Bonjour à vous, fidèles lecteurs et lectrices des Biscottes littéraires. Je vous retrouve aujourd’hui pour notre dernière chronique du mois de février. J’ai trouvé dans mon jardin livresque : « Jardins intimes » du romancier, nouvelliste et poète gabonais Hervé Ona Ndong, paru aux éditions Raponda Walker en 2002. Ensemble immergeons-nous dans le jardin de réminiscences de Sophie décrit dans « Jardins intimes ».
« Jardins intimes » se décline en plusieurs paysages et tableaux à travers le personnage de Sophie. Âgée d’une vingtaine d’années, elle nous laisse entrer dans les jardins des souvenirs de son enfance qui lui paraissent flous et incompréhensibles. Sophie souffre d’un mal-être, elle n’arrive pas à trouver la paix qu’elle recherche car quelque chose hante son présent : la quête perpétuelle de sa grand-mère. Elle n’a aucun souvenir d’elle à part une photo que lui avait remise un des amis de sa mère.
L’auteur nous fait voyager dans la quête de soi, quête du bonheur, entreprise par Sophie qui fouille dans les entrailles de son passé, ce passé qu’elle vit à travers sa mère qui lui raconte ces moments vécus auprès de cette femme qui vit désormais dans sa tête. Sa mémoire lui fait défaut car elle n’arrive pas à se remémorer celle qui hante sa vie, celle qui peuple ses pensées et envahit son espace. Quand elle en a eu l’occasion, elle décide de se rendre sur l’île où vit ou « vivait »sa grand-mère pour enlever ce voile qui masque sa vue. Sophie a grandi et a atteint l’âge de comprendre ce qu’elle ne pouvait pas comprendre autrefois. Elle peut désormais interpréter et comprendre le mutisme de sa mère. Mais elle était loin d’imaginer que sa grand-mère n’était plus sur l’île. Alors, elle va faire preuve de beaucoup de courage pour mener à bien ce combat personnel.
C’est avec énormément de plaisir que j’ai savouré ce récit parsemé de poésie. Dès le début du roman on s’attache à chaque phrase et moment car Hervé Ona Ndong capte littéralement le lecteur et le fait cheminer au plus près de son héroïne : Sophie. On y voyage dans chaque coin du jardin avec plusieurs figures de style qui viennent embellir ce roman. La métaphore obsédante et fidèle de l’auteur est la nature. Cette essence qui traverse l’écriture de ce texte. Chaque phrase nous transporte avec son parfum floral qui nous enivre à chaque breuvage de lecture. Avec une écriture calme et mélancolique, ce récit empli de poésie nous interroge sur la quête de soi, l’ailleurs, l’altérité, l’Amour, la découverte de soi, les relations familiales, la liberté.
« Jardins intimes » est un roman d’émancipation, de distanciation, de découverte empreint de sensualité et de délicatesse qui offre aussi un aperçu du rôle d’une mère à travers la transmission des valeurs culturelles. En effet, la mère de Sophie remplit son rôle : passeuse de culture. La plume mélancolique, d’ailleurs c’est ce qui a retenu mon attention. Comment peut-on traduire la sensualité de la nature avec beaucoup de tristesse ? Même la description des lieux ne traduit que le chagrin. Et on comprend très vite cette dévotion avec Sophie qui noie son mal-être dans la contemplation du sublime de la nature. « Jardins intimes » nous plonge dans le journal de Sophie de manière assez sereine. Cette partie du récit m’a certes déçue parce que j’adore les romans bouleversants, poignants, renversants, mais ce récit est assez original. Cette originalité se traduit par une écriture subtile, bien que l’auteur ne place pas son roman dans une atmosphère grave et troublante. Par ailleurs, j’ai lu ce récit comme un journal intime d’une adolescente, ressenti en même tant que Sophie, toutes ses diverses émotions, ses interrogations, ses désirs, ses doutes…Sophie est un personnage assez attachant, optimiste et altruiste.
Ce fut un réel plaisir de partager avec vous ces notes de lecture. J’ai eu l’occasion de vous faire découvrir des livres à ajouter à votre Pile à lire (PAL) pour plus d’aventures livresques. Ce fut vraiment pour moi un bonheur de vous avoir introduit quelque peu dans l’univers de la littérature gabonaise durant tout ce mois de février. Je vous remercie du fond du cœur pour votre attention. S’il nous reste quelque chose à faire, c’est encore de lire, lire toujours et partout, afin de cultiver notre jardin intellectuel et de faire fleurir chaque jour nos jardins intimes de toutes les sensations et émotions que seule la littérature sait procurer à ceux qui ne lui résistent pas.
L’orchidée Moulengui