Chaque personne durant son existence, reste plus focalisée sur la subsistance. De ce fait, la vie de chaque être humain sur la terre, se présente comme« combat pour la subsistance » (page 9). Cela nous conduit généralement à oublier les nombreuses réalités présentes et impactant l’évolution de la société, et sur lesquelles nous devrions normalement nous interroger sans cesse.

C’est ce que nous révèle Rodrigue A. GOUNDA dans la préface de son ouvrage intitulé « Les rêves d’un lit malpropre », que nous vous ferons découvrir dans les lignes qui suivent. Pour lui, ce livre qu’il a pris le soin d’écrire, vient à point nommé pour nous permettre « de prendre du recul pour mieux examiner la société » (page 9). Chose bien curieuse. Qui est alors Rodrigue A. GOUNDA et que pouvons-nous dire de son ouvrage ?

L’auteur : Rodrigue A. GOUNDA

Rodrigue A. GOUNDA est un jeune auteur de nationalité béninoise. Diplômé du cycle 1 de l’Ecole Normale Supérieure (ENS) de Porto-Novo, il est également Maître ès-Lettres Modernes de l’Université d’Abomey-Calavi (UAC) du Bénin. Depuis 2013, il est notamment enseignant de lettres dans les lycées et collèges.

Aperçu de l’ouvrage

« Les rêves d’un lit malpropre » est un recueil composé de 5 nouvelles, paru en 2020 et édité par BENINLIVRES. Rodrigue A. GOUNDA qui en est l’auteur, attire l’attention de tous sur de nombreux faits marquants de la société africaine en l’occurrence : sorcellerie, tradition, émancipation des femmes, escroquerie financière, souffrance, etc. Les thématiques développées sont diverses et actuelles.

La première nouvelle, intitulée « Les Noces d’un revenant », raconte l’histoire de Carmène qui, malgré la réticence et les mises en garde de sa mère, entretient une relation avec Isidore, un bel homme, rencontré sur les réseaux sociaux. Enceinte de ce dernier, elle découvre, le jour où elle rencontre sa belle-mère, qu’il est en fait décédé depuis exactement 2 ans. Ce qu’on peut retenir principalement de cette histoire, c’est cette phrase d’Antoine de Saint Exupéry citée par l’auteur : « on ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux » (page 40).

« Une piété paternelle » est le titre de la deuxième nouvelle du recueil de Rodrigue A. GOUNDA. Elle présente l’histoire tragique de Bossou qui recourt à un guérisseur féticheur afin d’avoir un enfant, car pour lui, « il n’y a pas de bien plus précieux que l’enfant » (page 50).Il obtint donc l’enfant qu’il désirait, mais cela marquait le début de souffrances sans fin. Toutefois,« il restait persuadé que se sacrifier pour le bien-être et l’épanouissement de l’enfant est la plus digne existence qu’un géniteur puisse mener » (page 66). Cette décision difficile, il ne la regretta pas. Parce que cet enfant le délivra de ces souffrances. Tout le monde comprit alors que « pour monnayer la richesse d’un enfant, il faut en prendre soin » (page 81).

« Anita ou le réveil des femmes », troisième nouvelle de ce recueil, montre comment des femmes du village Kpinlè, menées par Anita, affrontent les interdits du culte Oro afin de conduire urgemment à l’hôpital, leur collègue Nassibatou en travail.

Vient ensuite « Les rêves d’un lit malpropre », la nouvelle éponyme de ce recueil, portant sur l’affaire ICC-Service qui a longtemps défrayé la chronique au Bénin, jusqu’à un passé récent. Vu la sensibilité du sujet, l’auteur se sert du prétexte du rêve d’un personnage afin de montrer comment de nombreuses personnes se sont fait avoir par ce géant système d’escroquerie, ainsi que les conséquences psychologiques que cela aurait pu avoir dans leur vie.

L’auteur finit cette série de nouvelles avec « Baï, la fillette ministre ».Cette nouvelle présente l’histoire d’une petite fille, en réalité grande sorcière Hwènoussi. Elle avait en effet dans cette organisation, la direction du ministère  chargé de la coordination des affaires gouvernementales. Envoyée par ses parents comme domestique chez Yasmine et son mari Théophile, sa mission était de causer la destruction lente et totale de cette famille pourtant aimante et attentionnée.

Que peut-on dire de ce recueil de nouvelles ?

« Les rêves d’un lit malpropre » est un recueil de nouvelles qui présente des faits non seulement hilarants, mais aussi et surtout édifiants. Cet ouvrage nous permet découvrir certaines des réalités qui minent notre société, afin de faire plus attention dans notre vie quotidienne et mieux réfléchir à l’attitude à adopter dans les situations diverses que nous traversons.

De nombreuses thématiques y sont développées. Et elles ne manquent pas d’interpeller  la conscience de tout lecteur. D’ailleurs, l’objectif poursuivi par l’auteur à travers cet ouvrage, il le dévoile lui-même dans la préface en ces termes : « Par les nouvelles de ce recueil, nous ouvrons donc des portails sur des réalités diverses et sensibles de la société afin que le lecteur puisse en apprendre de ces êtres, sans vie certes que de papiers, mais de potentielles boussoles pour la marche d’une vie de souffle sur le chemin de la vie sociale » (page 10).

De l’histoire donc de la jeune fille enceinte d’un revenant, à celle de la petite fille sorcière, en passant par celle de l’éternel rêveur arnaqué dans l’un de ses songes, Rodrigue A. GOUNDA montre comment le surnaturel s’incruste dans le naturel au sein de notre vie quotidienne, principalement en Afrique. Il montre l’influence que peut avoir le monde invisible sur celui visible, même si l’on ne s’en rend pas toujours compte. On voit donc à la lecture de cet ouvrage, que notre société, à la quête du développement et de la modernité, reste encore sous l’emprise de pratiques anciennes.

Pour finir, il est important de relever que« Les rêves d’un lit malpropre » est un ouvrage remarquable qui traduit la culture et la richesse littéraire de son auteur. Bien écrit, il demeure une pure merveille. Le style de l’auteur est fascinant, surtout quand on voit la manie avec laquelle il intègre à ses récits, les titres, les personnages et les passages d’autres ouvrages de la littérature française et africaine comme : « Maïmouna » d’Abdoulaye Sadji, « Verre Cassé » d’Alain Mabanckou, « Le chant du lac » d’Olympe Bhêly-Quenum, « Le petit prince » d’Antoine de Saint Exupéry, « Lettres de mon moulin » d’Alphonse Daudet, etc. On peut donc constater que Rodrigue A. GOUNDA est un écrivain très cultivé qui nous fait découvrir également à travers ce recueil de nouvelles, le fruit de ses nombreuses lectures.

KOUAGOU Capel Tibokoussakou