S’y pique qui s’y frotte (2/5)

S’y pique qui s’y frotte (2/5)

Il faudrait que je m’émancipe financièrement coûte que coûte. Non, il faut plutôt. N’est ce pas le défaut d’argent qui entraîna mon père vers le tréfonds de la terre ? Où était Dieu dans tout ça ? Sûrement sur son trône. Isabelle, ma cousine, qui venait tous les jours à la messe, pourquoi devait-elle brouter les pissenlits par la racine si jeune pour cause de fistules obstétricales? Dieu ne la voyait-il pas à la messe ? Ce prêtre me dira sûrement que c’est le destin, que l’argent n’achète pas la santé, ni la vie. Mais sait-il qu’avec l’argent, on se soigne pour être en bonne santé? N’est ce pas acheter sa santé ça ? Sait-il qu’avec l’argent, une mère délivre plus aisément le bébé ? Car les docteurs s’occupent mieux d’elle. Avec l’argent, on soignerait plus d’un de ces personnes qui croupissent dans les hôpitaux sans sous et meurent de désespoir avant même de s’éteindre. Sait-il que sans argent, pas de prêtre, ni d’églises ou autres? Il ne peut le savoir: il vit de la charité du peuple, lui.

 

Crédit : Eric OKPEITCHA (Cellule de Communication la Conférence Épiscopale du Bénin)

 

À ce stade de la réflexion, je broyais déjà le noir et ne pouvais plus me contenir. Subitement, je me levai, tous les regards étaient posés sur moi en pleine consécration de l’hostie. Je courus vers la sortie.

Le lendemain matin, je me rendis à l’école faisant l’effort d’oublier les événements de la semaine dernière. L’absence mystérieuse de mes amis semblait m’aider véritablement. Le cours allait bon train. Je pouvais donc focaliser tout mon esprit sur l’explication du professeur. Mais, ce fut un bonheur qui dura à peine le temps de prendre une douche pendant l’harmattan. Magistralement, le Directeur suivi du Comptable Général s’introduisirent sans permission, tous furieux.

– Il y a des voleurs parmi vous qui pensent échapper à ma vigilance. On ne vole pas l’éducation. On paye l’éducation. Jusque là, j’ai fait patience espérant que la première tranche par tous serait enfin soldée. Mais ce n’est point le cas. M. le Comptable, donnez-moi leurs noms!, finit rapidement le directeur.

– Ici, il ne reste que Pierre AK0. Il n’a réussi qu’à payer 5000 sur les 15000 de la première tranche, répondit-il après un coup d’œil sur ces documents.

Ce qu’il me restait à faire après la descente de ces autorités était bien connue. Je pris mon sac et fit dos à la porte. J’inspirais la pitié à mes camarades.

Mais, un malheur ne vient pas seul.

Rentré penaud et consterné, je trouvai ma mère anxieuse, les deux mains soutenant la tête. À peine remarqua t-elle ma présence pour lâcher faiblement une réponse à ma salutation. Toute suite, je compris le mal. C’est la fin du mois or, son commerce n’a rien produit. La poisse !

Cette fois-là, je croyais avoir trouvé de bonnes raisons pour accepter l’idée de Junior. Pourquoi penser à la moralité alors qu’on mourrait de faim bientôt ?

En pleurs, je me dirigeai vers la maison de Junior. Tous les quatre autres amis, absents en cours, étaient chez lui entrain de boire et de s’amuser avec une poudre blanche et d’autres accessoires de banditisme. La maison était luxueuse. Le bonheur y invitait. Tous me pointaient des yeux en questionnant mon silence. Je leur livrai rapidement mes intentions de prendre part aux activités du groupe après que je leur eus raconté mon histoire. Sans trop m’en vouloir ou discourir, Junior me souhaita la bienvenue et m’indiqua la manière dont les choses vont se dérouler.

Le soir déjà, nous devrions rencontrer son oncle pour officiellement adhérer, nous accorder sur les exigences du club, les modes d’opérations et se rendre enfin chez le gourou du club vers minuit.

 

A suivre ….

Amoni BACHOLA

Crédit Photo : pixabay.com

Retrouvez la première partie de cette nouvelle ici : http://biscotteslitteraires.com/2021/sy-pique-sy-frotte-15/

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