INTERVIEW AVEC SOPHIE ADONON

INTERVIEW AVEC SOPHIE ADONON

BL : Bonjour Madame Sophie ADONON. Nous sommes honorés de vous recevoir sur notre blog. Nos amis lecteurs seront bien heureux de savoir qui se cache derrière ce nom dont la portée historique nous renvoie certainement au plateau d’Abomey.

S.A : Bonjour chers amis lecteurs, chères amies lectrices, grand est mon plaisir de pouvoir me livrer à cette interview à Biscottes Littéraires.

ADONON, un nom qui résonne comme  » nos racines ».  Racines partant d’Adja-Tado pour atterrir à Abomey.

Oui, je suis Sophie Adonon, Princesse d’Abomey, « Nan Agbomè-ton »,  de la lignée directe du roi Aho Houégbadja. Celui-là même qui a fondé le puissant royaume de Danhomè en 1645.

En effet, mon ancêtre Bokodaho,  le benjamin des huit enfants qu’ont eu le roi Houégbadja et son épouse Adonon.

Parmi ces enfants, pour ceux qui connaissent l’histoire du Bénin, trois ont dirigé le royaume de Danhomè. Il s’agit du roi Akaba ainsi que de  sa sœur jumelle, la reine Hangbé et du roi Agadja, le Conquérant.

La branche de Bokodaho, le dernier fils de la fratrie  n’a pas été négligée puisque c’est chez ses descendants, au quartier Tchêlly à Abomey  que les rois intronisés obtenaient leur légitimité  à  «Adjalala-sa, le palais » par  le rite final du  »chaussement  » qui parachevait leur investiture. D’où le nom Tchêlly  » é non li atchê nou Dada », on ancre le pouvoir du roi dans son royaume  «en le chaussant des Sandales du roi Houégbadja. Sans cette cérémonie  finale, le roi choisi n’est pas légitime. Le monarque Guézo consacre et lègue personnellement Tchêlly  aux héritiers de Bokodaho jusqu’à ce jour.

Quant à ma Maman Tokpo Bernadette, elle est de la lignée du roi Agonglo. Précisément de son fils Adjéhounon-Assogba (qui se faisait appeler  au XVIIIè siècle Azéhounou à cause  de sa puissance en magie noire).

 

BL : Comment se fait-il que vous portiez le nom de votre grand-mère ADONON au lieu de HOUEGBADJA? Abomey est-il régi par un système matriarcal?

S.A : Je porte le nom ADONON, au lieu de Houégbadja en raison du rite «Agbassa- Fâ  ». C’est une cérémonie chez les Fons qui consiste à découvrir  l’ancêtre duquel l’enfant né dans la famille est la réincarnation. Le défunt réincarné s’appelle Djoto. On le considère comme l’esprit protecteur de l’enfant. Lorsque le  , l’oracle, détermine que le nourrisson est la réincarnation de Nanyé ADONON (devenue une divinité dès  de son départ pour l’au-delà), plus tard, cette personne peut décider de donner comme patronyme, «ADONON », son Djoto, à ses propres descendants. Tel est mon cas.

Mon arrière-grand-père Adonon-Noudinminwou, dit Yovogan, (il était un Yovogan royal, c’est-à-dire Secrétaire d’État chargé des relations avec les Blancs) a attribué «ADONON  » à ses descendants à partir de mon grand-père, Adonon Alphonse-Adjassin. Ainsi en est-il également des «Adonon » de Bohicon et de Samè qui descendent  de Houadanou- Adonon Mindjomin-mangnin-yaya, fils du roi Guézo, descendant de Houégbadja et de Nanyé Adonon (donc d’Agadja, fils de Houégbadja et Nanyé Adonon) par le truchement de Agbassa-Fâ.

En un mot, je suis le fruit de la Culture endogène, pur jus !

BL : Vos débuts en écriture, comment étaient-ils?

S.A : J’ai commencé à écrire très tôt, mais je ne conservais pas mes écrits, jusqu’en 1992, où je me suis mise à les garder sans savoir que ce loisir valait quelque chose. J’ai écrit «Pour une poignée de gombos » en 1992 et il a été publié en 2013 !

Écrire  pour moi est une seconde nature, une transcendance. À chaque nouvelle création, je suis remplie d’excitation, d’une joie indicible. C’est du bonheur tout simplement de m’inventer un monde où je vis temporairement en compagnie de mes personnages avec lesquels je partage des émotions. Certains me font rire, d’autres me soutirent des larmes…

BL : Etant de race princière, et même de sang d’amazones, l’armée vous conviendrait certainement mieux. Pourquoi avoir alors opté pour le droit?

S.A : Vous avez parfaitement raison. Figurez-vous que feu mon papa, Frédéric ADONON était Administrateur-Colonel des Douanes ; mon grand-père (ancien combattant) était policier et mon arrière-père Adonon Noudin-Minwou dit Yovogan fut «Chef des Blancs », l’équivalent de Secrétaire d’État aux Affaires étrangères, spécifiquement avec les Blancs venus de l’Occident. L’ordre et la discipline ont toujours été le maître-mot de mes ascendants. Le droit en est une ramification.

BL : Du Bénin à la France, le parcours n’a certainement pas été facile. Quels souvenirs en gardez-vous?

S.A : Du Bénin à la France, tout a été au contraire facile du point de vue matériel, étant donné que je suis issue d’une classe très aisée du Bénin grâce à Papa. Le plus difficile pour moi a été de m’habituer à la vie en France dans la mesure où ce n’était pas tout à fait ce à quoi je m’attendais. Mais, j’ai appris à aimer ce pays, mon pays d’adoption. Le Bénin est en moi et la nostalgie ne me quitte jamais. J’ai deux pays : Le Bénin, qui est mon père et la France, ma mère, malgré l’hiver que je ne supporte pas.

BL : Vous arrive-t-il de vous sentir par moment dans la peau de Samba Diallo ou d’épouser les sentiments de la Grande Royale (Cf. L’aventure ambiguë)?

S.A : Loin de moi les questions existentielles raciales, cultuelles relatives au choc culturel de Samba Diallo.

Pour ma part, je tends plutôt vers Blaise Diagne. Sénégalais, il est le premier représentant africain élu en 1914 à la Chambre des députés française. Cet homme politique est un fervent assimilationniste !

Ma vie en France ne m’a pas déracinée. Mes deux cultures cohabitent parfaitement en moi sans me dénaturer. En un mot, la Grande Royale n’a pas déprécié mon héritage initial, ma souche.

J’ai réussi ce tour de force qui consiste à me sentir bien dans mes deux pays.

Cependant, il y a un bémol, obstacle infranchissable à chacune de mes patries : au Bénin, c’est la sorcellerie ; en France, c’est le racisme.

BL : Pensez-vous, comme Aimé Césaire, que c’est un malheur pour l’Afrique d’avoir rencontré sur son chemin cette France-là?

S.A : Si l’on se situe à une certaine époque, la réponse est positive. Mais, les temps ont changé, et les mentalités également. Aujourd’hui, nos autorités africaines ont quasiment les coudées franches pour négocier certains accords qui puissent faciliter la vie des Africains. La balle n’est plus dans un seul camp. Il appartient à nos dirigeants africains d’imposer une certaine fermeté vis-vis de leurs interlocuteurs occidentaux afin que chacun y trouve son compte. Ils doivent traiter avec les Européens d’égal à égal pour ne pas être lésés. Exit, le profit personnel, vive l’intérêt national ! Une fois que ce slogan sera totalement  assimilé par certains chefs d’État, l’Afrique sera sauvée…

BL : Ticken Jah FAKOLY, dans l’un de ses chants, disait, en s’adressant à l’Europe: «Ouvrez les frontières ». Pensez-vous que le salut de l’Afrique passe nécessairement par l’immigration?

S.A : Oh non, l’immigration n’est plus du tout une solution. Je dirais plutôt que l’immigration transforme l’Afrique en un sablier percé qui se vide de ses populations  valides qui viennent pour la plupart, végéter en Europe. Quand j’observe à la télévision, en ce qui est de l’immigration illégale, ces personnes noyées par centaines, voire des vivants qui ont l’air déjà morts, j’en pleure pour mon continent et je m’inflige cette réflexion : Autrefois, pendant plusieurs siècles, les négriers arrachaient de force les africains à leur continent pour les conduire vers l’Europe, les Amériques. Aujourd’hui, d’autres Africains sont prêts à mourir pour regagner l’Occident à bord d’embarcations de fortune. La rivière coulerait-elle à l’envers ? Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné chez nous ? J’ai mal devant ces scènes dramatiques.

BL : L’actualité est de plus en plus consacrée au débat relatif au CFA. Quelle est la position de l’écrivaine que vous êtes sur cette question?

S.A : J’ai en effet observé une certaine effervescence sur les réseaux sociaux et médias ces temps-ci à propos du franc CFA. Aucun Africain, à moins d’être sans culture n’est non-panafricaniste.  Nous sommes tous panafricanistes, en tant qu’Africains.  Mais, nous ne sommes pas tous des économistes.

Sur ce, je ne traite pas d’un sujet que je ne maîtrise pas…

BL : Plus de cinquante ans après, l’esprit de Frantz Fanon semble encore planer sur le monde noir, à travers la grande problématique de l’identité culturelle de l’homme noire : Peau noire, masques blancs. A quand la fin de cette névrose?

S.A : Comme je le disais plus haut, le racisme est endémique partout. Le refus de l’autre n’a pas disparu depuis Frantz Fanon. Seulement, c’est davantage réprimé en France par des textes de loi.

Aujourd’hui, le Noir  est parvenu à faire admettre à ses oppresseurs  qu’il est sur le même pied d’égalité qu’eux sur cette planète. Nul ne peut plus lui mettre dans la tête le complexe d’infériorité en raison de son tissu épithélial. La fierté du Peuple noir est définitivement acquise. Dieu merci !

Le racisme anti-noir comme le racisme anti-blanc doivent être combattus. Le racisme doit être combattu sous toutes ses formes, d’où qu’il vienne. C’est une lutte sans fin, à mon avis.

BL : Vous êtes la première écrivaine béninoise dont l’œuvre soit étudiée dans les lycées et collèges de notre pays. Quels sentiments cela vous inspire-t-il?

S.A : Un honneur formidable ! Cela fait deux fois que le Bénin m’immortalise. Au premier abord, j’ai reçu une immortalité en 2012 lorsque mon pays natal a donné un extrait de mon ouvrage  » Le Sourire macabre » comme épreuve de français au brevet national. Ce faisant,  dans toutes les annales du BEPC du monde pour l’éternité, figurera cette référence à mon nom.

Puis, voilà qu’une nouvelle reconnaissance rêvée par tout auteur vivant m’encense avec la mise au programme de  »Pour une poignée de gombos » depuis la rentrée 2016, dans toutes les Secondes. Je serai pour toujours, la première femme béninoise dont l’ouvrage est étudié dans les collèges et lycées au Bénin. C’est inouï et je  cherche encore  un mot plus fort que merci, à l’attention de mon Bénin que j’adore. C’est une belle responsabilité qui m’honore et que j’ai l’obligation d’honorer en retour.

Merci à tous ceux qui ont pu déceler les qualités littéraires de ce roman qui exsude le Bénin.

BL : Et justement au sujet de l’œuvre au programme « Pour une poignée de gombo », quel regard le lecteur doit-il porter sur le dernier chapitre? Etes-vous dans une dynamique de revendication ou de réappropriation des dieux africains? Si oui, l’Occident les a-t-il à un moment donné expropriés?S.A : Le dernier chapitre de «Pour une poignée de gombos » est la démonstration flagrante du monothéisme au Bénin, bien avant l’arrivée des colons, avec Mahou Gbèdoto , le Dieu unique.

Un Dieu adoré à travers les quatre Éléments : Air, Eau, Feu, Terre :  Dan, Mami-wata, Hêviosso et Sakpata. Ces dieux correspondent aux quatre Archanges du monothéisme exogène que sont : Archange Saint-Gabriel (Air), Archange  Saint-Uriel (Eau), Archange Saint-Michel  (Feu ou tonnerre) et Archange Saint-Raphaël (Terre). L’Occident en se livrant au prosélytisme n’a fait que  modifier l’approche à Dieu en amenant Jésus-Christ, son Fils  qui s’est fait chair pour faciliter la communion avec l’Être suprême unique… Le christianisme n’a jamais pu exproprier les Africains de cette organisation cultuelle  sous forme de fétichisme ; fétichisme toujours ambiant. Ceux qui se sont convertis à la  chrétienté pratiquent  pour la plupart le syncrétisme. Le chapitre XIV de l’ouvrage n’est pas une réappropriation des dieux africains, mais une évidence de leur constance souvent négligée.  Oncques  cette structure confessionnelle ne s’est  interrompue. Elle coexiste au côté du christianisme à l’arrivée des colons et ultérieurement.

À l’époque contemporaine, le vaudou, indépendamment le caractère religieux est devenu un patrimoine culturel inhérent à notre authenticité.

BL : Finalement, au-delà de l’idylle dont il y est question, «Pour une poignée de gombo » est une œuvre de contestation… Quel rôle lui assignez-vous, vous-même?

S.A : Loin d’un ouvrage à polémiques, «Pour une poignée de gombos » est une apologie de nos richesses culturelles du point du vue culinaire, cultuel…  Et avant tout, le livre informe sur le caractère hors norme du Bénin qui est un pays protégé des dieux, un endroit spécial où tout n’est pas permis. Ceux qui commettent des monstruosités en cachette, pensant   »pas vu, pas pris » se trompent. Ils finiront fatalement par le payer un jour. Tel est le cas du personnage de Régisette qui a rendu des  comptes au surnaturel vingt-cinq ans après son forfait, en payant le prix fort.

Au passage, j’ai mis «s » à gombos dans le titre par analogie, à «Pour une poignée d’épinards » ou «Pour une poignée de dollars ». Le titre s’écrit bien «Pour une poignée de gombos ».

BL : Etes-vous influencée par la figure de vos aïeules les amazones dans la création de vos intrigues et de vos personnages?

S.A : Je viens de quelque part. Alors, nous sommes forcément influencés par notre culture de base. Je ne le fais pas sciemment en créant mes personnages. Cela y transparaît naturellement  en filigrane.

BL : Le féminisme fait-il partie des thèmes que vous abordez souvent dans vos ouvrages?

 S.A : Cela s’est produit principalement dans deux de mes ouvrages :

D’une part, à travers «Assouka » : ma pièce de théâtre en alexandrins est consacrée à l’émancipation des filles au Bénin, l’importance de les instruire et l’obligation pour l’État d’appliquer la parité entre ses fils et filles devant l’égalité des chances.

D’autre part, dans l’essai dédié à la reine Hangbé dans «Monarque Hangbé, panégyrique d’une Reine biffée ». En vente à la librairie Notre-Dame de Cotonou !

 

BL : Vous vous intéressez aussi au roman policier. Est-ce un hommage à votre feu-père?

S.A : Ma vraie passion, c’est l’écriture du roman policier. J’ai créé une série policière, avec un commissaire béninois qui enquête au Bénin. Le commissaire Lionel Aza est atypique et il prend carrément le contre-pied d’une Afrique pauvre où règnent la faim et les guerres… Aza a résolu pour l’heure quatre enquêtes dans «Le Sourire macabre », «Le Plat qui se mange froid », «Cœur insomniaque » et «Parole d’immondices ».

D’autres intrigues sont déjà écrites, mais pas encore publiées.

Je rectifie juste que c’est mon grand-père qui était policier. Mon défunt père était Administrateur-Colonel des Douanes.

BL : Etre femme aujourd’hui à l’ère du gender, qu’est-ce que cela implique pour les traditions africaines ou précisément la culture fon que vous connaissez bien?

S.A : IL n’y a plus de domaine réservé à l’un ou l’autre genre dans le cadre professionnel. Les femmes occupent des rôles traditionnellement réservés aux mâles et vice-versa, notamment en Occident.  Néanmoins, dans la culture fon, la tradition ne permet pas encore cette égalité homme-femme. Jusqu’à ce jour, le trône du Musée d’Abomey par exemple, est indéfiniment occupé par un homme. Et depuis la création du royaume au XVII è siècle, seule Hangbé l’a dirigé pendant trois ans, de 1708 à 1711. Ce fut terrible pour elle. Rien n’a été effectué pour son investiture, sans compter les collusions diverses qui  l’ont poussée à abdiquer tragiquement au profit de son jeune frère Agadja. Cf  «Monarque Hangbé, panégyrique d’une Reine biffée ».

Non, le gender ne se pratique pas encore partout. En France, nombreuses associations se sont insurgées pour que la théorie du genre ne soit pas introduite dans les écoles car le désordre mental  chez les enfants en aurait été ingérable. Le gender est sorti du cercle de mixité de carrières où les deux sexes pourraient prétendre aux métiers semblables  pour dévier vers «les garçons vont jouer à la poupée et porter des jupes », etc. Il y avait de  sérieux  malaises qui s’annonçaient, surtout pour nous, parents d’élèves. Fort heureusement, les décideurs y ont mis un frein à temps, avec le départ du gouvernement Hollande et sa ministre qui a voulu chambouler le système éducatif français, un dénivellement par le bas. Souvenez-vous de sa volonté de supprimer les accents circonflexes, les traits d’union, entre autres !

BL : Nous sommes à l’ère des TICS et de la Mondialisation. Comment l’écrivaine que vous êtes se positionne-t-elle aux confluents de ces courants qui ne laissent plus personne indifférent?

S.A : Les TICS, j’en suis dépendante comme nombre de mes congénères. Je ne crois pas qu’il y ait un jour où je puisse me passer d’internet, de portable et consorts.

J’ai à cœur que la plupart de nos compatriotes en soient dotés. Tous ces outils deviennent de nos jours indispensables pour le développement d’une nation.

BL : Quel regard le monde porte-t-il sur une femme qui écrit?

S.A : Je ne crois pas qu’au XXI è siècle, la femme qui  écrit soit perçue comme un phénomène, une extra-terrestre.  C’est admis que les femmes écrivains fassent partie du décor scriptural.  Nous ne sommes plus à l’ère de  Marie-Madeleine de la Fayette ou celle de Gorge Sand.

BL : Hasard ou superstition? Vous nous direz. La première femme béninoise à s’illustrer comme musicienne porte le prénom de Sophie. La première à avoir son œuvre inscrite au programme porte le même prénom. Qu’est-ce que cela vous inspire?

S.A : Certainement que ce prénom Sophie nous  prédestine à grande destinée. Sophie Edia a bercé mon enfance. Je l’ai vue à la maison pour la première fois en 1975, avant de la voir en concert à l’anciennement   Hall des Sports. Elle m’a agréablement marquée. Mais avant elle, une autre Sophie a bouleversé l’histoire du royaume de Danhomè, puisqu’elle est la première Métisse à épouser trois   rois d’Abomey, Kpingla, Agonglo et Adandozan. Je veux nommer celle qui a inspiré mon prénom à mon papa : Sophie Mutatum.

Petite piqûre de rappel :

Métisse, Sophie est née  vers 1755 d’un officier hollandais, agent du Fort anglais et d’une indigène Aboméenne, Avléssi Mèdélè.

Elle fut dans un premier temps, l’épouse de Joseph Ollivier de Montaguère (un Français) à qui elle a donné Nicolas Ollivier de Montaguère et Jean-Baptiste Ollivier de Montaguère.

Au décès prématuré de Joseph en France, Sophie devient la femme du roi Kpingla à qui elle était confiée par son mari pendant son séjour en France.

Kpingla et Sophie ont un garçon du nom de Agbakossi.

Ce garçon après la mort du roi Kpingla en 1789 alors qu’il n’était qu’un nourrisson, fut élevé à Ouidah, par la famille d’Oliveira, c’est-à- dire par son grand-frère (utérin)  Nicolas Ollivier de Montaguère, fils de Sophie et de Joseph Ollivier de Montaguère que les Portugais nomma d’Oliveira (Nicolas est l’ancêtre des d’Oliveira du Bénin qui sont en fait Ollivier de Montaguère) .

Agbakossi vit à Ouidah et y est enterré  à sa mort.

Ensuite, Sophie de Montaguère alors âgée de 34 ans à la mort de Kpingla devient l’épouse du roi Agonglo, fils et successeur de Kpingla selon  la pratique chez les Fons, appelée  ‘’tokou nou visso, le père meurt pour que le fils prenne’’. Ils ont un fils du nom de Ahokpè.

Il se dit que le roi Agonglo aurait été assassiné pour avoir voulu se convertir au catholicisme comme son épouse secondaire, Sophie (sic Aimé Césaire, Barthélémy Adoukonou, prêtre catholique Béninois, secrétaire du Conseil pontifical pour la Culture).

À la mort du roi  Agonglo en 1797, Sophie avait 42 ans, Adandozan en a 30 ans. Il se dit que Sophie devient la femme du roi Adandozan . Ils ont un fils du nom de Houégbèlo. Les Panafricanistes parlent du mariage d’Adandozan avec une Européenne. Il s’agit en réalité de Sophie Mutatum, une Métisse,considérée comme  Yovo. Le mot Yovo qui désigne également un Blanc ou une Blanche. L’amalgue entre Yovo et Métis généralement faite en Afrique, notamment à cette époque-là.

Qu’est devenu cet enfant à la destitution d’Adandozan ? Est-il l’aïeul  des Houégbèlo d’Abomey ? Je n’ai pas encore réussi à résoudre à ce mystère.

La Métisse Sophie a bouleversé le royaume de Danhomè. Son arrière-petite-fille Chica (Francisca)  a épousé religieusement (à l’Église donc) le roi Guézo…

À sa mort à 80 ans, Sophie fut enterrée à Gbècon (Abomey) sur le terrain offert  par le roi Agonglo à leur fils commun, Ahokpè. Sa tombe est très simple : rectangle de terre battue, bordée de deux murettes.

Passionnante histoire que je raconterai intégralement peut-être un jour.

BL : Vous avez certainement des projets…

S.A : Un grand projet se rapportant à mon livre  » Pour une poignée de gombos  » est en cours. En effet,  ce roman sera adapté au cinéma, en long métrage au Bénin. Vous en aurez entendu parler très bientôt.

Ensuite, j’ai une parution en vue pour la fin de l’année 2017, en France.

BL : Qu’est-ce qui vous plaît le plus, quand vous considérez la littérature béninoise aujourd’hui? Et qu’est-ce que vous regrettez le plus?…

S.A : L’engouement des Béninois pour la littérature ne se dément pas. C’est merveilleux ! Toutefois, je déplore la baisse de niveau des élèves en français. Je reconnais que cela n’est pas propre au Bénin. C’est un constat général, y compris en France.

BL : Votre mot de fin

S.A : Je vous remercie de m’avoir accordé cette tribune. Mon ouvrage  »Assouka » est en lice pour le concours national «Prix Président de la République 2017  ». Je suis la seule femme des treize auteurs sélectionnés. Je stresse et j’aimerais une union de prières.

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