« Ô Némésis ! » (4/5) Junior GBETO

« Ô Némésis ! » (4/5) Junior GBETO

Deux ans seulement s’étaient écoulés depuis que Maory et Johann vivaient ensemble. Johann se faisait  maintenant plus rare à la maison, il était moins attentionné, moins galant, moins doux avec Maory. Il rentrait de plus en tard les soirs et parfois ivre et débitant des âneries. Il arrivait même qu’il s’absentât des jours sans avertir quiconque de l’endroit où il allait. Maory méconnaissait son homme. Elle découvrait un Johann étrange. Le temps passait et la situation prenait des proportions de plus en plus alarmantes. Un soir, Maory reçut sur son compte whatsapp une vidéo qui ne la fit pas sourire. Sur la vidéo qui ne dura que trois minutes et dont elle ignorait le destinataire, elle reconnut -ô scandale- Johan en nage, donnant des coups de reins athlétiques entre les cuisses  tatouées d’une jeune femme qui gazouillait de plaisir. N’en croyant pas ses yeux, elle vit et revit la choquante vidéo pour se convaincre que ce n’était là qu’un honteux montage et que l’homme qui livrait bataille n’avait jamais été son Johann. Hélas ! la vidéo paraissait trop vraie pour qu’on doutât de son authenticité. La pauvre Maory fondit alors en larmes. C’est alors qu’elle se rappela les fréquents appels en plein milieu de nuit auxquels Johann se cachait pour répondre, les <<bisous, bisous !>> qu’elle avait maintes fois déjà chuchotés à un interlocuteur inconnu, ses sorties nocturnes répétés de ses dernières semaines, les suçons dans son cou, le parfum de femme dans sa veste. De plus, le visage de la <<pétasse!>> que chevauchait son mari lui paraissait vaguement familier. Elle se demandait: <<Serait-ce la femme assise au premier rang à notre mariage ? Serait-ce la même que celle que j’ai souvent rencontrée en allant à son bureau ? Noonn, Johann ne peut pas me faire ça. >> Elle pleura de plus bel et criait de rage. Cette fois c’en était trop. Elle ne laisserait pas passer cet énième affront. Johann l’entendrait cette nuit-là, elle lui dirait sans équivoque ses quatre vérités, pures, crues, drues.

 

 

22h30. Le mari infidèle rentra enfin. Il fit la bise à Maory qui lui fit un sourire jaune. Les enfants dormaient déjà. Ils dînèrent donc seuls, sans s’échanger le moindre mot puis montèrent se coucher. A peine entrés dans la chambre conjugale, Maory en ferma la porte et les fenêtres et en larmes alluma la vidéo qu’elle força Johann à regarder. Celui-ci resta perplexe et avait l’air confondu. Choquée par cette attitude coupable, Maory lui lança le téléphone au visage et lui asséna une gifle sonore. Elle s’apprêtait à lui en administrer une autre quand Johann lui saisit énergiquement le bras et la repoussa violemment. Maory alla s’échouer sur le matelas, manquant de se cogner la tête contre le rebord du lit. Johann fonça sur elle, la gifla, la saisit par la gorge et la roua de coups. Maory hurlait de douleur sous l’avalanche de coups. Déchaîné, Johann n’en avait cure et continuait en lui vociférant des :<<Pétasse !>>, <<sale profiteuse!>>, <<grosse baleine!>>, <<sorcièr!e>>. Cela dura une bonne dizaine de minutes. Impuissante, la jeune femme se débattit longuement et Dieu merci parvint à s’échapper au bout d’une lutte acharnée. Elle alla s’enfermer dans la salle de bain où elle passa tout le reste de la nuit à gémir et à pleurer. Johann de son côté ne resta pas plus longtemps à la maison. Il partit on ne sait où et ne revint que trois jours après. Le jour de son retour, il y eut une nouvelle altercation entre son épouse et lui, puis une autre le lendemain et presque tous les jours qui suivirent. Avec Maory, Johann était devenu un véritable monstre, un goujat irraisonnable. Il lui criait dessus, la battait et poussa même le vice jusqu’à la violer. Tout se passait dans l’intimité de leur chambre conjugale. Résignée, Maory souffrit ce calvaire pendant des mois, sans oser en parler à quiconque. Ni à Janis sa meilleure amie ni à tata Eudoxie qui n’avait plus de ses nouvelles, ni à sa mère ni à Nafi qui poursuivait ses études en Suisse. Dans son cœur bouillonnait une rage indescriptible. Une soif terrible de vengeance lui brûlait la gorge. Un événement se produisit qui allait être la goutte d’eau qui fit déborder le vase.

Un matin qu’elle cherchait par hasard le double des clés de sa voiture, elle découvrit, bien rangés dans une valisette, deux passeports pour la France, l’un au nom de Johann kemba son mari, l’autre au nom d’une certaine Katherine MALA. Ah Katherine Mala, c’est donc son nom. Elle reconnut le visage sur la photo. Elle la reconnut, c’était elle, la fille de la vidéo, la salope responsable de ses malheurs. Elle s’en mordit les lèvres de rage. Comme ça, Johann comptait une fois encore l’abandonner elle et ses gosses et aller se la couler douce en France avec sa maîtresse. <<Intéressant ça !>>

Elle rangea les affaires telles qu’elle les avait trouvées, prit les clés de sa Citroën, sortit et ne revint qu’une heure après avec une fiole remplie d’un liquide blanchâtre. Mme Kemba ouvrit l’armoire au chevet du lit conjugal, en sortit deux inhalateurs dont elle vida le contenu. Elle y vida soigneusement le liquide de la fiole, les referma non sans mal puis les rangea, sa sale besogne faite.

Vendredi soir. Dans deux jours, le bourreau et sa maîtresse voleront pour la France. L’idée vint subitement à Maory d’abandonner cette stupide vengeance et de faire disparaître les inhalateurs trafiqués. Malheureusement Johann rentra ivre ce soir encore et la viola une nouvelle fois. Pas question pour Maory de lui pardonner ce faux pas. Tant pis, il inhalerait la solution douteuse, ça lui remettrait certainement les idées en place.

 

Junior Gbeto est étudiant en 1 ère année à l’Université d’Abomey Calavi (UAC) où il se forme en administration culturelle.

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