Agbohoun, yé ,Agbohoun, yé, Agbohoun, yé.

Mon conte roule, vole, survole collines montagnes et marrées et atterrit dans un village communément appelé Ayétété. C’était encore au moment où les animaux et les arbres pouvaient s’exprimer. Dans le village, régnait une harmonie divine. Les lions rendaient des services aux fourmis et aux mouches, les viandes étaient partagées équitablement et les conflits gérés à l’amiable. Entre le chat et le chien, c’était la grande amitié. Ils se promenaient toujours ensemble, se partageaient tout sauf rien. Tout le monde admirait leur complicité et leur loyauté. Leurs enfants pouvaient jouer ensemble sans craindre les coups de griffes ou de gueule de leurs camarades. À leurs yeux, le plus important, c’était leurs femmes et leurs descendants. Tout allait si bien entre eux jusqu’au jour où la tortue, l’animal le plus malin de Ayétété voulut mettre un terme à cette belle amitié qui l’exaspérait du seul fait qu’ils vivaient plus heureux qu’elle, esseulée, sans ami. En effet, au début, elle alla demander l’amitié du chien. Elle voulait s’immiscer entre eux, diviser le beau duo. Elle parla en ces termes:

– Vénérable et gentil, Chien, je voudrais être ton ami.

– J’aimerais bien, tortue, mais je préfère mon amitié avec chat. Il est loyal et il ne fait rien sans me prévenir, on est déjà très proches.

La Tortue dit tout pour le persuader mais rien. Alors elle passa à son plan B:

– Chien, tu sais quoi?

– Non dis-moi

–  Tu devrais être ami avec moi. Car, contrairement au chat que tu juges loyal, je ne fais pas les yeux doux à ta femme comme je l’ai surpris avant hier le faisant quand tu étais parti à la chasse; tous et mes enfants ne pourront jamais griffer les tiens comme les chatons l’ont fait hier à tes petits chiots.

À ces mots, le ventre du chien devint salé (s’énerver traduit du idaasha):

– Il a osé faire ça ? Il va me le payer. Et moi qui le considérais comme mon unique frère. Il va m’entendre. Le temps au chien de finir ce qu’il faisait pour rejoindre le chat, la tortue rejoignit illico le chat:

-chat, je voudrais être ton amie.

-Tortue, je veux bien mais je préfère le chien. Parce qu’il est loyal et très fraternel.

– Tu me fais rire. Tu préfères le chien qui se croit plus grand que toi. Il me l’a dit tout à l’heure et en bonne amie, j’ai voulu te le dire. Il m’a dit que tu ne sais même pas qu’il y a longtemps qu’il séduisait ta belle épouse et qu’un jour, il tuerait tes beaux chatons.

– Quoi ??? Il n’a pas osé dire une chose pareille. Je vais le tuer avant qu’il ne puisse le faire. Il va m’entendre. Je pardonne tout sauf ça, je crains que notre amitié s’estompe là. C’est fini.

D’un coup, il se lance dans la recherche du chien pour lui régler son compte. La tortue, redoutant que leur amitié l’emportât sur leur subite haine, et de peur qu’ils reviennent l’ensevelir, se hâta sur l’arbre de vie quémandant au Créateur l’impossibilité désormais aux deux de pouvoir s’exprimer et se comprendre. Mais il oublia qu’il était dit que si l’un des animaux perdait cette aptitude, tous le perdront. Se rendant compte de sa mauvaise manie, il voulut repartir se rétracter auprès du Créateur mais le souffle du celui-ci fit tomber le feu sur sa carapace la marquant à vie des traits de division. A ses dépens, la Tortue retient que mentir et envier les autres sont des vices à éviter et qu’en voulant faire du mal à l’autre c’est à soi- même qu’on le fait. Elle s’isola du monde, se retrancha dans les bas-fonds, marécages et cours d’eau. Le Chien et le chat ne pouvant communiquer pour se comprendre sont restés ennemies, le regard de l’un plein de haine pour l’autre.

 

BACHOLA Amoni.

    • Bien vu, Akofa. Récit étiologique rendu vivant par les sournoiseries de la torture dont l’imposture n’a d’égal que sa posture de fourbe éhontée, auteur de troubles et de divisions.