1.  « Sur les Ailes du Temps » de  Mgr  Aristide Gonsallo : présentation de  Stephens AKPLOGAN, Ecrivain

A l’occasion de son cinquième anniversaire d’ordination épiscopale, Mgr Aristide GONSALLO a procédé au lancement, ce 18 décembre 2020, de son troisième ouvrage: « Sur les ailes du temps » , recueil de 52 poèmes présenté par Stephens AKPLOGAN. L’œuvre est parue aux Editions Plurielles et s’étend sur 91 pages.

20 cm sur 12, une centaine de pages et 350 grammes environ. Voici le livre qui nous réunit ici. Cependant, il vaut 52 kilogrammes de méditation. 52 occasions d’esseulement, de contemplation. 52 instants d’accaparement de la lumière. Car, Celui qui médite vit dans l’obscurité ; celui qui ne médite pas vit dans l’aveuglement. Nous n’avons que le choix du noir, dit Victor Hugo avec pessimisme.

Cependant, il n’a pas tort d’indexer l’aveuglement de celui qui ne médite pas. Celui qui médite, lui perçoit sur le fond noir qui borde son voyage dans l’entre-soi cette fine voix de l’esprit qui renseigne, explique, instruit.  C’est d’un exercice spirituel qu’il est question derrière toute création poétique. Et Nimrod, lauréat du Prix Apollinaire 2020, l’équivalent du Goncourt de la Poésie l’affirme autrement : Le poète contemple le ciel depuis la terre, puis le recompose en se délectant.

Nous célébrons dans cet opuscule, l’immersion de l’auteur Aristide Gonsallo dans cet entremêlement ordinairement multiple d’ombres épaisses, de silhouettes désargentées et d’éclats de lumière au bout desquels on conquiert la vie sur les décombres du tragique ou crée le beau avec des fragments du laid. Les différents poèmes sont des célébrations de la vie ou des adresses au respect de la vie. La proportion de sens dans cette musicalité mouvante assumée de mots renseigne sur le profil du poète.

Un ciel étoilé questionnant du bleu azur. C’est donc de texte chantant tour à tour la paix, l’espérance, la douceur, l’éternité, l’intemporalité ou la définissant qu’il s’agit. Voilà, Sur Les ailes du temps.  La poésie est un acte spirituel, éminemment spirituel et quand la qualité intrinsèque de l’auteur s’y mêle, ça ouvre à une espérance religieuse au moyen de saillis profanes. C’est à cela que nous sommes face dans ce recueil de 52 titres fragmentés en une dizaine de parties et préfacé par Monsieur Jean-Michel Abimbola, Ministre du Tourisme, de la Culture et des Arts. Le style versifié qui nous renvoie à l’écriture baudelairienne est ici exquis avec son verbe ardent. L’écriture de Monseigneur Aristide Gonsallo s’inscrit dans cette tradition qui remonte aux premiers siècles de notre ère.

 Au fil des jours, je suis de plus en plus convaincu que Monseigneur Aristide fait partie de la race de ces hommes qui appartiennent à deux mondes. Un de ces êtres qui par leur talent, refusent la scission profonde que le commun des mortels opère entre le sacré et le profane. Au lieu d’une scission, il crée l’intimité. Il sait aussi bien écouter l’inspiration de l’Esprit Saint que de se faire présent au murmure des muses. Il a l’intelligence de faire cohabiter le premier dans le doux voisinage des seconds. Il a le génie de faire une passerelle entre l’esthétique poétique et la mystique chrétienne. Et ce n’est que pour nous, pauvres ignorants du XXIe siècle que cela paraitrait étrange. Etrange qu’un évêque soit poète.  Aristide n’est pas un poète qui s’est trompé de vocation en se faisant homme d’Eglise. Monseigneur Gonsallo n’est pas un Ecclésiastique qui s’est perdu sur des chemins poétiques.

Monseigneur Aristide Augustin Gonsallo est plutôt le rappel vivant d’une vérité que nous avons tous perdue de vue. Il ne fait que perpétrer une tradition hélas perdue : celle des Pasteurs poètes, des évêques amants des Classiques Romains. Qui d’entre nous connait Commodien,  Sidoine Appolinaire, le Pape Gelase1er ? Qui sait que Saint Ambroise et Saint Hilaire de Poitiers étaient aussi poètes et que les hymnes de nos bréviaires et de nos liturgies sont le fruit de leur inspiration ?

Tous admiraient, lisaient et imitaient leurs modèles latins Virgile, Ovide, Horace, Juvénal, Sénèque et j’en passe.

Monseigneur Gonsallo ne fait qu’assurer cette tradition de ses illustres prédécesseurs dans l’épiscopat pour enrichir davantage un héritage et confirmer que la poésie, qu’elle soit religieuse ou profane, a pour source l’amour du Beau et Vrai que Dieu a semé dans le cœur de tout homme. et, lui au-delà des mots réalise une présence factuelle avec une poésie de sensibilisation comme le témoigne ce poème intitulé, Le Moustique :

Heureuse piqûre de ces vilains moustiques

Qui, hélas, nous réveille de lourdes torpeurs

Et insuffle en nous de la maladie de la peur,

Bercés au cri strident de leurs danses mystiques.

Douleur aussi vive que celle de la tique

Qui sort nos esprits vagabonds de leurs vapeurs,

Livrant nos faibles corps à l’insecte rappeur,

Au risque majeur de les rendre squelettiques.

Debout pour la propreté, corps et esprits sains !

Que disparaissent donc les eaux usées du bain.

Enfants, prenez soin de vos corps comme jadis.

 

Ah, jeunes, détruisez tout au stade larvaire.

Hommes, créez, soutenez les espaces verts.

Femmes, de vos milieux, faites un paradis.[1]

Ce n’est pas une poésie élitiste. En d’autres lieux, on dirait qu’il fait une poésie utilitaire. Sur les ailes du temps, que Monseigneur nous offre aujourd’hui se révèle comme un point de contact entre l’humain et le Divin au-delà de tout cloisonnement ou étroitesse d’esprit. Avec ce recueil de poèmes, c’est la littérature qui devient instrument d’évangélisation et chemin de rencontre entre les esprits qui aiment les Belles Lettres.

Stephens AKPLOGAN, Ecrivain.

[1] Mgr Aristide Gonsallo, Sur les ailes du temps, Ed. Plurielles, Cotonou, 2020, p. 48