« Serment d’abstinence » de l’écrivain  Abdel Hakim Amzath LALEYE, est un roman inscrit au programme en 3ème dans les lycées et collèges du Bénin. Capel KOUAGOU l’expose dans le présent article.

Introduction
S’il y a un sujet sur lequel des interrogations, des réflexions et des essais de définition ne cessent d’être faits, c’est bien l’amour. De nombreuses disciplines se sont intéressées au sujet et de nombreux auteurs littéraires aussi.

Dans sa mission d’écrivain, Abdel Hakim Amzath LALEYE, connu et apprécié pour sa grande capacité à traiter des faits réels qui marquent la société, ne s’est donc pas abstenu de s’intéresser fortement au sujet en suscitant l’éveil de la jeunesse en particulier par des conseils. C’est la tâche à laquelle il s’attèle dans « Serment d’abstinence« , objet de cette présente réflexion. Mais qui est Abdel Hakim Amzat LALEYE et quel est l’essentiel de son œuvre ? Que nous livre-t-il à travers l’ouvrage sur lequel nous avons jeté nos regards littéraires ?

De l’auteur et de son œuvre

Abdel Hakim Amzat LALEYE est le gérant du groupe LAHA. Ce dernier se subdivise en  trois branches d’activité : LAHA PRODUCTIONS, LAHA EDITIONS et ONG ASRO.

Né à Porto-Novo, actuelle capitale de la République du Bénin, en 1971, il est diplômé en droit et en commerce international. Ecrivain et cinéaste, il s’évertue à rendre romanesque les scénarios de ses films, et a à cet effet, plusieurs films et romans très prisés du public.

Son concours au développement culturel de Bénin et à celui de la littérature en particulier, lui a valu le prix Plume d’Or décerné par la Fédération des Associations des Ecrivains, Gens de Lettres et Assimilés du Bénin (FAEGLA-BENIN).

De l’ouvrage

« Serment d’abstinence » est un roman écrit par Abdel Hakim A. LALEYE et paru en 2017 chez LAHA Editions. Premièrement publié sous le titre « Le premier amour est toujours le dernier« , c’est un ouvrage de grande émotion pour les jeunes éphèbes qui découvrent l’univers de l’amour. Il raconte l’histoire d’une vie, celle d’Olaoyé et d’Iyabo.

Tout commence avec Léré, jeune médecin fiancé à Laide, jeune enseignante. Pris dans un dilemme sentimental, il se voit conter l’histoire d’Olaoyé et d’Iyabo dans le but de l’aider à mieux discerner ses choix et ses décisions face aux alternatives qui s’offraient à lui. En effet, vivant avec Laide sa fiancée, il tombe parallèlement amoureux de Banké, et ne sait plus laquelle des deux choisir. Mais l’histoire que lui raconte Papa, et qui parle d’Olaoyé et d’Iyabo, qui ne sont rien d’autre que lui-même et sa femme la « septuagénaire sucrée », lui permettent de faire un choix.

Le récit en question n’est pas une simple histoire d’amour. C’est l’histoire de jeunes amoureux qui ont décidé de tout sacrifier pour une seule chose qui pour eux est la plus importante : vivre l’amour. Iyabo et Olaoyé, car ce sont d’eux qu’il est question, se sont promis un amour éternel depuis l’adolescence et ce, bien malgré les mises en garde des parents d’Iyabo. De plus, selon les oracles et les révélations d’un pasteur, cette union ne pouvait aboutir au bonheur car elle leur priverait d’argent, d’enfants et de succès professionnel.

Ces prédictions se sont avérées être réelles car, après leurs études, il a été difficile à Iyabo de garder son emploi, et à Olaoyé d’en trouver un. Ce qui a même poussé ce dernier à s’enfuir, pour permettre à sa compagne d’échapper à ce malheureux destin, et vivre ainsi dans la prospérité et le bonheur. Cependant, ayant pris conscience du fait que le vrai bonheur ne réside pas dans les biens que l’on possède mais dans l’amour, il n’hésite pas à rebrousser chemin pour retrouver sa bien-aimée et vivre avec elle jusqu’à la fin de leurs jours.

Bien qu’étant prédestinée à une vie pas très prospère, ils décident de faire le sacrifice, confirmant ainsi l’assertion latine selon laquelle « l’amour triomphe de tout » (Omnia vincit amor).

Cette histoire a permis à Léré de comprendre que ses sentiments pour Banké étaient plus motivés par les avantages financiers qu’il pouvait tirer d’elle. Ainsi, son choix a été porté sur Laide qu’il demande en mariage, car il a compris qu’« avec une femme, il ne faut jamais compter sur autre chose que l’amour », et que l’amour ne doit être échangé contre rien d’autre.

Les personnages

Plusieurs personnages interagissent dans cet ouvrage. Ce sont :

  • Léré : Jeune médecin, il est fiancé à Laide. Parallèlement en relation avec Banké, il confie le dilemme de sa vie sentimentale à papa. Ce dernierqui n’est rien d’autre qu’Olaoyé, lui raconte son histoire avec Iyabo pour l’aider à faire le bon choix. Tirant leçon du récit entendu, il décide donc de rester avec sa fiancée Laide.
  • Laide: est la fiancée de Léré et professeur des lycées et collèges. Enceinte de son fiancé, le désintérêt que lui témoigne ce dernier l’affecte beaucoup. On pourrait même lier cela au fait qu’elle se soit évanouie en plein cours devant ses élèves. Par ailleurs, son silence et sa patiente ont été récompensés par sa demande en mariage.
  • Olaoyé: ou encore « Papa », c’est lui qui raconte son histoire au jeune médecin Léré pour lui permettre de sortir de son dilemme d’amour. Amoureux d’Iyabo depuis le collège, il n’hésite pas à sacrifier, même quand il n’en pouvait plus, la richesse et la réussite, pour vivre l’amour avec sa bien-aimée.
  • Iyabo: est appelée « Septuagénaire sucrée », sûrement à cause de son âge, par Léré, le jeune médecin qui suit de près avec elle son état de santé. Amoureuse aussi d’Olaoyé depuis le collège, elle supporte pas son absence dans sa vie, et est prête à tous les sacrifices pour vivre son amour avec ce dernier. Elle meurt à la fin de l’ouvrage dans ses vieux jours, peu avant son mari.
  • Debra: Amie d’Iyabo à l’université, elle est une jeune étudiante gâtée par son petit ami qui lui offre beaucoup de cadeaux, de bijou et une voiture. Même après avoir découvert la violence dont peut faire preuve ce dernier, elle n’arrive pas à le quitter puisque ne voulant pas laisser tomber tous les avantages que lui procurait cette relation. Pour cela, elle n’hésite pas à repousser les avances du jeune Abé.
  • Abé: Ami d’Olaoyé, il est très proche de ce dernier. Il est amoureux de Débra qui malheureusement en aime un autre.
  • Greg: est l’amant de Débra. Il est très attentionné envers Débra et lui témoigne son amour en lui offrant régulièrement des présents (bijoux, voiture…). Mais sa jalousie et la colère qu’elle provoque en lui, fait de lui un homme violent.
  • Banké: Jeune femme fortunée, elle entretient pendant trois mois une relation avec Léré. Très attentionnée avers ce dernier, elle n’hésite pas à lui proposer de l’aider financièrement à créer sa clinique. Cependant, le fait que Léré lui a annoncé sa décision d’épouser une autre suscite en elle une vive colère.
  • Madame Osho: est le proviseur de l’école dans laquelle Laide donnait des cours quand elle a perdu connaissance.

 Les thèmes

  • L’amour

L’amour est un terme polysémique, difficile à définir et à appréhender même en situation réelle. Toutefois, on peut dire que c’est un sentiment qui naît entre des êtres et les incite à s’unir. Cet ouvrage porte essentiellement sur l’amour vu sous cet angle.

L’auteur nous présente l’histoire d’Olaoyé et Iyabo qui brisent les interdictions, les mises en gardes, et même le sort pour vivre leur amour. Ils montrent à tous que l’amour est bien plus fort que le pouvoir, le succès et l’argent. Leur histoire donne une leçon à Léré, qui était sentimentalement partagé entre Laide et Banké. Il apprend vite que l’amour qui procure le bonheur et la paix va bien au-delà des apparences et des biens matériels que l’on peut avoir ou dont on peut bénéficier. C’est ce que n’a pas compris Débra dans sa relation avec Greg. Un amour fondé sur le matériel et le physique ne peut donc faire long feu en raison des divergences qui surviennent continuellement.

L’auteur donne un espoir à la jeunesse sur l’existence de l’amour véritable. Il est source de bonheur et donne la force de surmonter toutes les difficultés. L’on ne devrait donc y renoncer pour rien au monde. Pour cela, il ne faut pas qu’il soit fondé sur les biens matériels ou le physique. Le vrai amour est l’amour du cœur et de l’esprit.

  • L’amitié

L’amitié est un sentiment réciproque qui engage deux personnes s’appréciant fortement, et qui n’ont aucune attirance sexuelle ni aucun lien de parenté. Un ami n’est pas à confondre avec un copain qui, lui, n’est qu’un camarade de classe, de jeu, de loisirs. L’ami est donc bien plus qu’un copain.

Dans cet ouvrage, l’auteur met en évidence des liens d’amitié entre Olaoyé et Abé d’une part, et Iyabo et Débra d’autre part. On voit bien la force qui caractérise chacun de ces liens dû au fait qu’ils partagent des centres d’intérêts communs. Leur amitié est caractérisée par un intérêt réciproque de leur bien. Ils nous apprennent ainsi qu’en amitié, le bien de l’autre est aussi le sien. Pour cela, en amitié il est capital d’être celui qui apporte des conseils et de l’assistance à l’autre comme l’a fait Olaoyé avec Abé, et Iyabo avec Débra.

Aujourd’hui, il ne serait pas très faux de penser que l’amitié vraie et sincère a déserté les forums. Tout d’abord, le terme est utilisé à tort dans plusieurs cas. Nombreux sont ceux qui méconnaissent son sens et le confondent avec le terme « copain ». Ensuite, avec l’émergence des réseaux sociaux, l’usage du terme « ami » perd de tout son sens. On s’appelle amis juste parce qu’on a des liens sur des plateformes sociales. On ne saurait en réalité appeler cela des amitiés. Et sans le savoir, et sans même le vouloir, cela porte atteinte à la valeur que l’on devrait donner à l’amitié. Enfin, avec les vices qui caractérisent de nombreux hommes dans la société il est difficile de vraiment lier une amitié avec une personne dans le vrai sens du terme. Car, dans la plupart des cas, la mauvaise éducation ou l’inconscience, la jalousie, l’orgueil, l’envie de son prochain sont autant de raisons pour lesquelles les amitiés sont brisées, ce qui pousse les gens à être réticent et préférer rester seuls.

Nous nous devons donc de reconnaître l’importance de l’amitié et de développer entre nous des relations basées sur la confiance et qui nous aident à ne pas nous écarter de ce qui est bien.

  • Violence

La violence consiste à faire usage de la force sur une personne.

L’auteur nous donne des illustrations de violence dans sa présentation des faits. En effet, on voit le caractère violent de Greg dans ses confrontations avec Débra. Il va même jusqu’à bousculer cette dernière et à lui faire mal pour manifester son mécontentement. Il s’agit là de violences physiques. Parallèlement, on peut assimiler le désintérêt  et la négligence de Léré envers sa fiancée Laide comme un élément de violence morale. Car on a bien vu comment elle en souffrait, au point où elle s’est évanouie devant toute sa classe pendant qu’elle dispensait le cours.

La répression des violences à divers niveaux n’est pas un combat d’aujourd’hui. Il revient à chacun de savoir que la violence ne fait pas du bien et que rien ne se résout vraiment par la violence. Il est beaucoup plus important, surtout entre conjoints, de privilégier le dialogue et de faire preuve de bienveillance l’un pour l’autre.

De nombreux autres thèmes comme la religion et la vieillesse pourraient tout aussi bien faire l’objet de réflexion dans cette partie. Mais nous préférons nous limiter aux trois développés ci-dessus que nous jugeons être les plus importants.

Portée de l’ouvrage

Comme tous les livres d’Abdel Hakim A. LALEYE, « Serment d’abstinence » est très apprécié par les jeunes, puisqu’il parle de l’amour. On le sait, tous les livres qui abordent la thématique de l’amour, intéressent les jeunes. C’est certainement cet aspect du livre qui fait qu’il est adopté par les jeunes.

Critiques

Il faut l’avouer, les ouvrages d’Abdel Hakim A. LALEYE sont très prisés des jeunes lecteurs du point de vue des histoires qu’ils racontent. Pour les jeunes pubères qui découvrent l’amour sur les bancs, ces histoires sont très intéressantes à découvrir et à lire. Notre critique va par ailleurs porter sur deux aspects : la forme et le fond de l’ouvrage.

Du point de vue de la forme, la mise en forme et l’impression du livre dans toutes ses éditions est très bien faite, comme tous les livres de LAHA Editions. Ce travail donne un vrai caractère artistique et valorisant à l’ouvrage. LAHA Editions est donc à féliciter et à encourager pour la qualité matérielle des ouvrages qu’elle édite. Le papier d’impression est d’une bonne qualité, la police, la taille des caractères sont choisis de manière à rendre aisée et agréable la lecture. Les couvertures aussi sont rigides et les pages solidement reliées. Ce qui freine la dégradation des ouvrages dans le temps. L’idéal quand on sait que les ouvrages seront utilisés en majeure partie par des enfants.

Cependant, lorsqu’on s’appesantit sur le contenu de l’ouvrage, beaucoup de choses laissent à désirer. Avant tout, la rigueur dans le langage, la justesse du style, la maîtrise de la narration, toutes ces richesses stylistiques sont  loin des délices que l’on savoure dans des ouvrages comme « L’enfant noir » ou  encore « Sous l’orage » que ce livre est venu justement remplacer. C’est une bonne chose d’étudier dans nos lycées et collèges des livres écrits par des auteurs béninois, mais en voyant « Serment d’abstinence » qui remplace désormais « Sous l’orage« , on peut donc se demander l’objectif recherché par l’étude d’une œuvre dans le cursus scolaire. La promotion des auteurs béninois doit-elle primer sur le renforcement du niveau des élèves en Français? N’existe-t-il pas d’autres ouvrages d’auteurs béninois qui mériteraient mieux d’être inscrits au programme quand on analyse tout ce qui peut être lié tout au moins à l’expression ou au style?

En outre, et c’est ce qui est dramatique,  dans certaines éditions du livre encore sur le marché, on remarque malheureusement un grand nombre d’erreurs notoires. Et ces exemplaires sont à la portée des apprenants. D’un livre inscrit au programme, on est en droit d’attendre mieux. Par exemple, bien qu’on aperçoive le titre « Serment d’abstinence » sur la première de couverture, on lit encore malheureusement dans la préface et en haut des pages, l’ancien titre « Le premier amour est toujours le dernier « .  Il n’y a aucun mal à changer de titre à un ouvrage. Mais quand on le fait, il faut être vigilent pour ne pas laisser subsister l’ancien titre dans le nouveau livre, du moins dans l’édition que nous avons étudiée.  En outre, on rencontre des erreurs manifestes dans certaines parties de l’ouvrage : erreurs de ponctuation, usage du féminin à la place du masculin, etc. Toutes ces irrégularités dans un livre au programme! Cela laisse à désirer… Quel a été le maillon faible dans le processus d’édition de ce livre?  Nous ne doutons nullement que tous les paramètres aient été étudiés avant de mettre dans les mains des apprenants dont on veut élever le niveau en Français un livre très beau dans sa présentation mais frappé de tant d’irrégularités. Si ce livre a été retenu, et Dieu sait qu’il y dans ce pays des livres très bien écrits et qui réjouissent aussi bien par le fond que par la forme, c’est qu’il regorge nécessairement de richesses. C’est vrai qu’on se demande à la fin laquelle des deux histoires l’auteur a voulu vraiment raconter, mais le livre est déjà inscrit au programme et il revient aux professeurs d’aider les apprenants à en appréhender la teneur.

Quelques phrases importantes

 « Avec une femme, il ne faut jamais compter sur autre chose que l’amour. Et s’il y a l’amour, ne l’échange jamais contre rien au monde. »

  • « L’amour, c’est le plus important. Avec une femme, ne privilégie rien d’autre que l’amour. Et si tu retrouves l’amour, ne l’échange contre rien au monde. »
  • « Le mariage est une relation qui t’engage à vie. »
  • « L’argent n’est pas l’amour. »
  • « Un homme doit faire face aux problèmes auxquels il est confronté. »
  • « Il y a des choses pour lesquelles on n’a pas besoin d’explications. »
  • « La plupart des jeunes filles d’aujourd’hui ne comprennent pas ce que veut dire le vrai amour […]. Elles sont amoureuses de toi aujourd’hui et demain, à la moindre secousse, elles te délaissent. »
  • « Le plus long voyage commence par un pas. »
  • « La réussite dans la vie ne doit pas dépendre de la richesse ni des biens matériels. L’accomplissement et le bonheur viennent toujours du vrai amour. »

Conclusion

Abdel Hakim Amzat LALEYE, à travers sa plume et son style, nous enseigne la force de l’amour. On retient que l’amour est un sentiment grâce auquel nous pouvons vivre dans le bonheur. L’histoire racontée est très touchante et instructive, du moins les deux histoires. Celui qui a trouvé l’amour est heureux et ne devrait le laisser partir ou de le remplacer par autre chose. Le succès professionnel, l’argent et les biens matériels et physiques ne sont que des éléments secondaires qui contribuent à ce bonheur. Vivement que ce livre inscrit au programme subisse un nouveau toilettage approfondi pour aider les élèves dans leur apprentissage de la langue française. Ne pas le faire peut être dangereux pour le niveau en Français des élèves dans un pays où, selon le constat des professeurs de Français, le niveau des apprenants en lettres est à plaindre, s’il n’est pas calamiteux.

KOUAGOU Capel Tibokoussakou

KOUAGOU Capel Tibokoussakou, est né le 03 Juillet 1999 à Natitingou. Après ses études primaires dans les écoles « La Fraternité » de Natitingou, et « Marie Immaculée » de Boukombé, il a fait ses études secondaires dans les séminaires de Natitingou, de Parakou, et au collège catholique « Les Hibiscus » de Parakou où il obtint son baccalauréat en 2017. Aujourd’hui, il poursuit ses études supérieures en Administration Générale et Territoriale à l’Ecole Nationale d’Administration et de Magistrature (ENAM) de l’Université d’Abomey-Calavi. Sa passion pour la musique entre autres, ne l’empêche pas d’être aussi un grand amoureux de l’art littéraire.