Mireille Gandébagni raconte dans son livre « Loin, vers mes treize ans » (103 pages),  publié aux Éditions plurielles, des histoires de vie. Il s’agit d’un recueil de neuf (09) nouvelles les unes aussi palpitantes que les autres. Et d’une nouvelle à une autre, on décèle la finesse et la délicatesse d’une plume sensible qui invite le lecteur au cœur des tragédies qui foudroient et broient des vies entières.  En lisant ce recueil, l’on a l’impression de goûter différentes saveurs culinaires d’un milieu donné. Et ici, les saveurs sont des nouvelles, des vies déroutantes et percutantes. Des récits où chaque personnage vit son monde comme un fardeau, une mission incurable de souffrances. Il en est ainsi avec Jude, Éphrem et Edy qui perdent la vie lors d’un grave accident de la route dans « L’inévitable duel« . Par contre, avec Monsieur Bonheur, dans un style concis et facile à lire, l’écrivaine campe son œuvre sur la légendaire sagesse du caméléon « Le sol est dur. Pourtant, je le tâte avant de marcher« .  La prudence sur les routes, loin d’être une loi qui oblige par exemple à porter le casque quand on est à moto, revient finalement à s’aimer soi-même et à aimer les autres. Mireille GANDEBAGNI a su user de sa plume pour mettre chacun devant les conséquences de ses actes. Mieux, elle invite chacun à être lui-même,  à faire ses propres expériences et non à se contenter des avis des autres. En témoigne, la déception qu’a connue Ode lors d’une aventure intéressée dans laquelle la plongeait son amie Odile.

Le livre a une charge « doloriste » remarquable. Que ce soit avec la nouvelle intitulée « Une pétasse pas comme les autres » ou  » A mes larmes manquées« , l’auteure peint la vie et le réel avec des couleurs de larmes et de désolations profondes.  Quels peuvent être les sentiments d’un enfant quand il découvre finalement la vraie face de sa mère dans des circonstances les plus inattendues? Quand on a une mère prostituée, quel peut être le degré d’amour qu’on portera pour elle? En tout cas, dans ce recueil, le dolorisme se conjugue avec la mélancolie dans « Petits soleils éteints« , « Loin vers mes treize ans« ,et  « Rose sans épines« , pour enfin culminer dans cette nostalgie où l’on fait la triste expérience de la souffrance avec des personnages dont on peut dire qu’ils ne sont nés que pour souffrir.

Florent Couao-zotti les décrit aisément dans sa préface: »Les nouvelles de Mireille Gandébagni sont sombres, violentes et tragiques. Ses personnages que la vie a usés et confinés au rang de bêtes froides ou de monstres délirants, se révèlent comme des avatars ou des êtres décalés d’une société africaine postmoderne complètement désarticulée, comme promise à la désintégration. »  Mais à travers la nouvelle « Par amour« , l’énigme de la souffrance s’éclaire à l’aune de la charge d’amour qui détermine les actes que nous pouvons poser à un moment ou à un autre de notre vie.

Tour est donc dit. Des personnages autant forts que perdus dans une civilisation dépaysante. L’ouvrage est là. Parlant, vivant et plein d’espoir. En chaque ligne où trône la tristesse, se cache aussi toujours un espoir ténu qui ne tient qu’à la persévérance.

Ce livre se laisse lire aisément. Le format en facilite le transport, et la clarté la dégustation. Ne vous laissez pas conter ce livre. Happez-le et délectez-vous-en. Peut-être qu’il vous ramènera, loin, vers vos treize ou seize ans, sait-on jamais….

Myrtille Akofa

  1. Je relis tout ceci avec une pointe de fierté. Quand on est bien-né en écriture, ça ne trahit pas. Beau travail Mireille!

    • Aux âmes bien nées, la plume n’est que pur délice, Myrtille Akofa