Ô Sarah, Anne, Elisabeth et autres mères tardives
Révélez-lui le secret qui rendit votre foi productive
Et tandis que temps et grâce font œuvre en elle
Redites-lui combien le Père demeure fidèle.
Le malade dit incurable et la femme peinant à enfanter
Il est un parallélisme que je ne puis m’empêcher d’établir, celui du malade dit incurable et de la femme peinant à enfanter. J’abohrre les termes incurable, inguérissable, inféconde, infertile et stérile. Car il y a une sentence contenue dans ces mots, et je refuse de la prononcer, l’espérance demeurant mon maître-mot.
En plus de la souffrance inhérente à la situation, il faut conjuguer avec le regard 👀 inquisiteur de l’autre, les intempestifs chuchotis, les questions déplacées, les allusions insensées de ceux qui feignent la compassion.
Le regard fureteur 👀 à l’affût du moindre changement physique, les inspecteurs, détectives et limiers aux longs crocs s’interrogent. Ils feignent l’étonnement 😮 face à la persistance de la situation, comme si dans leur existence à eux, tout était résolu.
Quel hôpital 🏨 fréquente-t-il? Quelle méthode a-t-elle déjà essayée ? A-t-il pris des couleurs ? A-t-elle pris des rondeurs ? Il affiche meilleure forme. Elle paraît plus heureuse. Est-il enfin guéri ? Est-elle enfin enceinte ? Chacune de leurs questions contenant une pointe d’incredulité, l’être humain étant ainsi, prétextant souhaiter un bien à son prochain, mais en secret n’y croyant que peu ou prou.
Il faut également composer avec les maladresses de compatissants zélés dont les inquiétudes et interrogations suscitent frustration et exaspération en lieu et place de réconfort.
As-tu tenté ceci ? As-tu essayé cela ? Ça ira, Dieu est grand, tu pourrais adopter. Tant qu’il y a la vie, il y a de l’espoir. Tu n’es pas né ainsi, alors tu guériras forcément. Je connais une femme devenue mère après dix fausses couches. Et autres balivernes.
Dans la solitude imposée par le mal dit incurable, le malade espère une accalmie que la science peinera à expliquer. De toutes ses forces, il s’accroche à cet espoir, priant 🙏🏽 avec ferveur pour être celui qui contredira les statistiques. N’ayant cure de savoir comment cela se produirait, il rêve juste de guérir contre tout pronostic, aussi savant soit-il. Alors il se visualise sur pied, allant et venant à son gré. Mangeant de tout, nonobstant avec parcimonie. Faisant des mouvements 🤸🏽♂ autrefois impossibles. Aimant à nouveau, cependant différemment. Saisissant dans les moindres choses la beauté de la vie.
Dans le secret de son âme, palpant ses entrailles vides de sens, la future maman s’identifie à cette femme qui contre toute attente a finalement enfanté.
Ô Sarah, Anne, Elisabeth et autres mères tardives
Révélez-lui le secret qui rendit votre foi productive
Et tandis que temps et grâce font œuvre en elle
Redites-lui combien le Père demeure fidèle.
Comme elle aimerait être à votre place ! Entendre vagir l’enfant de ses désirs. Bercer le fruit de tant d’attente, d’incompréhension, de résignation, de traitements et de prières 🙏🏽. Le langer avec tout l’amour dont elle est capable. L’embrasser avec son cœur ❤. Le porter avec 🤰🏽 son âme.
Si seulement il avait la santé ! Si seulement elle avait un enfant ! Tout serait si différent. Le soleil ☉ brillerait autrement. Le bruit de la pluie 🌧 tombant sur le toit aurait une symphonie différente de celle masquant les larmes qu’on échoue à contenir davantage. La nuit cesserait d’être l’agora de toutes les hantises. Désormais prodrome d’une ère nouvelle, elle porterait en elle le fruit de l’espérance triomphante, qui impassible ferait bégayer l’incrédule.
Annie-Josiane Sessou