ce n’est pas quand tout va bien qu’on est Père, On doit l’être aussi quand tout va à l’eau. L’auteur montre l’irresponsabilité de certains papas envers leurs enfants qui se sentent pères seulement quand les enfants arrivent à émerger dans la vie.
Dans la quatrième nouvelle intitulée « Le fruit du mensonge », l’auteur se montre radical: Dire des mensonges n’est et ne sera jamais un acte vertueux. D’ailleurs cela n’engendre que des troubles très déshonorants.

Avec « Le fruit du mensonge« , Christophe relate l’histoire d’un jeune homme débrouillard qui après ses études en agronomie fut reçu par le ministre de l’agriculture. Il trouva une entrée couchée pour squatter dans la concession de Hogan, une menteuse professionnelle du quartier. Très délicat dans ses choix, il s’enticha dé tantie couturière qui lui donna pour un garçon appelé gloire à Dieu. L’harmonie entre le couple était louable mais cela énervait Hogan. Alors, elle prit l’habitude d’aller raconter des balivernes à maman Toto, la belle soeur. Même quand les deux semblent juste se reprocher de petites choses, Hogan se fait le Loisir d’en parler comme des actes de guerre. Mais, vint un jour, où son mensonge dépassant les bornes conduit maman Toto à s’enquérir des bonnes versions. Ce fut la grande honte au quartier pour elle. Peu s’en fallait, elle aurait pu désunir le couple. L’auteur dénonce ici les mauvaises langues pour qui le malheur des autres fait leur bonheur. Il invite à une consolidation des couples au détriment des menteurs, des envieux.

‘’Les graines de paix’’ vient achever en cinquième position « Les Graines de Pensées » de l’auteur. Dans cette cinquième partie, il nous confirme l’importance de la paix dans le monde et primordialement pour une nation. En effet, le président Tobiyi fort de son pouvoir clame mettre son pays « à feu et à sang ». Cette sombre expression fera donc l’objet de débat entre un politologue et Dame-rossignol, une émission présentée par un journaliste bien averti. Les avis sur la responsabilité et la gestion du pays par le président étaient différents selon les groupes d’appartenance. Des citoyens se sont prononcés mais la question de la paix dans le pays était prépondérante vu l’imminence des élections et la féroce volonté du président à sauvegarder son fauteuil présidentiel. Serait-ce toute l’actualité aux veilles des élections de 2016 ? L’auteur aurait pris un sacré plat de témérité pour avoir condensé par écrit une telle période politique. Les graines de pensées a le mérite de tisser des liens avec des évènements récents, de se faire ami très proche de la réalité en dépit des dissimulations qu’on y trouve. Le style de l’auteur se fait simple pour faciliter la lecture et rendre accessible son art à tout lecteur qu’il soit bon littéraire ou pas. L’auteur dénonce et dévoile les mauvaises manières des religieux, des hommes politiques, des femmes à démangeaison buccale, la souffrance des enfants placés, la bonté et la sagesse de certains hommes. Il nous révèle par écrit un univers que nous observons tous les jours. Avec Les graines de pensées, on comprend que : « si chacun de nous pouvait cultiver mutuellement la liberté, l’élément fondamental qui conduit à la paix, chaque citoyen aura la liberté de vivre. La liberté appelle la paix. La paix appelle à la réconciliation. Et la réconciliation recourt au pardon ». Puis, « c’est du bien être de chaque citoyen que viendra la paix ». (Page 99).

Etude de quelques thèmes et bref aperçu sur les personnages
Première nouvelle : La maltraitance des enfants placés
Selon le dictionnaire Larousse poche+ 2016, la Maltraitance est « l’ensemble des mauvais traitements infligés à une personne qu’on a sous son autorité ou sous sa garde ». Dans la première nouvelle « Les Epines de l’enfant placée’’, on note la maltraitance de Houénonkpo par sa tante, alors que ses parents espéraient un mieux être à l’enfant. Elle devint l’esclave de la maison et ne recevait aucune marque d’affection, aucun soin commode. Par conséquent, elle se livra à la prostitution. L’auteur en abordant ce thème montre le côté mauvais du phénomène de Vidomegon qui, jusqu’à nos jours demeure. Maltraiter un enfant, c’est l’empêcher de bien s’épanouir, maltraiter un enfant est assez grave en ce sens que celui-ci ne connaîtrait pas réellement d’affection et sa vie conjugale risque d’en prendre un sacré coup. L’objectif visé par cet écrit de l’auteur est aussi d’inciter les acteurs politiques à s’intéresser à cette autre forme de l’esclavage qui paraît désuète mais qui continue de prendre de l’ampleur. Créer des cadres spéciaux pour les enfants dont les parents sont très démunis et incapables de subvenir aux petits soins des enfants telle la structure SOS, serait une solution à laquelle il faudra bien s’atteler.

Deuxième nouvelle : La femme: fruit défendu mais irrésistible aux religieux ?
Selon la Bible, la femme est une créature de Dieu mais vient de l’homme. Force est de constater alors l’effet irrésistible que la femme a sur l’homme. Cependant, certains hommes selon leur obédience promettent et décident de rester sans approcher de la femme qui devient alors le fruit défendu. Mais dans cette deuxième nouvelle, « La loi du couvent », l’auteur révèle la faiblesse de ces hommes religieux. Non seulement, il montre à travers une histoire les querelles entretenues entre les religieux pour le fruit défendu mais également la mauvaise manie de certains d’entre eux qui unissent l’homme et la femme et de façon mesquine convoitent la femme. Comme illustration, il présente Lucifer, un chef de temple mais aux habitudes de celui dont il porte le nom qui abuse de la femme d’un des bienfaiteurs du temple. Au regard du texte, on comprend que certains religieux n’arrivent plus à respecter leur serment fait devant Dieu et le peuple. Et là réside le grand mal. Car on sait tous que se passer de la femme nécessite avoir une force surnaturelle. Ce thème est intéressant car il aborde un fait social qui écœure bon nombre personnes qui pourtant restent sans voix. Il interpelle les acteurs ecclésiaux.

Les personnages principaux intervenus ici sont :
Lucifer : le chef temple qui abusa de Forceline.
Forceline : La femme que le chef endormit pour en profiter.
Conscience et Bougie : jeune couple désuni à cause de la fréquence de Bougie au temple.
Honikou : le mari de Forceline.

Troisième nouvelle: De l’amour du prochain et de l’irresponsabilité de certains géniteurs
Aimer sans tenir compte de l’intérêt que nous pouvons trouver chez l’autre, est certes difficile et rare, mais pas impossible. La troisième nouvelle, ‘’Mon sort d’amour’’, nous plonge dans cet univers où l’amour règne sans défaut, pardonne le passé lugubre de l’autre et favorise un lendemain meilleur. Tranquilien amoureux de la belle Odile lui pardonne ses bévues passées et l’accepte sans condition elle et sa fille dont il n’est pas le père. Il accepte assumer la responsabilité, endosser les charges. Cela interpelle les jeunes gens de nos jours qui ne veulent pas accepter une femme avec l’enfant d’un autre. Le faire, ce n’est pas être bête. C’est plutôt, une preuve d’un amour désintéressé. Le texte, au-delà du bon côté de l’amour qu’il présente, évoque l’irresponsabilité de certains géniteurs comme Noudazé qui a engrossé la fille d’Odile mais se révèle incapable de s’en occuper. Ce que l’on retient est que tant qu’on n’est pas prêt ou capable de s’occuper d’une grossesse, on ne devrait pas s’y aventurer. Une fois encore, Tranquilien va s’occuper de Gbèmèho et de l’enfant de Noudazé. L’intérêt de ces thèmes est qu’ils sensibilisent et incitent les jeunes gens à la bonté, à un amour sans intérêt et à la prise de leur responsabilité quand ils enceintent une jeune fille. Ce n’est pas quand l’enfant émergera plus tard dans la vie, qu’il faut revenir demander pardon et reprendre son rôle de géniteur. Il peut être déjà tard.

Les personnages principaux à ce niveau sont :
Tranquilien: jeune intelligent, docile, vertueux, mari de Odile, il a veillé sur Gbèmèho et Lodonou comme un père, un exemple d’homme à suivre.
Odile: mère de Gbèmèho et femme de Tranquilien.
Maman Kiki : vaillante mère de Tranquilien.
Noudazé : fauteur de trouble, géniteur irresponsable de Lodonou.
Lodonou : devenu inspecteur de police.

Quatrième nouvelle : Le mensonge : un vice à éviter incessamment.
Selon le dictionnaire Larousse poche+ 2016, le mensonge est une affirmation contraire à la vérité. Et c’est exactement ce que fait Hogan, la menteuse professionnelle du quartier. Le mensonge n’amplifie que le mal. Il ne conduit qu’à des situations déshonorantes et honteuses. Écrire cette quatrième nouvelle fait de l’auteur un écrivain vivant, car de nos jours le mensonge est établie comme une norme, un culte qui fait beaucoup d’adeptes. Mais en réalité, c’est un mal qu’il faut absolument éradiquer. Les mouchards sont partout et aller mentir devient un job ou un passe-temps. Or, manquer de dire la vérité peur détruire le bonheur et la réputation des autres.
Ce thème développé par l’auteur ou plus précisément cet aspect de ce thème montre que tôt ou tard, la vérité triomphe toujours sur le mensonge. Mieux vaut dire la vérité que mentir et subir ses conséquences : les fruits du mensonge.

Les personnages sont :
Enagnon : jeune homme travailleur, mari de Tanti coiffeuse, sa femme.
Hogan: menteuse professionnelle de son quartier, elle va subir les frais de ses mensonges en prison.
Maman Toto: propriétaire et belle-sœur de Enagnon.

Cinquième nouvelle : La paix : le plus grand bien de l’humanité.
Selon le Dictionnaire Encyclopédique AUZOU, la paix est la situation d’un pays qui n’est pas en état de guerre, la tranquillité, la bonne entente, la quiétude. La paix est indispensable pour former une unité. Être en paix, c’est être dans la quiétude. C’est un état d’âme et d’esprit qui permet à tous de vivre dans la quiétude et la sérénité. C’est un comportement que tout le monde doit s’atteler à adopter. Malheureusement, le plus souvent, nos instincts nous poussent à la guerre, à la discorde. C’est tantôt l’un qui veut avoir la main mise sur tout et tous ; tantôt l’autre qui veut devenir le plus riche de tous et prouver sa force; ou ce sont des envies éternelles de gouverner qui nous habitent et s’emparent le plus surtout nos gouvernants qui jamais ne veulent céder la place de peur qu’on ne découvre leurs mauvaises manies ou parce qu’ils sont corrompus pas le virus du pouvoir. C’est le cas du président Toboyi qui prévoyait mettre à feu et à sang son pays, tant il tenait à sauvegarder son fauteuil présidentiel. Ce qu’il y a lieu de savoir, à partir de ce thème développé dans la cinquième nouvelle ‘’Les graines de paix’’,c’est la prépondérance de la paix dans la vie quotidienne des citoyens, gage du développement de la nation. Sans Paix, tout le monde serait dans l’inquiétude et rien ne pourrait avancer. Il est donc très important que nous cultivions l’esprit de paix.

Les personnages principaux ici sont :
Le journaliste : qui présente l’émission télévisée.
Le politologue: invité au débat.
Dame-rossignol : invitée au débat et une personnalité du pays.
Trois citoyens : appelés à donner leurs avis sur le l’idée du débat.
Toboyi : président, auteur de la phrase : »Je mettrai ce pays à feu et à sang « .

Quelques citations :
1- » La force des mots doux, c’est la force de la réconciliation et de la vie durable.  » page 25
2-« Quand on aime quelqu’un, on n’aime pas le partager avec autrui » page 53.
3-« Je vous exhorte à changer de mentalité et à cultiver l’humilité, l’écoute de l’autre, la bonté, le pardon, la tendresse, la discipline et la crainte de Dieu. Voilà les sept piliers qui mènent à la paix, la paix durable » page 90.
4-« La préservation de la paix dépendra de la gestion du pays par les politiciens » page 94.
5-« La paix est comme l’enfant qui porte soigneusement une mère qui n’est pas amère, espérant qu’un jour, elle obtiendra le fruit de la souffrance  » page 95.
6-« C’est du bien être de chaque citoyen que viendra la paix  » page 99.
7-« L’école: source de connaissance ; la connaissance qui engendre la paix ; la paix qui enfante Me développement ; le développement qui érige la liberté ; la liberté qui donne l’épanouissement auquel aspire le peuple, c’est-à-dire, chacun et tous » page 99.
8- » La paix est un élément capital qu’il faut pour un pays  » page 93.
9-« Si chacun de nous pouvait cultiver la compréhension mutuelle, la liberté, l’élément fondamental qui conduit à la paix, chaque citoyen aura la fierté de vivre. La liberté apporte la paix. La paix appelle la réconciliation. Et la réconciliation fait recours au pardon. » page 91
10-« Le temps des élections, c’est un temps à risque, une porte ouverte à tous les dangers  » page 96.

Conclusion
Le recueil de nouvelles « Les graines de pensées » de Christophe H. HLOIN sont un miroir promené le long des murs de nos sociétés et de nos consciences. L’auteur s’est attelé à nous dire la vérité sur nous-mêmes : de notre prise de conscience individuelle et collective viendra pour nous le salut. Le style utilisé est assez particulier avec des diglossies qui renseignent sur ses origines Fon. Puissent ces graines dans nos pensées éclore en vérité et en ligne de bonne conduite pour que vivent nos sociétés et notre pays.

Amoni BACHOLA