Bonjour les amis. Mois de mars, mois de la femme sur Biscottes littéraires. Tout ce mois durant, nous ne recevrons pour vous que des femmes. Et la première interview que nous vous proposons nous est accordée par une « ancienne », Hortense MAYABA. Découverte
BL : Bonjour Chère Hortense MAYABA. Nous sommes heureux de vous recevoir sur notre blog. Nos lecteurs sont curieux de vous connaître. Pouvez-vous vous présenter s’il vous plaît ?
Réponse : Je suis Hortense Sallan, épouse Mayaba. Je suis béninoise. Je suis mariée, mère de famille.
BL : Écrivaine (romancière), pourriez-vous nous dire comment vous avez rencontré la littérature, quand on sait que vous êtes de formation scientifique ?
HM : J’apporte un rectificatif. Je ne suis pas scientifique de formation. J’ai tout simplement fait la littérature. Toutefois, il ne serait pas superflu de dire que le côté scientifique m’a fait un clins d’œil.
En 1979, j’avais passé le concours des sages-femmes et, parallèlement, je me suis présentée à un test pour entrer à l’Office National de Pharmacie du Bénin. J’étais admise pour les deux. J’ai opté pour l’ONP, parce que, sous la révolution, les Sociétés d’État avaient levent en poupe. Le salaire était acceptable. Tout baignait, comme on le dirait aujourd’hui en petit français. Malheureusement, toutes ces sociétés ont connu des difficultés et ont toutes fermé, ou presque.
Me suis-je donc retrouvée à la rue ? Non ! J’avais la possibilité à l’époque d’ouvrir un dépôt pharmaceutique. Ce que beaucoup de gens avaient fait. Moi j’étais plutôt éprise de liberté. Ce travail me cloîtrerait à mon dépôt. Pourquoi ne pas trouver autre activité qui me porterait sur ses ailes et me permettrait de sortir et de voyager ?
Le Nigeria n’est qu’à quelque encablure de mon pays. Le Naira était à un taux mirobolant. Je me lançai dans l’aventure. J’étais tantôt au Togo, Tantôt au Nigeria pour mes affaires. Et j’écrivais déjà !
Comment j’ai rencontré la littérature ? Enfant, j’aimais beaucoup lire. Mon plus grand plaisir était de me retrouver à la bibliothèque ou dans un Centre Culturel. J’étais toujours embêtée en quittant ces endroits. Je voulais avoir plusieurs livres en emprunt pour la semaine, or, mon choix était limité à 2 livres. Je dévorais les textes avec avidité et, quelquefois, je finissais un livre comme « La lampe d’Aladin » par exemple, au bout de quelques heures seulement. C’est de là qu’est né mon Amour pour le livre.
BL : Écrivaine, est-ce par passion ou par vocation ou même par devoir ? Quelles sont vos muses ?
Réponse : La littérature est venue naturellement à moi, de façon tout à fait insidieuse. Parce que peut-être, comme je l’ai dit plus haut, je lisais beaucoup. J’en suis devenue accro. Soit j’écris, soit je lis. Tel est en gros mon mode de vie.
BL : Pour vous, qu’est que ça fait d’être une écrivaine dans une société comme la nôtre où certaines initiatives féminines sont regardées avec suspicion ? Comment étaient vos débuts ?
HM : Toute communauté est appelée à évoluer et à accepter au fil du temps, quelques changements en son sein. Cela se fait de façon tacite mais évidente. Qui aurait pu penser qu’une femme serait PRESIDENTE d’une Nation en Afrique ? C’est arrivé ! Et elle n’a pas démérité. C’est cela cette révolution dont je parle.
Il faut toujours quelques têtes folles pour braver les interdits. On voit le résultat aujourd’hui. Même dans les campagnes les plus reculées, nos parents ont compris que toute avancée passe par le chemin de l’école.
En ce qui me concerne, je me vois beaucoup plus comme un auteur : l’auteur de mes pensées. Parce que, tout en portant en son sein des lettres de noblesse, le mot « écrivain(e) » porte aussi son bagage de lourdeur qui tend à faire de vous une personne à part. Écrire est un don qui doit nous maintenir en communauté et non pas nous construire une case à nous.
BL : Pensez-vous qu’écrire serait le moyen parfait pour vous de partager avec le monde vos sentiments, votre vie en générale ?
HM : Quand on rend public son écrit, c’est forcément dans le but de communiquer avec les autres. Un écrivain est libre du choix des sujets qu’il aborde, ce qui lui permet de véhiculer ses pensées et ses sentiments. L’écriture permet de figer le temps à travers des témoignages, des faits et des événements de son époque. Ne dit-on pas que les paroles s’envolent mais que les écrits restent ? Si c’est cela que vous appelez : le moyen parfait de partager sa vie ou ses sentiments, je réponds oui. Les écrits servent à cela aussi.
BL : Vous êtes l’auteure de « l’Univers infernal » publié en 1997. Pourquoi avoir choisi ce titre ? Si vous devez le résumer, que diriez-vous ?
HM : « L’Univers infernal » relate la vie d’un monsieur qui s’était trouvé pris en étau entre les croyances traditionnelles et celles de la science du blanc. Son train de vie était devenu très compliqué des suites d’une maladie assez rare qui nécessitait une greffe. Sous la pression de sa femme qui croyait très peu au pouvoir de la médecine moderne, cet homme ira de déboire en déboire jusqu’à ce que l’irréparable soit commis. Voilà résumé l’histoire que raconte ce livre.
BL : Vous écrivez beaucoup et récemment encore, vous avez publié « Étrange témoin » un polar, aux Éditions Muses. D’où puisez-vous votre inspiration ? Pouvons-nous avoir un avant-goût de ce livre en attendant qu’il soit disponible au pays ?
HM : Je ne sais pas s’il y a des gens qui savent d’où leur vient l’inspiration. Pour ma part, je ne saurais le dire. Je sais seulement que tout notre environnement est source d’inspiration. Les dires, les faits, les gestes… Tout cela peut produire un déclic pour un livre plein de rebondissements. Pour ce qui est d’un avant-goût de : « Étrange témoin », je vous mets ici le contenu de la quatrième de couverture.
« Où est passé monsieur Rih Léma, cet éminent homme d’affaires d’une quarantaine d’années, disparu depuis soixante-douze heures bientôt dans la ville de Cotonou ? Que penser de l’accusation faite par son perroquet ? En présence des agents de la police criminelle, l’ara prononce une phrase, certes inachevée, mais clairement exprimée.
N’en croyant pas ses yeux, monsieur Mano Saguy, un fonctionnaire de l’État qui, au plus grand des hasards a acheté un journal ce matin, s’offusque au fil de sa lecture : « Qu’est-ce que cela ? Ce n’est pas sérieux ! Comment peut-on arrêter une personne sans preuve ni indice valable, sous le grossier prétexte qu’un oiseau l’a accusée ? Dans quel pays sommes-nous ? Quelle aberration ? Quelle histoire ? »
Mano Saguy ignore cependant qu’il sera amené, par un fâcheux destin, à être convié à la barre pour témoigner contre cette personne qu’il n’a jamais rencontrée au auparavant. »
BL : On a remarqué que vous vous intéressez aux livres de jeunesse et pour enfant. Qu’est-ce qui vous y a poussée ? Les fruits ont-ils tenu la promesse des fleurs ?
HM : Je me suis retrouvée fortuitement dans le giron du livre de jeunesse. En 1995, il avait été organisé un concours pour les illustrateurs (Dessinateurs, caricaturistes, peintres sur toile…) et pour les auteurs. Le but était de former un creuset où des auteurs et des illustrateurs se retrouveraient pour travailler en association. Je faisais partie des heureux lauréats. C’est ainsi qu’est née l’Association des Auteurs et illustrateurs du livre pour enfant. Cette association a produit beaucoup de livres de jeunesse. J’ai à ce jour une quinzaine d’albums jeunesse publiés au Bénin et en Côte d’Ivoire.
Les fruits ont-ils porté la promesse des fleurs ? Je crois que l’histoire suit lentement son cours. Nous avons quelquefois des retours encourageants. C’est ce que je peux affirmer à ce sujet. Pour en savoir davantage sur ces livres, les liens suivants peuvent être bien utiles :
https://www.amazon.fr/Hortense-Mayaba/e/B008XPPQCQ
BL : Beaucoup d’auteurs se font éditer en Europe pour des raisons diverses. Pensez-vous que procéder ainsi est le meilleur moyen pour mieux se faire connaître au pays ?
HM : Pour mieux situer le problème, je parlerai de moi. C’est ce dont je suis sure. Vous savez, le meilleur moyen d’être partout aujourd’hui, c’est d’être sur internet. Et puis, pour ma part, il était temps de corriger le tir. Pendant longtemps, dans mon pays, les auteurs que le grand nombre de gens connaissaient, c’est ceux qui ont été édités à l’étranger. Pourquoi ? Parce que probablement, il y a un travail qui se fait en amont de l’autre côté pour diffuser et promouvoir les œuvres et leurs auteurs, et cela à travers les nations.
Aujourd’hui, on n’a même plus besoin de franchir une seule frontière pour mettre ces livres à la portée du monde entier. Internet est pour tous. Il suffit de se former pour cela.
BL : Quels conseils donneriez-vous à ceux et celles qui un jour, souhaiteraient se lancer dans l’écriture ?
HM : Je leur retournerais le conseil qu’un de mes mentors m’avait prodigué à mes débuts, à savoir : courage et persévérance ! L’écriture est à l’image du champ d’un laboureur. Il faut commencer par le commencement. Il faut creuser, bêcher, planter, attendre que les bourgeons sortent de terre, espérer que ce travail porte ses fruits et après, seulement après… on pourra jouir de son labeur. Pour la littérature, il faut lire les autres. Encore lire. Toujours lire jusqu’à ce que vous sachiez par quel bout prendre pour faire valoir vos idées.
BL : Votre mot de la fin
HM : Merci d’avoir pensé à moi.
Merci Régine. Bonne journée aussi pour toi