Brève présentation de l’œuvre
Coordonné par Florent Couao-Zotti, » La petite fille des eaux » est une Initiative de l’Association « Le Scribe Noir » et écrit par dix auteurs béninois. Ce roman comporte dix chapitres à raison d’un chapitre par auteur. Le premier chapitre est écrit par Florent Couao-Zotti, le second par Agnès Adjaho, le troisième par Gisèle Hountondji. Le chapitre 4 est de Gniré Dafia ; le 5, de Hodonou Eglosseh et le 6, de Anita Mariano. Quant aux chapitres 7, 8, 9 et 10, ils sont respectivement de Mireille Ahoundoukpè, Venance Sinsin Mahougnon, Mahougnon Kakpo et enfin de Adélaide Fassinou. Cette œuvre, signalons-le tout de suite, est un cri de cœur des auteurs qui l’ont réalisée, face à un lancinant et déshumanisant phénomène bien connu chez nous : le phénomène de « Vidomégon ». Ils prennent la plume pour sensibiliser l’opinion publique nationale et internationale sur ce mal, car à vrai dire, ils sont, chaque année, des milliers d’âmes innocentes à être victimes dans le monde de la traite et maltraitance des enfants.
Résumé
« La chicotte à deux langues, enduite d’une épaisse couche de piment, s’est abattue sur moi. J’ai senti une brûlure sur mon dos, mes pieds ont tangué et ont menacé de tomber… ». C’est sur ses propos de Sité, narratrice et héroïne de ce roman que commence l’histoire. Nous sommes à Calavi. La petite Sité est régulièrement battue par sa tutrice, la méchantissime Ma Sika. Un jour, elle l’accuse d’avoir volé de l’argent. La population, témoin des faits quotidiens de cette maltraitance sauvage, sauve la fille des griffes de cette dame et va porter plainte à la brigade de protection des mineurs. Mais Daavi, une tante éloignée, la récupère et promet de prendre soin d’elle. Une fois à la maison, elle la vend à 100.000f cfa à une de ses amies qui est spécialiste de la traite des enfants. Pour que Sité ne se rende pas compte de la tragédie qui se prépare à s’abattre sur elle, on lui donne un somnifère. C’est sur le bateau Etinéro en destination du Gabon qu’elle se réveille et réalise qu’elle est entassée avec d’autres enfants dans des conditions inhumaines. Un repas mal cuit et insuffisant par jour leur est servi, et ceux qui ne supportent pas, sont simplement et purement jetés à l’eau. La traversée est longue, mais une fois à Libreville, malgré la tentative de corruption, la police maritime demande le retour immédiat du bateau. L’affaire s’ébruite et la presse s’en mêle. Bientôt, la terre entière apprend l’histoire : de millions d’enfants embarqués pour l’esclavage. Aucune côte ne veut recevoir le bateau. Finalement il accoste au port de Port Hacourt au Nigéria. Les enfants pensent être délivrés, mais un autre calvaire les attend là. Sité, ne doit son salut qu’à son frère Médé (et quelques amis dans la même situation qu’eux), qu’elle croyait mort au Gabon depuis des lustres, les ayant quittés trop tôt au Bénin. Ils réussissent à s’enfuir et alertent la police. Cette dernière mène son enquête. Tous les trafiquants sont arrêtés.
Trois points retiennent notre attention, après la lecture de ce livre : la désacralisation de la vie humaine, les freins au développent de l’Afrique, et la victoire du bien sur le mal.
La désacralisation de la vie humaine
Dans le livre, les enfants sont utilisés comme des animaux, ils n’ont aucun droit. Ils sont coupés de leur famille et subissent les pires humiliations. Il est aisé de lire derrière ces traitements, la volonté manifeste de violer en ces âmes innocentes et sans défense, la dignité humaine. Ici, la cruauté des adultes, cupides et exécrables, est d’une ampleur telle que la valeur de la vie est sacrifiée sur l’autel des biens matériels. Or il est dit que la vie est sacrée et que nul n’a le droit de la bafouer. L’argent ne saurait avoir le dernier mot dans notre vie. Partout où la vie est torpillée, la prospérité rampe.
Les freins au développent de l’Afrique
L’enfant est une richesse, et l’avenir de l’humanité. Le sacrifier aujourd’hui, signifie hypothéquer dangereusement l’avenir. Les pratiques de maltraitance des enfants en Afrique, esclavage des temps modernes, constitue une grande plaie pour ce continent. Le mal est d’autant plus cuisant que celles des autorités censées protéger les enfants, collaborent malheureusement à leur perte. Mais quand nous aurons fini de vendre tous nos enfants, qui fera notre développement? Si nous éliminons aujourd’hui la couche infantile, qui assurera notre relève? Bien de parents pauvres pensent assurer l’éducation de leurs enfants en les plaçant chez des oncles ou tantes. Les conséquences sont là, tragiques. Tant que c’est possible, il serait bien que les enfants grandissent au sein de leur famille, sous la protection de leurs parents. Si les parents deviennent des prédateurs pour leurs propres enfants, on ne peut rien espérer pour l’avenir. Mais ce qui est davantage intéressant dans cette œuvre, c’est de voir les auteurs, au fil du récit, faire émerger le personnage principal des ténèbres à la lumière.
La victoire du bien sur le mal
Le nom de l’héroïne est assez significatif : Sité qui se traduit en fon et en mina par « lève-toi, tiens-toi debout ». Ce nom résume tout le livre. Malgré les tempêtes, le bien a triomphé du mal. Cette œuvre pleine d’espérance et d’optimisme s’offre à nous comme la conviction que se font les auteurs que tout finit toujours par s’arranger. Ecrivains, ils sont allumeurs de joie, quand bien même ils dénoncent le mal de leur temps et de leur peuple. Ce réalisme nous fait comprendre qu’à travers le personnage de Situ, ce sont tous les enfants d’Afrique et du monde, victimes de la traite, qui se tiennent debout, en dépit des atrocités vécues. Sité, c’est le porte-flambeau de tous ses enfants abandonnés et maltraités de par le monde. Son courage et sa détermination est un exemple à suivre pour ces milliers d’enfants. A travers elle, ils se tiennent debout pour apporter leur part à la construction de l’humanité. Malgré tous les coups reçus, psychologiquement ou physiquement, Situ n’a jamais abandonné. Elle a cru que son étoile se lèvera et brillera.
Il est facile de situer ce roman à cause de certaines réalités du livre, notamment les interférences linguistiques utilisées par les auteurs qui nous renvoient directement au sud du Bénin. Des mots comme Fovo, ablo, adokoun-gbinou, Daavi, Dada… sont fréquemment employés.
L’enfant est un don de Dieu, un innocent à chérir et à aimer. Victor Hugo disait d’ailleurs que « Lorsque l’enfant paraît, le cercle de famille applaudit à grands cris ». C‘est dire combien de fois l’homme doit être heureux de l’arrivée de ses anges. Malheureusement, ils sont nombreux, ces soit disant défenseurs des droits de l’enfant qui non seulement les foulent au pied, mais aussi s’enrichissent au dos de ces enfants. Le monde entier doit prendre conscience de ce mal et prendre les taureaux par les cornes afin que plus jamais, on assiste à de pareilles situations et que les enfants se sentent en sécurité.
Kouassi Claude OBOE
Cela fait plaisir de voir des plumes se mettre ensemble pour un roman collectif. Cela honore les Lettres chez nous. Que ce roman soit « médité » et que l’enfant soit toujours roi.
Amen et que cela inspire aussi d’autres auteurs.
Belle initiative avec un sujet plaisant, sans compter que le résumé est déjà émouvant. J’ai vraiment hâte de le lire. Bien à vous.
Merci beaucoup pour votre passage sur le blog. Le livre doit être dans les bibliothèques, et après lecture, venez partager avec nous vos impressions et sentiments.
Merci Corine-Baptiste, d’avoir fait un tour sur votre blog. C’est une oeuvre commune qui nous engage, vous et nous. Merci de continuer d’être des nôtres.
Je sens toujours cette rumeur joyeuse et admirative devant tout trésor. Puisse-t-elle entretenir cette flamme livresque en nous.