Et voilà qu’il neige dans ma tête. La blancheur de ce temps me renvoie à une autre blancheur. Le blanc de ce type qui me hante. Je croyais pouvoir l’oublier mais rien n’y fit. L’autre jour, je l’ai même vu dans la boutique de Maman-Djidonou. Ce jour-là il était tiré à huit épingles. « Maahou »! fraîcheur est trop! Il parait même, d’après mes investigations, qu’il y aura bientôt une autre tenue pour fêter Noël.
Je suis folle de lui. Ah Maman-Djidonou, ma belle-mère, cette bonne femme! Je ne sais d’où elle tient cette gentillesse angélique. Hier, encore elle me donnait deux galettes pour calmer mes papilles gustatives, parce que j’aime son garçon. Tout allait bien avec ma belle-famille. J’étais irréprochable, docile. Je restais même dans la boutique de ma belle-mère quand elle devait s’absenter. C’est d’ailleurs ce qui occasionna ma perte. Je n’aurais jamais dû accepter rester dans la boutique blanche ce 24 Décembre. Ce jour- là, il faisait frisquet. Il neigeait aussi dans ma tête de petite fille amoureuse. J’étais enthousiasmée à l’idée de pouvoir contempler mon gars, mon biberon. Il est tellement blanc. C’était ma neige. Je voulais être également sa blanche neige. Je le regardais. Il me regardait. On se souriait. L’envie de le toucher me travaillait. Je pensais qu’il avait aussi envie de me caresser les lèvres, la langue. La boutique était vide. Pourquoi ne pas joindre l’idée à l’acte? En plus, c’était déjà Noël. Mon premier baiser de Noël. Umh! Moi Dolograisse, fille de Voiturin, le meunier, et de Fifi, la lavandière. J’aurai mon premier baiser aujourd’hui, dis-je avec conviction. J’enlevai mes tapettes, je me hissai sur la pointe des pieds pour pouvoir atteindre mon amour. Lui, il était là debout, figé comme un vieux kapokier. Peut-être c’est parce qu’il n’avait pas de capote et qu’il avait peur que le baiser entrainât autre chose. Dans tous les cas, moi Dolograisse, j’étais décidée. J’ouvris ce que j’appellerais sa fermeture ou ça porte. J’introduis ma main à l’intérieur. Maahou ! Fraîcheur était au top! Il n’était pas velu comme mon papa. Son corps était climatisé. J’approchai ma bouche en cœur. Soudain Maman-Djidonou fit irruption dans la boutique. Inan! Je fermai la porte illico.
-Que fais-tu devant mes produits? Lança-t-elle. Voleuse.
Elle était aussi agitée qu’un ouragan. Sans me laisser lui expliquer elle alerta le voisinage. J’étais tétanisée à telle enseigne que je ne me suis pas rendue compte que j’avais une boîte de Dolais dans ma main gauche. J’étais prise en flagrant délit. Ma soif de yaourt a payé. Je me voyais entrain de déguster un yaourt spécial Noël. Cette boite de yaourt aurait un volume de 25 litres. Les voisins m’ont correctement molestée. Des coups pleuvaient de partout. Maman Jérémie prit un gourdin, le souleva et soudain, je me réveillai. Au fait moi Dolograisse, amoureuse de Dolais, je rêvais de mon cadeau de Noël.
Mais mon plus grand souhait pour cette Noël, c’était un peu plus d’amour et de joie dans les cœurs.

Adebayo Adjaho