Titre: « Colorant Félix »
Auteur: Destin AKPO
Editions Savanes du Continent, Août 2021, 247 pages
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Se moquer de la vie, la couvrir de railleries, se gausser de ses mœurs qui s’édulcorent au jour le jour, dépeindre ses folies et ses bassesses à la guise d’une plume, telle fut la gageure de Destin AKPO qui porte légitimement la paternité littéraire du roman Colorant Félix. Fin et méticuleux observateur du monde contemporain, Destin s’est donné le défi de refléter avec réalisme et crudité les mœurs, les craintes et les espoirs d’un monde qui perd le sens du Vrai, du Beau et du Bien, et qui courbe l’échine devant ses inventions, devant les désidératas de sa liberté et surtout avec l’avènement de la crise sanitaire mondiale ironiquement désignée Coovi does not ou encore Colorant Félix.
Le roman situe l’action sous le gros arbre à palabres de Kpétékpa qui s’embaume d’ordinaire de l’effusion sotonique et où se réunissent les sages pour deviser sur l’actualité et discuter de la trajectoire de l’histoire des hommes. Informés de l’irruption soudaine d’un certain colorant Félix issus des bourgs des Sinois et qui soumet toute l’humanité à la dure épreuve de l’hécatombe, les sages de Kpétékpa, menés sous la houlette du vieillard clairvoyant Somahuhweviɖotɔmɛ, y voient, en dépit des causes scientifiques et la guerre boologique énumérées par le fils de Zankpiti, les conséquences fâcheuses de la dépravation des mœurs dont les hommes pourtant dotés de raison se rendent coupables. Ce Coovidoes not est sans doute une étincelle purgative jaillie des relents de courroux qui embrasent Dada Sεgbo déçu, voire outragé par les délires de ses propres créatures décidés à s’émanciper de Lui. « Ce colorant Félix le fruit des mauvais comportements des hommes[1] ». Ironie du sort ! Pendant que les grandes puissances, les Sinois et les Amélékins en l’occurrence, s’inclinent devant ce virus vraisemblablement créé à dessein pour réguler la population mondiale et décimer la couche sénile, le virus ne réussit pas à anéantir la population tropicale contrairement au pire présagé par les Nation Unies pour l’Afrique.
Délayant ces sujets aussi graves que sensibles dans une dose d’humour noir, la gorge rafraîchie par l’eau-de-vie, sève spiritueuse extraite du palmier, les savants de Kpétékpa montrent à la face du monde que seuls la solidarité et l’inconditionnel retour aux valeurs traditionnelles peuvent sauver le monde et modifier sa tragique trajectoire vers le néant.
Littéraire averti et instruit de la maxime du Castigat ridendo mores[2], Destin AKPO prête vie et voix à des personnages ivrognes mais lucides sur des questions sensibles de notre temps. Leur adresse et la profondeur abyssale de leur science proverbiale nous dessillent les yeux et sonnent le tocsin des bassesses outrageuses de notre temps.
Ismaël Noël Gilles GANDONOU, Grand Séminaire Saint Paul du Djimé !
[1] D. AKPO, Colorant Félix, Editions Savanes du Continent, P. 245
[2]Expression latine pour signifier : On corrige les mœurs en riant.