« Nous sommes tous des féministes« , à l’origine, était une conférence donnée par de Chimamanda Ngozi Adichie en décembre 2012 au TEDxEuston, un colloque annuel consacré à l’Afrique.  Le texte que nous présentons ici, est celui de cette conférence, traduit en français, remanié par Folio en 2015 et vendu à deux euros. Pour la publication de cet inédit, il a été ajouté au texte de la conférence, une nouvelle: « Les marieuses« .

1-  » Nous sommes tous des féministes  »

« Nous sommes tous des féministes « n’est pas juste une œuvre dans le monde de la littérature, mais une voix pour ces femmes méprisées, apeurées, ces femmes qui n’ont pas encore le courage ni la force de prendre la meilleure voie pour lutter dignement pour leur liberté, leur égalité avec le mâle. La femme n’est pas née pour être faible, c’est la société dans laquelle elle vit, la tradition, l’éducation ou plutôt la vie qui l’affaiblie. Sinon, comment comprendre, que le fait d’être une femme peut empêcher d’exercer une certaine autorité. « J’avais très envie d’être chef de classe. Et j’ai eu la meilleure note. Puis, à ma grande surprise, la maîtresse a déclaré que le chef de classe devait être un garçon. » (page21) Quelle discrimination ! Pourquoi la priorité revient-elle aux hommes ? Et pourtant, être homme ou femme ne relève pas d’une nécessité, mais un accident de croisement chromosomique. Et l’auteur de s’indigner profondément, en faisant de cette indignation un lieu de réflexion sérieuse sur la question de l’égalité entre les sexes « Si nous faisons sans arrêt la même chose, cela devient normal. Si nous voyons sans arrêt la même chose, cela devient normal. Si les chefs de classe ne sont que des garçons, nous finissons par penser, même inconsciemment, que c’est inévitable. Si nous ne voyons que des hommes occuper les postes de chef d’entreprise, nous en venons à trouver « naturel  » que les hommes soient les seuls à être chefs d’entreprise. »

 

 

« Nous sommes tous des féministes » est une voix pour les sans voix, un tremplin pour les femmes vers une égalité certaine avec les hommes et une compréhension plus juste et méliorative de ce qu’est le féminisme. Car pour beaucoup, rapporte l’auteure avec ironie et amertume « (…) les féministes sont malheureuses, faute de trouver un mari. »  Être féministe n’a donc rien de criminel ou de malheureux comme la société a tendance à le croire. Les hommes devraient comprendre que le destin de la femme ne tourne pas nécessairement autour du mariage, la maternité, la cuisine. Son destin est pareil à celui de l’homme. On devrait se demander, si le mariage est une nécessité pour la femme. Même si le mariage est une bonne chose, il n’est en aucun cas, l’acte qui libère la femme du malheur puisque « Le vocabulaire du mariage est souvent un vocabulaire de possession, non un vocabulaire d’échange » (p.36 ). La société met la pression sur la femme et cette dernière se laisse faire. Et cela, « Les marieuses » en dit long.

 

 

2- « Les marieuses »

Cette nouvelle paraît comme une image de cette société phallocratique que Chimamanda essaie de combattre. Voilà une jeune fille qu’on marie avec son cousin vivant aux USA. Elle fut bien obligée d’accepter pour ne pas paraître ingrate.  « Un docteur en Amérique, avait- il dit rayonnant. Qui dit mieux ? … Il sera au pays début juin, avait ajouté tantie Ada. Vous aurez tout le temps de faire connaissance avant le mariage. »  Est- ce là, un mariage qui saura combler de bonheur chacun des partenaires? Enfin, pas pour Chinaza Agatha. Ses tuteurs ont lamentablement échoué dans leur choix. Bienvenue aux USA. Les masques tombes. La pauvre Nigériane est soumise à la rude épreuve de l’intégration qui signifie Américanisation. Son marie la veut une Américaine à tout point de vue: de la tête aux orteils en passant par la cuisine et le nom. Elle devait changer de nom et se faire appeler comme une américaine. Son nom Igbo est une honte pour son mari. Désenchantements. Déchirements intérieurs.

 

 

Dans ce livre, petit de par son épaisseur – juste 96 pages- mais dense de par sa profondeur et la dextérité par la quelle Chimamanda Ngozi Adichie aborde la question du féminisme aujourd’hui, l’on retient essentiellement que tant que les enfants ne seront pas éduqués au respect de l’autre sexe, nos sociétés continueront à reproduire les stéréotypes hérités de l’autre âge avec ce qu’ils contiennent de machisme, de passéisme et de fixisme. « Alors j’aimerais aujourd’hui que nous nous mettions à rêver à un monde différent et à le préparer. Un monde plus équitable. Un monde où les hommes et les femmes seront plus heureux et plus honnêtes envers eux-mêmes. Et voici le point de départ : nous devons élever nos filles autrement. Nous devons élever nos fils autrement.  » (Pp.31.32)

La question de l’éducation demeure centrale dans l’équilibre que doivent avoir aussi bien les femmes que les hommes dans l’approche de cette épineuse question du féminisme.

 

Camelle ADONON

 

Camelle ADONON est étudiante. Elle passe en deuxième année de droit à la Faculté de Droit et de Sciences Politiques d’Abomey calavi . Elle aime la lecture et l’écriture.