BL: Bonjour M. KOUASSI. Heureux de vous avoir sur Biscottes Littéraires. Présentez-vous à nos chers lecteurs, s’il vous plait.

HK: Merci beaucoup à Biscottes Littéraires. Je suis Hermann Yao KOUASSI, enseignant de français dans les lycées et collèges de Cotonou. Je suis un dramaturge et l’initiateur du jeu concours « Le Meilleur Orateur » dont la 3ème édition a connu son épilogue le 14 avril 2018.

BL: Vous êtes un dramaturge, et vous avez à votre actif, une demi-douzaine de pièces de théâtre. Dites-nous, pourquoi le théâtre ?

HK: J’ai à mon actif 4 pièces de théâtre, 3 documents pédagogiques et 1 recueil de nouvelles. Le théâtre parce qu’avec ce genre, je me sens plus à l’aise quand je veux dénoncer certaines choses indécentes de la société.

 

BL: Dans votre première pièce de théâtre « Pierre abandonnée », nous voyons que M. Ebah a eu des`relations sexuelles avec son élève, qui d’ailleurs était son enfant, une situation qu’il ignorait. Dites-nous, que voulez-vous dénoncer ?

HK: J’ai voulu dénoncer deux faits.

1) Les relations entre élèves et enseignants qui les amènent au lit. Si ces derniers se livrent à ce jeux, ils peuvent coucher avec leurs nièces sans le savoir ou avec leurs propres filles.

2) Je suis contre les jeunes filles qui, après un acte charnel tombent enceintes et très tôt constatant que l’auteur a fui ses responsabilités, refusent de donner le vrai patronyme à leurs enfants. Pour elles, elles sont déçues et cherchent à maugréer, en punissant l’auteur de leur grossesse. Elles ne pensent pas à leurs enfants. Pour moi c’est grave.

BL: Vous êtes aussi enseignant de français dans les collèges et lycées, donc, en contact avec les élèves, surtout les filles. Que pensez-vous de l’adage qui dit que « Celui qui travaille à l’hôtel doit vivre de l’hôtel », en référence à ces enseignants qui ont des relations intimes avec leurs élèves ?

HK: Je ne partage pas cet adage parce que l’enseignant est un éducateur. Un éducateur n’a pas le droit d’accepter des relations sexuelles avec ses élèves, quelle que soit leur beauté. Un éducateur est un père pour ses apprenants. Et vous savez qu’un père normal ne couche pas avec sa fille, même si cette dernière est belle, charmante et intelligente. Je suis conscient qu’il y a des filles qui harcèlent leurs professeurs, soit pour avoir des notes, soit parce q’elles sont amoureux d’eux. Mais c’est à nous éducateurs à savoir canaliser ces dernières et à les aimer et à voir en eux nos propres enfants et non des proies faciles. Je ne juge personne, mais l’éducateur qui couche avec ses élèves court de grands risques. De toute façon, la loi est déjà votée, et quiconque tombe dans ces travers sait ce qui l’attend.

 

 

BL: Dans « Immergence », nous ne voyons qu’un seul personnage (Djlanoudo) du début jusqu’à la fin. Les autres ne sont que des personnages d’évocation. Pourquoi ce choix de personnage à qui vous donnez libre cour, en tant que ministre, de critiquer son président « Le roi des rois ? »

HK: J’ai fait montrer à travers cette femme qu’en tant que ministre, elle n’est pas tenue d’accepter tout d’un gouvernement auquel elle appartient. Il faut avoir le courage de dire à ses collègues ministres ce qu’ils font, qui est hétérodoxe et qui détruit le tissu social du pays. Etre ministre, c’est aussi être objecteur de conscience, c’est pouvoir dire non au patron et aux collègues quand les décisions ne vient pas le Bien Commun et l’intérêt Général. Car avant d’être nommé ministre, l’on est d’abord une personne dotée de raison et de conscience, un homme intelligent capable de discernement. S’il faut être ministre pour n’obéir qu’aux ordres du chef, autant démissionner.

BL: Ce livre est-il une relecture de la vie politique au Bénin? Si oui, l’écrivain doit-il se cacher pour dénoncer certains faits de la société ou pour conscientiser le peuple ?

HK: Je ne puis le dire. Certes, il peut y avoir quelques images du Bénin, mais ce n’est pas le Bénin. Même si c’est le cas, je ne me suis pas caché. La preuve, le livre porte mon nom.

BL: De «  Pierre abandonnée » à  » ruse mielleuse », en passant par « Immergence », quel bilan pouvez-vous faire vous même?

HK: De quel bilan voulez-vous parler? S’il s’agit de la vente, je suis satisfait. Mes lecteurs ont aimé ces pièces de théâtre. Elles sont représentées dans plusieurs collèges. L’Institut Français du Bénin a abrité le 10 avril 2017, la lecture scénique de « Immergence ».

BL: L’une de vos œuvres était en lice pour le dernier Prix « Président de la République ». Comment l’aventure s’était-elle déroulée?

HK: Nous avons envoyé nos œuvres par les éditeurs et l’équipe commise pour la sélection par ordre de mérite a fait son travail. Mais nous avons été déçus parce que les critères de sélection ne sont connus d’aucun participant. Aucun de nous ne peut dire ce qu’on reproche à sa pièce de théâtre. Le bilan est désolant.

 

BL: Est-il aisé d’être écrivain au Bénin et de vivre de son travail d’écrivain ?

HK: Vivre de son travail d’écrivain au Bénin? Non. Nous n’avons aucune culture livresque. Or, c’est cette culture qui poussera les gens à lire et ainsi le livre de l’écrivain sera vendu à plusieurs centaines d’exemplaires. Mais hélas! Si à côté de ta plume, tu n’as pas une autre activité, tu risque de finir mendiant professionnel au Bénin.

BL: Quelle est votre plus grande satisfaction en tant qu’auteur et éditeur?

HK: Ma grande satisfaction en tant qu’auteur est que beaucoup de personnes me lisent et découvrent des particularités dans mes œuvres (elles me le disent). En tant qu’éditeur, les livres des amis sont également appréciés. Et cela constitue un motif de joie.

BL:  Nous voudrions vous demander, en tant qu’éditeur, ce que vous  pensez-vous de l’édition du livre au Bénin.

HK: Je pense que l’édition au Bénin a encore du chemin à faire. L’Etat ne sait pas si ce secteur existe et et qu’il touche la vie des écrivains qui font la fierté du pays. Il n’accompagne pas les maisons d’édition qui existent et qui, malgré leurs moyens assez limités, font du bon travail.

BL: N’y a-t-il pas un danger à cumuler le rôle d’auteur et celui d’éditeur-distributeur?

HK: Il n’y a aucun danger à cumuler le rôle d’auteur et celui d’éditeur-distributeur parce que les deux ne veulent pas dire la même chose.

BL: Pensez-vous que l’autoédition soit la panacée aux nombreux problèmes auxquels sont confrontés les auteurs?

HK: Je trouve que l’autoédition est  la meilleure solution, car  non seulement elle épargne à l’auteur  beaucoup de contraintes, mais lui donne cela lui donne la latitude de  fixer son prix lui-même sans aucune pression ou exigence. Enfin, elle décharge l’éditeur de nombreuses tracasseries.

BL: Vous arrive-t-il de rêver devenir un jour Ministre de la Culture, ou de l’Education ou même Président de la République?

HK: Je n’ai jamais fait ce rêve. Je n’aime pas les postes politiques. Mais au cas où la providence le déciderait, je ferai en sorte qu’aucun maillon de la culture ne soit négligé. Je mènerai des actions pour que les apprenants aient l’accès facile aux livres dans tous les départements. J’amènerai les mairies à jouer leur rôle par leurs différentes directions qui s’occupent de l’éducation en construisant des bibliothèques dans leurs communes (au moins 2 dans des quartiers stratégiques). Tous les orphelinats seront dotés de bibliothèque. Lorsque les écrivains sortent leurs livres et voient que le ministre s’intéresse à eux par une bonne politique, ils n’hésiteront pas à l’accompagner. Les artistes-comédiens seront aussi connus. Par des actions, ils seront connus par leurs compatriotes sur le plan national; nous allons les vendre à l’international. Nous allons œuvrer pour que le secteur soit professionnalisé.

BL: Qu’attendez-vous de vos lecteurs?

HK: J’attends un bon retour de mes livres après sa lecture par mes lecteurs. Lorsque je dis « un bon retour  » ce n’est pas qu’ils vont me magnifier, mais qu’ils me donnent leurs impressions sur mes livres. Ils peuvent avoir un regard critique sur ce qu’ils ont lu, sur l’écriture, cela ne m’égratignera point. Au contraire, je me corrigerai. Certains le font spontanément, d’autres c’est après des appels. Ces derniers se sentent contraints de finir la lecture du livre acheté.

BL: Quel projet pour cette fin d’année ?

HK: J’ai prévu publier un recueil de poèmes.

BL: Votre mot de la fin.

HK: Je vous remercie pour tout le travail que vous faites en révélant de nouveaux écrivains, les anciens dont les ouvrages n’existent plus pratiquement et ceux que beaucoup ne connaissent pas. Je souhaiterais que tissiez de grandes relations pour recevoir d’aide afin de créer une télévision qui ne parlera que de livres et d’écrivains.

  1. Bon travail. Il nous faut des jeunes de cette envergure pour le développement du monde littéraire béninois. Courage et persévérance, le meilleur reste à venir.