Conte : Le respect des règles est un pas vers la liberté

Mon conte roule, roule, roule et tombe dans le village O’COQS où vivait le peuple coquelet. C’était un village très prospère dont la richesse se racontait partout dans toute la contrée. Les habitants vivaient de l’élevage et du commerce des coqs. C’était d’ailleurs le seul village où l’on trouvait des coqs. Le village avait des règles et interdictions strictes. L’une de ces règles était de ne pas manger les coqs qu’eux-mêmes coquelets élevaient.

En effet, le coq était devenu leur totem dans le village. Aucun coquelet ne devrait en manger. Les sanctions étaient radicales et connues de tous. Enfreindre cette règle entrainerait une malédiction sur le village, une pauvreté sans précédente. Les coqs allaient perdre à tout jamais leurs dents. Et celui qui contrevient à la règle devrait mourir pour apaiser le mal.

Tous les habitants s’évertuaient à respecter les règles.

Un jour, Gbodja, frère jumeau de Sagbo, est allé à l’autre bout de la contrée pour vendre quelques coqs. Surpris par la nuit, il dut dormir chez son client. Le client ne savant pas que le coq est son interdit prépara l’un d’eux que mangea Gbodja. En effet, fatigué et affamé, il ne prit point le soin de demander de quelle viande était faite la sauce. Il en mangea gloutonnement et en demanda encore. Le lendemain, au moment de son départ, afin de faire pareil avec sa famille, il alla demander à son client la recette du repas de la veille s’exclamant : « jamais, je n’avais mangé une viande aussi délicieuse ».

Son client étonné lui confia qu’il s’agit bien de la viande de poulet qu’il lui a vendu hier. « Comment peux-tu dire que tu n’en avais jamais … ». A ces mots, Gbodja perdit connaissance. Quand il commença à se retrouver, il se mit à crier : pourquoi est-ce moi qui porterais la paternité de la malédiction ? Personne ne pouvait comprendre ce qui lui arrivait.

Son client, homme de bonne volonté, décida de le raccompagner dans son village.

Gbodja, arrivé dans son village constata que rien n’a vraiment changé. Les coqs avaient toujours leurs dents. Et les activités allaient bon train. C’est alors qu’il se mit à se vanter partout à qui veut l’entendre et même à qui ne le veut pas, qu’il mangeât du poulet que rien n’y fit.  Il n’avait pas compris que son ignorance lui a valu le pardon de cette transgression.

Il convainquit son frère jumeau avec qui il s’entêta en mangeant de plein gré, la troisième nuit après son retour, la viande du dernier coq qu’il leur restait du marché.  Cette nuit-là, les coqs du village se mirent à pleurer, crier, déblatérer jusqu’à en perdre leurs langues et leurs ailes. Finalement ils perdirent leurs dents, et depuis lors, n’en ont plus jamais eu. C’est pourquoi les coqs de nos jours n’ont pas de dents.

Le lendemain matin, les deux frères furent réveillés par des coups de bâton des gardes du chef du village. Tout le village n’ayant pas pu dormir à cause des cris des coqs s’était réunis de bonne heure au palais pour se plaindre.

Les jumeaux arrivés ligotés furent mis à genoux devant le chef qui ordonna au devin de prédire ce qu’il fallait faire face à cette situation. En effet, il est prescrit que quiconque enfreint cette règle devrait mourir au pilori pour aller rendre compte aux ancêtres. Mais une autre règle dans le village interdisait de mettre à mort des jumeaux.

Face à tant d’interdictions et de règles, le dilemme fit place. Pour ne pas subir le courroux des ancêtres, le devin après consultation décréta que les jumeaux devront être répudiés du village à tout jamais et que dorénavant aucun membre du village ne doit leur adresser la parole. Celui qui transgressera cette nouvelle interdiction subira le même sort que les jumeaux. Et ainsi naquirent une autre règle et une autre interdiction dans le village. Les jumeaux, même s’ils échappèrent à la mort, comprirent que les règles sont faites pour être respectées.

Que retenir : ce sont nos mauvais comportements, nos vantardises qui conduisent à l’édiction des règles et interdictions dans la société. Si une interdiction appelle une autre, ne faudrait-il pas respecter les règles pour ne pas étouffer notre propre liberté et nos envies ?

Amoni BACHOLA