C’est la rencontre fortuite d’un homme et d’une femme dans des conditions assez singulières. Nous sommes les témoins de leur quotidien au sein du centre équestre de François qui nourrit une réelle passion pour les chevaux. Elsa en nourrit une peur bleue qu’elle consent cependant à dompter pour à la fois se montrer utile et faire passer le temps. Cela a le mérite de la rapprocher de François qui sans savoir pourquoi, se soucie énormément de cette inconnue.
On s’émeut de cette amitié naissante d’où émane une douceur inouïe. On voudrait qu’elle se transforme en amour même si l’issue en serait incertaine. Rien n’est gagné entre le mutisme d’Elsa et les incertitudes de François.
L’auteure finit tout de même par nous combler, mais non sans distiller ça et là les hantises de chacun. Elsa est si fragile, François si volontaire ! Quand bien même on devine la fin, on est tout de même à mille lieues de se douter du chemin qu’emprunteront nos deux héros pour y parvenir.
Un parcours tout en bienveillance et délicatesse. On se laisse gagner par le flegme d’Elsa dont le passé douloureux nous est peu à peu dévoilé. Sous ses airs un peu bourrus, François cache des fragilités. Contrairement aux apparences, sa vie n’a pas toujours été un long fleuve tranquille. Mais il sait transcender son passé et se montrer très patient avec Elsa. Il lui apprend à s’aimer, aimer et vivre enfin. Cependant, Elsa revient de loin. Ses blessures sont profondes et encore suitantes. Elle doit en guérir pour aller de l’avant et elle en a conscience. On l’entend monologuer avec justesse : «Il faut que j’arrête de m’autofustiger, de m’autoflageller, de m’automassacrer… Il faut que j’arrête de pleurer sur mon passé, de m’inquiéter pour l’avenir et de gâcher le présent.» Page 257. Et c’est bien de cela qu’il s’agit. Elsa continue de subir les conséquences de relations toxiques passées, porteuses de mensonges destinés à empêcher la vie d’éclore en elle.


Le vécu d’Elsa nous fait revisiter nos sermons intérieurs, ceux qu’on prononce au fond de nous et qu’on refuse ensuite d’écouter pour aller de l’avant. Ceux qui ont le mérite d’être authentiques et de porter l’essence de notre être.
Peu à peu, Elsa se laisse véritablement porter par l’amour. François sait s’y prendre. Un événement improbable viendra justement les rapprocher davantage, scellant leur amour pour de bon tout en réparant chacun. Pourtant, le bonheur d’Elsa n’est toujours pas complet. Elle continue de garder enfoui dans son cœur un terrible secret que les circonstances la forceront à révéler. Une fois encore, François saura se montrer magnanime et aidera sa bien-aimée à composer avec cette meurtrissure.
On admire la patience et l’empathie de François. Il nous rappelle ce qu’est l’amour, le véritable. Celui-là même qui «est patient, plein de bonté; n’est pas envieux; ne se vante pas, ne s’enfle pas d’orgueil, ne fait rien de malhonnête, ne cherche pas son intérêt, ne s’irrite pas, ne soupçonne pas le mal, ne se réjouit pas de l’injustice, mais se réjouit de la vérité; pardonne tout, croit tout, espère tout, supporte tout. Qui ne meurt jamais.» 1 Corinthiens 13 : 4-8

Annie-Josiane Sessou