Désastres (4/5)

Désastres (4/5)

Emma revint en classe toute trempée de honte. Je lui portai mon assistance et ma compassion dans ce complot ourdi contre elle. Elle ne faisait que pleurer.

Le mercredi comme convenu, je me rendis à l’école pour les travaux manuels mérités à cause des exercices non faits. Emma fut contrainte à y venir également à cause de son cas de tricherie sur lequel le personnel administratif statuera samedi en conseil. Ce laps de temps nous permit de discuter un temps soit peu :

– Tu sais, Emma, je crois en ton innocence. Je sais que tu n’aurais jamais pu faire une chose pareille.

– Merci de croire en moi. Si tout le monde était comme toi, on trouverait les vrais coupables.

– Oui, c’est mon souhait. Je ferais tout mon possible. D’ailleurs je souffre autant que toi car mon cœur aboie face à tout ça. Tu es mon alter ego.

– Hum ! Voilà, l’autre fois, je fus très émue que tu puisses m’avouer ce que tu avais sur le cœur. J’avais senti que ce fut très difficile pour toi. Et nous avions été interrompus dans le processus. Tu me plais bien aussi et depuis mon arrivée dans l’école tu es le seul qui arrive à me braver en classe. Nous avions des ambitions communes et nous pensons comme deux personnes connectées. Mais, je ne pourrais honorer ce bouquet d’amour que tu me présentes. Car j’ai déjà un homme dans ma vie, mon premier amour que je n’arrive pas à oublier et que j’aime réellement. J’ai connu certaines expériences en amour, et laisse-moi te dire que dans une relation, l’amour seul ne suffit pas, encore moins s’il est unilatéral. Ça ne sert à rien. J’ai mal de te dire la vérité mais il vaut mieux que tu souffres maintenant que de souffrir toute ta vie. Samedi, sera décidé le mortier dans lequel je serai pilée. Et tu sais bien que je serais renvoyée de l’école. C’est la tradition. Donc, il ne servirait à rien qu’on entame quelque chose qu’on ne saurait finir ensemble.

À l’entendre, j’étais devenu bizarre. J’étais déçu, mais le raisonnement tenu et le timbre de la voix me firent voler vers un univers paradisiaque. J’aurais voulu que ces moments fussent une éternité.

– Mais, Emma,  je pourrais supporter ton absence, répliquai-je. Puisque ce ne sera que question de temps et de lieu. L’amour supporte tout et surpasse les contraintes.

– Je le sais. L’amour peut tout. Mais je ne saurais te promettre être tienne alors que je suis tout le temps tentée et attirée par l’autre. Tu m’aimes, moi j’aime un autre. La chaîne d’amour ! D’ailleurs, ça m’étonne beaucoup que ce soit sur moi que tu jettes le dévolu. Car, secret de femmes, j’ose te dire qu’Ariane est éperdument amoureuse de toi. Elle craque pour toi et tient beaucoup à toi. C’est parce que tu es peut-être habitué à elle que tu ne décèles pas ces sentiments. Elle pourrait tout pour toi.

– Emma, c’est bizarre ! Nous sommes ensemble depuis l’enfance, elle et moi, mais je ne nourris pas pour elle la même affection que j’ai pour toi. Tu es ma préférée, celle que mon cœur a choisie.

– C’est la règle de l’amour. Il ne prévient pas. On peut vivre assez longtemps avec quelqu’un et n’en être pas amoureux et voir en deux jours un autre et en tomber sauvagement amoureux au point d’en devenir addict.

– C’est vrai. Tu as raison. Mais mon cœur saigne.

– Comprends-moi et restons bons amis.

Ainsi prit fin notre conversation. J’étais détruit et complètement passif. Je rentrai froid. Je n’eus envie de rien et je ne voulus rien faire. C’est terrible !

Le lendemain matin, Emma était venue à l’école toute souriante et paraissait davantage belle. Notre conversation l’a libérée. Quoi que déçu, j’entrai dans la danse du sourire avec elle. Tout le monde s’étonna de notre euphorie. Ariane en était amère. Pour elle, la soirée d’hier au cours de laquelle nous étions punis, nous a permis de nous amouracher. Je sentais le vif de son sang monter. Telle que je la voyais, elle pourrait commettre un crime. Je m’approchai pour quérir de ses nouvelles quand soudainement du revers de sa main gauche elle me colla une baffe chaude et sonnante puis courut hors de la classe. Je restai coi les deux mains à la joue espérant que quelque câlin sur la surface atteinte en réduirait la douleur. Le mutisme gagna la classe. Les cours se déroulèrent dans une atmosphère de vive tension.

Cette baffe me rappela tout le mal que je fis à Ariane depuis l’arrivée d’Emma. Je ne lui portais plus aucune attention. Je négligeais sa présence et nos programmes  d’antan. Je péchais contre elle. Je me rappelai tous les beaux moments passés ensemble et tous ses sacrifices pour moi. Je me rendis compte qu’il n’avait pas meilleures preuves d’amour. (Est-ce trop tard pour moi ?).

J’attendis 19h pour essayer de me faire pardonner et essayer de la convaincre de mon errance sentimentale. Mais, elle n’était plus réceptive à mes mots. Ariane s’est fermée à moi. Plus rien de moi ne lui importait. Elle me voyait en traître.

Rentré bredouille, j’avais besoin d’affection. L’appétit voyagea loin de moi et aucune envie ne me conviait. Pour faire court à tout ceci, j’entrepris de vite me coucher quand Monia me fit venir une note venant d’Ariane. Je l’ouvris :

« Bonsoir…

Il est vrai que les épluchures se jettent après l’utilisation du fruit et pour jouir de l’orange il faut la dénuer de sa peau. Toi et moi, depuis tout petits, nous étions des amis inséparables. On a vécu de nombreuses expériences ensemble. Nous avions connu des moments inoubliables. On partageait tout. Pour toi, j’étais prêt à tout sans que tu ne fusses mon tout. Il m’arrive de me rappeler les instants de prises de photos, de nos petites séditions, et j’en pleure. Mais depuis le jour où cette fille a fait irruption dans nos vies, tu as pris tes distances. Tu l’as choisie et m’as délaissée. Tu ne pourrais le nier. J’entrevoyais ta flamme pour elle et je faisais tout pour l’éteindre mais hélas ! Le destin comme pour me faire témoin de ta traîtrise me permit de me blottir derrière les persiennes écoutant attentivement vos échanges d’amoureux heureux. Tu avais de ces expressions qui emportent,  tu sais: « d’elles toutes, tu es la seule que j’apprécie le plus ». Eh bien ! Je croyais que j’étais celle qui te faisait languir. Et pourtant, tu diras que tu es mon meilleur ami. J’étais amoureuse de toi. Je t’aimais. J’avais assez de prétendants mais à cause de toi, je reléguais tout le monde au second degré. Tu étais mon étoile, mon protégé.

Ce jour-là, je n’ai pas pu contenir mes larmes en moi. Je t’ai vu partir loin de mon cœur mais j’espérais encore. J’ai pensé qu’en la discréditant et en la honnissant devant la classe, tu la laisserais pour me revenir. Oui, je l’avoue, c’est moi qui ai créé ce malheur à Emma et je ne regrette point. Tellement je la hais ! Pour toi, je pouvais commettre un crime.

À cause de toi,  je suis devenue amère. Croyant régler les choses par les punitions, vous vous êtes retrouvés et aviez célébré ma défaite.

Désormais,  je ne ressens que de l’amertume quand je vous vois. Même si je ne te hais pas encore, cela ne saurait tarder. Je fais l’expérience de ces auteurs qui stipulent que la haine nait d’un amour profond antérieur. S’il va de l’ordre de ton bonheur d’être avec elle, bonne chance à toi. Mais toi et moi, ça colle plus, sache-le. Ça ne collera plus jamais. C’est fini. Fini.

Ps: Oublie-moi pour toujours. Garde-toi de m’aimer

Ariane».

… A suivre.

Amoni BACHOLA.

5 comments

Merci pour mon nouveau régime. Je prends en effet du poids du coup je mange peu. Alors chaque soir, je me blottirai dans mon lit et je mangerai des biscottes. C’est bon pour moi.
Je promets une chronique à la fin de la nouvelle

Salut, cher frère et ami Jovincio. C’est toujours un plaisir de grignoter chacun de tes mots que tu sais faire beaux. Il y a de la place pour tout le monde autour de ces biscottes littéraires. Ravi que tu sois des nôtres

Salut à toi, frère et ami, bien aimé Jovincio fils de KPEHOUNSI. Heureux de te retrouver autours de cette table de biscottes. Fier de toi

Merci M. Jovincio.
Ça fait du bien de vous voir manger nos biscottes et de vous lire, également.

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