Mon conte roule, vole, survole, et plane au-dessus d’une contrée. Celle rats géants. Au pays des rats géants, point de salut sans le précieux rite du trou sacré. Au pays des rats géants, des trous savamment creusés constituaient les habitats. Tous les trous étaient identiques. Une entrée circulaire et une sortie ovale. Tous les trous ne devaient avoir que deux sorties sauf celui du rat alpha. Personne ne savait de combien de sorties était fait ce trou. Tous les rats géants qui avaient essayé de creuser ce mystère avaient péri.

 

-Gnantépé!

–  Gnangonmin!

– Gnantépé !

– Gnangonmin!

Un jour, l’Alpha des rats géants fit appel à toute la communauté. Il était temps de sacrifier à la tradition. Le rite sacré du trou mystérieux sans lequel tous subiraient la colère des ancêtres.

 Gnantépé!

-Gnagonmin

Tenez-vous tranquille, il s’agissait d’un sacrifice déguisé qui consistait à envoyer au trou trois premiers nés de trois familles différentes de rats géants. Sacrifice déguisé car il était clair dans chaque tête que personne ne pourrait sortir vivant de ce trou aux multiples

Sorties inconnues, encore moins des bébés rats géants dépourvus de griffes. Le jour -j arriva.

Azanlô kpé! Azanlô kpé ooo… Azanlô kpé Vivou Aton lè, do do ô min. Aiii ooo aiii ooo azanlô kpé! ( voici le jour tant attendu, voici le jour tant attendu. Les trois bambins rats géants au fond du trou aiiii oooo aiiiiooo).

 -Gnantépé!

–  Gnangonmin!

– Gnantépé !

– Gnangonmin!

Azanlô kpé! Souffles coupés, regard hagards, grincements de dents. L’Alpha des rats géants lança : « Aux rats bien nés la terreur n’attend point la longueur ses griffes. Ne vous en faites pas, ils reviendront, je vous les ramènerai après le rituel expiatoire ». Surprenant n’est-ce pas? L’Alpha parlait comme leurs voisins humains qui font des promesses qu’ils ne tiennent jamais. Cette année encore l’Alpha promit de ramener les bébés rats sains et saufs. Mais tous savaient qu’il n’en ferait rien. Ils entrèrent dans le trou cependant.

– Gnantépé!

– Gnankomin!

Des jours et des nuits passèrent. Les rats géants, résignés, avaient décidé de passer à autre chose. Car comme d’habitude l’on ne vit pas le retour des bébés rats. Les parents des bébés rats commencèrent le deuil. Chants funèbres, lamentations, cris de désolation et de révolte devinrent leur lot quotidien :

– Ovi aton man sô dé. Ovi Aton ku. Nin minan blo gbon? Alpha ko lè tafu xwué ô loo. Avi ééé, avi ééé miman sô y’a vi ô (Trois enfants rats ne sont plus. Trois sont morts. Qu’allons-nous faire? L’Alpha nous a encore eut. Que ça fait mal. Mais ne pleurez plus)

Mais chose curieuse cette année-là, l’on ne vit pas non plus le retour de

l’Alpha. Gnantépé! Les uns supposèrent que la chose mystérieuse vivant dans le trou de l’Alpha les avait tous mangés y compris ce dernier. Les autres auguraient de la victoire des bébés rats. Tous rivalisaient d’imagination afin d’expliquer ce qui c’était passé. Soudain au jour 4 du mois des viandes séchées, les trois bébés rats géants sortirent de nulle part, sains et saufs. En effet, l’Alpha des rats géants avait tenté comme à son habitude de les manger. Ainsi il n’aurait plus à chasser pour s’offrir sa pitance pendant cette période où la chasse

était infructueuse. Mais les trois bébés rats savaient que l’union fait la force, et ils étaient des âmes bien nées. Ils se défendirent comme des grands. Le trou trembla. L’Alpha se braqua sur ses quatre pattes, sortit ses griffes meurtrières. Les trois rats formèrent un cercle autour de lui. En deux mouvements et demi l’Alpha bondit sur l’un de ses adversaires. Pendant qu’il l’empoignait de ses griffes, les deux autres sortirent chacun une aiguille empoisonnée, reçue de  leur parents et l’enfoncèrent dans le cou d’Alpha. C’est ainsi que s’éteignit la légende de l’Alpha rat géant mangeur de bébés rats géants.

Depuis ce temps, le sacrifice fut aboli de la contrée des rats géants et les humains prirent exemple sur leurs voisins en abolissant le sacrifice humain. Beaucoup réalisèrent que tant que les forces seront rassemblées et qu’on n’ira pas en rangs dispersés, on gagne toujours.

 

Adebayo ADJAHO

 

 

    • oui, vous avez raison, Christelle ABOTCHI. Ensemble, on est toujours plus forts