INTRODUCTION

La littérature africaine d’inspiration française a connu une multitude de productions littéraires depuis sa naissance dans les années 1920 avec Les trois volontés de Malick de Mapaté Diagne à nos jours. Mais ce n’est qu’à partir des années 70 que la plume féminine va faire son entrée dans l’univers de la littérature négro africaine d’expression française. C’est ainsi que nous avons eu le premier roman signé d’une femme : Une si longue lettre de la sénégalaise Mariama Bâ. A sa suite, plusieurs autres femmes vont faire leur entrée dans l’univers de la littérature. Parmi elles, figure en bonne place Evelyne Mpoudi N’golé avec ses deux romans. C’est donc l’un de ses romans, le second, « Petit Jo, enfant des rues », qui va faire objet d’étude dans le présent travail. Il s’agira pour nous de ressortir les différents aspects qui constituent la richesse de cette œuvre : les thèmes, la structure, le style, la portée, etc. après avoir parlé de la biobibliographie de l’auteure.

I– BIOBIBLIOGRAPHIE DE L’ŒUVRE

A– Biographie de l’auteure

Evelyne Mpoudi Ngollé, d’origine Mbo est née en 1953 à Yaoundé d’un père fonctionnaire. Elle a fréquenté l’école publique de Nkongsamba, le lycée de jeunes filles de Douala et les Universités de Yaoundé et de Bordeaux où elle a obtenu un doctorat de Lettres-Modernes. Evelyne Mpoudi Ngollé a d’abord été surveillante générale, censeur de lycée et inspectrice pédagogique de français avant d’être le proviseur du Lycée d’Elig-Essono qui compte plus de trois mille élèves. (1996). Elle vit depuis de nombreuses années à Yaoundé. En 2001, elle est devenue inspectrice générale de pédagogie chargée des lettres, des arts et des langues au ministère des enseignements du secondaire.

B– Bibliographie de l’auteure

Evelyne Mpoudi N’gollé est auteure de :

Sous la cendre, le feu, (roman) édition Harmattan, 1991

Petit Jo, enfant des rues, (roman) Hatier International et EDICEF 2009, collection

Littérafrique.

II– Résumé et structure du l’œuvre

A– Résumé

Ce roman relate l’histoire de Petit Jo, un enfant abandonné à l’âge de trois mois à l’entrée d’un hôpital mais qui est récupéré par le vieux Moussima qui l’a adopté en dépit du fait qu’il ne savait rien de ses origines. Par amour pour lui, Moussima l’envoya continuer ses études à Ndounguè-ville, à la mission protestante. Il y était interné quand son père adoptif mourut. Plus tard, ne pouvant pas passer le concours d’entrée en sixième faute d’acte de naissance, il se vit contraint de laisser les études. Alors qu’il n’avait que 12 ans, il partit pour Yaoundé où il devint portefaix au marché Nfoundi et dans les rues de la ville. Dans ce milieu, il a connu une multitude de péripéties et fit la connaissance de Essomba, Elé et Man qui pour une raison ou une autre se sont aussi retrouvés dans la rue. Ils ont joué un grand rôle dans l’amélioration des conditions de vie de Petit Jo. Il finira par trouver une maison, celle que lui a léguée sa grand-mère, son vrai acte de naissance, une photo et les identités de ses parents biologiques dans un colis que lui avait laissé la vieille Mbanba, sa grand-mère. Il devint menuisier puis fermier et ce fut le début d’une nouvelle vie dans l’opulence.

B– Structure de « Petit Jo, enfant des rues »

Cette œuvre est écrite en 13 chapitres titrés et s’étend sur 188 pages. Apres lecture, nous répartissons ces 13 chapitres en trois grandes parties qui constituent l’ossature du livre

– Première partie : l’enfance de Petit Jo : elle prend en compte les chapitres 2 et 3

– Deuxième partie : l’adolescence de Petit Jo : elle prend en compte les

chapitres 1, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12

– Troisième partie : Petit Jo a grandi : elle prend en compte essentiellement le chapitre 13 et un partie du chapitre 12.

III– Etude thématique et étude des personnages

A– Etude thématique

Dans son œuvre, Evelyne Mpoudi N’gollé a abordé une multitude de thèmes. Nous avons entre autres :

L’abandon : selon le dictionnaire français le Petit Robert, l’abandon est le « fait de renoncer à une chose, de laisser quelque chose ». C’est aussi l’action par lequel on renonce à un bien, à un droit, à une prétention juridique. L’abandon, dans l’œuvre se fait remarquer chez la plupart des enfants de la rue. Ceux-ci ayant soit été abandonnés – c’est le cas de Petit Jo (p14) –  ayant eux- mêmes abandonné leurs parents pour diverses raisons –le cas de Man (p.74), d’Elé et Essomba (p84).

L’irresponsabilité : elle est la qualité d’une personne qui ne répond pas de ses actes, qui n’aime pas réparer les dommages qu’il a causés. Les parents de Petit Jo l’on abandonné pour des raisons de voyage et l’on confié à une famille avec la promesse de leurs envoyer tout ce qu’il faudra pour s’occuper du bébé ; promesse qu’ils n’ont pas tenue, ce qui a contraint la famille d’accueil à délaisser Petit Jo. Essomba et Elé ont dû quitter la maison pour se retrouver dans la rue à cause de l’incapacité de leurs parents à nourrir les enfants qu’ils avaient déjà alors qu’ils continuaient cependant d’en faire.

La délinquance : cette une conduite caractérisée par des délits répétés, considéré surtout sous son aspect social. Elle se remarque dans l’œuvre chez Man qui bat sa mère alors que celle-ci cherchait à le corriger (pp.66-67). Aussi Man continue sa vie de délinquance avec de « petites rapines perpétrées dans les domiciles privés, vol de voitures, agressions de toutes sortes et même attaque à mains armés » (p.76).

Le hasard : de l’arabe az-zahr signifiant : jeu de dés, le hasard est une puissance considérée comme la cause d’événements fortuits ou inexplicables. La mère d’Elé qui a accepté d’ être la mère adoptive de Petit Jo se nommait Marie ; lequel prénom était le même que celui de sa vraie mère. Aussi se fait-il que le père de Man est le vrai père du fils d’Adèle, avec qui son fils Man pensait se marier.

D’autres thèmes ont aussi été abordés par l’auteure à savoir : les droits et devoirs de l’enfant, la mort ; l’aventure ; la polygamie.

B– Etude des personnages

Personnages principaux

Ø Petit Jo : Bébé, il fut retrouvé par Moussima qui le nomma Dupita Joseph avant que son vrai acte de naissance qu’il ne trouva qu’à la fin de l’œuvre lui révèle que ses vrais parents l’avaient nommé Nkem Julius. Il est le héros de l’œuvre et le prototype des enfants qui, abandonnés par leurs parents, se retrouvent dans ma rue.

Ø Alain Sango alias Man : il est un jeune homme, fils unique qui, au début, gâté par sa mère, abandonna ses études et ses parents pour aller vivre sa liberté dans la rue où il fit partie d’une bande de voyous qui volait et braquait les gens. Il deviendra ami avec Petit jo qui le convaincra de retourner chez ses parents, abandonnant ses activités malsaines. Il incarne dans l’œuvre l’exemple des fils uniques qui, trop choyés par leurs parents deviennent des cas sociaux.

Ø Moussima : vieux célibataire sans enfant appelé affectueusement « père », il est celui qui retrouva Petit Jo et l’éleva jusqu’à sa mort qui survint quand Petit jo avait 8ans.il est l’incarnation de la compassion envers les nécessiteux.

– Les personnages secondaires

Esxomba, Elé, M’bamba, Mamie dada, Erna, François Sango

IV– ETUDE STYLISTIQUE ET PORTEE DE L’OEUVRE

A– Etude stylistique

On sort quasiment admiratif de la lecture de cette œuvre quand on voit tous les éléments stylistiques réunis par l’auteure pour que naisse ce roman. D’une tonalité pathétique, « Petit Jo, enfant des rues«  est, en effet, un roman de jeunesse écrit dans un niveau de langue courant avec des mots fort simples ; les mots supposés être difficiles sont expliqués en bas de page. La narration est faite à l’imparfait relayé par le passé simple de l’indicatif et le présent de narration ; tous des temps du récit. Nous sommes ici, en présence d’un narrateur omniscient qui voit et sait tout des personnages ; un narrateur hétérodiégétique donc. Par ailleurs l’un des constats que l’on fait déjà à l’entame de la lecture de cette œuvre est relatif à sa structure ; elle n’est pas linéaire. Les évènements sont en effet racontés par analespe puisque l’auteure dans la narration fait des flash-back fréquents dans le passé du personnage Petit Jo. A cet effet, l’auteure débute sa narration par l’adolescence de Petit Jo, puis reviens à partir de la page 14 pour nous faire connaitre son enfance. D’ailleurs, cette analespe se remarque au niveau d’autres personnages comme Elé, Essomba et Man ; un roman en kaléidoscope donc. Nous remarquons également une mise en exergue des réalités culinaires de la culture de l’auteure « le makabo, ebobolo (aliment à base de manioc, enroulé dans des feuilles) » et d’autres noms désignant telle ou telle réalité dans sa langue maternelle. La plupart des noms des personnages sont en langue indigène. Exemple : sango, Essomba, Elé, etc. Ce choix de l’auteure de faire ces interférences linguistiques relève sans doute de son esprit de créativité et de valorisation tant des noms de personnes, de chose que des repas de sa culture. Evelyne Mpoudi Ngolle a également fait usage de quelques figures de styles comme la personnification « bras mort du fleuve », l’hyperbole « les voisins le fusillaient du regard », l’ellipse (p145), etc. nous avons beaucoup d’autres éléments stylistiques comme l’intertextualité (p146) qui sont exploités par l’auteure.

B– Portée de l’œuvre

« Petit Jo, enfant des rues » est une œuvre qui a une portée sociale et psychologique. Parlant de sa portée sociale, ce roman expose des faits de société, des faits d’actualités, des faits relatifs aux droits et aux devoirs des enfants et à la responsabilité des parents dans l’épanouissement de leurs enfants.

Quant à sa portée psychologie, ce roman nous interpelle et nous amène à réfléchir sur les conditions de vie des enfants aujourd’hui dans le monde, place que les parents accordent à l’éducation de leurs enfants.

CONCLUSION

En définitive, « Petit Jo, enfant des rues », ce roman d’Evelyne Mpoudi Ngole est un chef d’œuvre riche en couleur tant sur le plan thématique que stylistique. Il constitue le cri de cœur d’une femme au profit des enfants maltraités par la vie, et rejetés par la société. Il promeut également la vie, le bien-être et l’éducation en famille ; comme pour dire que le cadre par excellence pour un bon épanouissement et une éducation de qualité est la famille. Tous les enfants ont des droits et doivent en jouir. Et c’est là tout le mérite de l’auteure.

Akakpo Paul

Elève en classe de 2nde A au CEG Pira dans la commune de Bantè