Chapitre III
Le maître de céans s’étira longuement devant la baie et continua par marcher. Un pas après l’autre. Parfois son bureau lui paraissait si grand. Toujours un pas après l’autre dans le silence des lieux. Il méditait tout ce qui arrivait leur arrivait, son personnel et lui. Il réfléchissait au mystère du lit 4 et de la salle 2. Fussions-nous dans un film, aisément cela pourrait se comprendre. Il repassa les pistes déjà explorées : la permutation de lits qui ne donna aucun résultat. La brillante sortie des sorciers qui se solda elle aussi par un échec. La piste de la malédiction avait permis de voir défiler dans nos locaux de grandes et immenses autorités religieuses. Le résultat fut aussi un insuccès. Ce qui me restait à explorer est donc une erreur humaine. Comment aborder cet aspect de la chose ? Qu’est-ce que l’équipe avait-elle manqué de faire depuis le début ?
Il continua toujours par marcher. Il put voir le filet de fraicheur distillée par le climatiseur Xnon de son bureau. Made in China. Le lacis d’air sortait sous la forme d’une douce poudrée et ruisselait sur les légères artères creusées par le vent. Il s’arrêta un instant dans sa marche, plongea son regard dans la douceur de l’air conditionné et sourit. Une légère plaque de rosées macula ses lunettes BCBG, qu’il ôta. Il entama encore la marche quand quelqu’un toqua à la porte de son bureau. Il tiqua. Essuya les verres.
-Entrez, fit-il.
Entra dans le local, une femme toute grassouillette vêtue d’un décolleté noir qui laissait voir la naissance de ses seins.
-Hé Vanessa ! Ça va ?
-Bonjour docteur, salua-t-elle de sa voix écrasante et au regard passionné et sensuel.
Dr KODJO sembla voir des soleils, en tout trente-six soleils, cette fois-ci, suspendus dans les yeux amandes de Vanessa. « Et Dieu créa la femme ! », murmura-t-il dans son cœur.
Le parfum chamarré d’un arôme de citrouille et de camomille de l’assistante très très particulière du docteur KODJO qui avait porté un dénudé qui laissait voir des choses jumelles et qui ne la fermait pas cinq minutes emplissait le bureau. Une vague de volupté monta en docteur KOKOKOKODJO qui oublia un tant soit peu l’énigme qui tracassait son équipe et lui il y a de cela deux mois environ. « Si quelque chose peut nous faire oublier nos problèmes même le temps d’un instant, cette chose, on peut aussi l’appeler Dieu. Crois-tu en Dieu, docteur KODJO ? » l’interrogea cette petite voix qui l’animait souvent. Il marqua un pas en arrière et la fixa du haut de ces montures dorées.
Vanessa passa ses bras autour de mon cou et posait ses lèvres au goût miel de forêt sur les miennes. On tournait nos langues contre nos langues et elle guida ma main contre sa poitrine filandreuse. Je finis par dégrafer son soutien-gorge. Fais pareil avec mes seins. Embrasse-les. Tu peux même les mordre un peu, juste un peu, m’invita-t-elle un peu folichonne et d’une voix affriolante. D’habitude, ce sont les hommes qui prennent les initiatives, chuchota dans mon esprit une autre voix que je n’identifiai pas. Alors je les mordis légèrement comme indiqué. Le sein droit et ensuite le gauche avec une délicatesse qui laisserait accroire que j’étudiais le volume des jumeaux.
Elle respira profondément, rejeta sa tête en arrière et me serra contre son corps. Nos langues s’étaient sucées et mes mains se sont glissées sous sa robe et chaque centimètre de sa peau se révoltait et voulait plus. Quand j’avais croqué encore son sein gauche et glissé ma main sous sa culotte, j’avais entendu la plus belle musique de ma courte vie : Pénètre-moi, mon chou ! « Mon chou, hein ! La vache ! » J’avais fait glisser sa culotte le long de ses interminables cuisses et douces et chaudes et brûlantes, et léché son oasis qui me hantait. Hum ! Gbomamé ! Je remontai jusqu’à son nombril et elle me griffa le dos. Sorcière, va ! me souffla toujours la voix inconnue. J’étais enivré par son odeur de Nivea et de goyave et son goût de tomate fraiche. Et contre toute attente, on toqua à la porte de mon bureau. Fini le jeu, fini mon jeu.
Sauvé par le gong !
Vanessa se rhabilla vite fait et se redressa en face de Dr. KODJO. Entra dans la pièce de Souza avec un dossier sur l’état de l’enquête. « Merci cher collègue » trémola KODJO. Puis il ajouta : « Vanessa partait justement ». Elle sortit avec une démarche lente et un goût d’inachevé dans les yeux.
- Tchalé lékéma ?
- Cool !
- Prends place, de Souza, ordonna le chargé de la Covid-19 au Togo. Je salue ton implication très personnelle dans cette enquête qui est sortie de l’ordinaire. Ça me chiffonne tellement, cette affaire. Vraiment, merci. J’ai une ultime piste que je compte suivre cette nuit. Si tout va bien, demain, nous ferons la une des journaux, confia-t-il d’un ton sibyllin. On va ripailler grave !
- Voilà ce qui est bien, docteur. On va donc croiser les doigts. J’ai une urgence. Je file donc, si vous le permettez.
- Feu vert, l’ami, accepta-t-il, tout guilleret. On s’appelle donc.
- Eyizandé ! fit de Souza, les yeux ronds.
Kodjo AGBEMELE
Ecrivain togolais