Mon conte vole, vole, surclasse endroits, paysages et nature et tombe dans un village très lointain. C’était presqu’au commencement du monde, où Dieu donna tous les pouvoirs à l’Homme. Au début, ils vivaient en harmonie et avaient tous la vie éternelle. Personne en effet ne mourait. Une fois qu’ils devenaient vieux et atteignaient l’âge maximum fixé par Dieu, ils redevenaient des jeunes enfants, et recommençaient à vivre… C’était un cycle d’éternel recommencement. C’était l’alliance conclue entre Dieu, le Miséricordieux, le bon, l’Alfa et l’Oméga, le Tout Puissant et les Hommes : « Je vous donne la vie éternelle, mais en retour, vous m’obéissez ». Personne n’y trouva aucun inconvénient. Les choses se passaient très bien. Malheureusement, le mal s’installa parmi les hommes et ces derniers devinrent subitement violents, sanguinaires, violeurs, voleurs. Ils se faisaient la guerre entre eux pour montrer qui était le plus fort. Certains voulaient s’accaparer de tout ce qui existait. D’autres, jaloux du bonheur des autres, leurs arrachaient leurs femmes et tuaient leurs enfants. Ils ne respectaient plus Dieu et chacun faisait ce que bon lui semblait. Dieu se fâcha, fit une réunion avec les hommes pour mettre les choses au clair :

  • Je constate avec amertume que depuis un certain temps, vous ne respectez plus notre alliance, et que parmi vous, sont nés des personnes sans cœur, créant le chaos autour d’eux et détruisant ce que j’ai construit. Ainsi commença Dieu dans sa toute majesté avec un ton plein d’amour, mais ferme.
  • Nous avons suffisamment réfléchi et nous ne comptons plus sur vous. Nous pouvons faire ce que nous voulons désormais, car nous pouvons nous gérer, répondit Ayadoudou, celui qui se disait le porte-parole des hommes, et ce, dans une acclamation unanime de tous les hommes qui pensent en avoir assez de la présence de Dieu dans leur vie.
  • Et notre alliance alors ? s’indigna Dieu ?
  • Alliance ? Ce mot là existe-t-il encore ? reprit Ayadoudou avec un ton moqueur dans un tonnerre d’applaudissement. Nous avons l’impression que vous ne comprenez pas. Vous ne pouvez plus rien contre nous. Vous nous avez créés, nous vous en remercions. Désormais, nous n’avons plus besoin de vous. Vous êtes désormais à l’image d’un horloger, qui après avoir créé sa montre, la laisse travailler d’elle-même. Il n’est plus derrière elle pour la faire avancer. Son travail de création est terminé. Que la montre travaille toute seule ou pas, ce n’est plus son problème. Nous voulons notre indépendance.

Et c’étaient les derniers propos des hommes. Malgré tout ce que Dieu disait, ils ne l’écoutèrent plus et sans permission, ils se dispersèrent. Malgré tout, Dieu tenta une dernière fois de les ramener à lui. Il leur dit de bien réfléchir à la situation d’indépendance qu’ils voulaient et de venir le voir dans un mois. C’est sur ses paroles que Dieu les laissa pour rejoindre son domicile dans les cieux.

Des jours passèrent, des semaines passèrent, et les hommes continuèrent leurs sales besognes. La date fatidique arriva. Ils se retrouvèrent encore tous au lieu de rassemblement beaucoup plus tôt que prévu. Ils étaient plus nombreux que la première fois, et criaient : « indépendance, indépendance, indépendance ».

Dieu vint au milieu d’eux, avec un ton paternel, pour leur expliquer et montrer les terribles conséquences de leurs actes qu’ils allaient poser si jamais ils obtenaient leur indépendance. Mais ils restèrent impénétrables aux propos de Dieu. Ayadoudou était plus déterminé que jamais. Il faut reconnaitre qu’il avait fait un travail de porte à porte pour convaincre le reste des hommes des avantages à avoir l’indépendance. Ils le crurent au détriment de tout ce que Dieu disait. Les propos de Dieu ne passaient plus, tellement ils faisaient de bruit. Dieu les satisfit en leur accordant l’indépendance réclamée à cor et à cri, mais pour les punir, leur retira la vie éternelle sur terre et créa la mort. Il promit à ceux qui étaient justes à ces yeux, qu’une fois que la mort les aurait pris, il leur donnera une autre vie éternelle, mais cette fois-ci, avec lui, dans les cieux. C’est ainsi que Dieu quitta la terre pour s’installer dans les cieux, loin de ces hommes ingrats, ambitieux mais à la fin ignorants.

La mort reçut le cahier des charges, y mit tous les noms des hommes et passèrent de maison en maison pour punir chacun d’eux. La consigne était claire : seule la mort devait toucher à ce cahier. Cette mort n’a pas de date, elle ne connaît ni le jour, ni la nuit. Elle pouvait punir les hommes quand elle le voulait, riche ou pauvre, vieux ou jeune, puissant ou faible, à la maison ou au champ, au travail ou dans la rue. Sa force, c’était donc son imprévisibilité. Quand elle commença son travail, les hommes se rendirent compte de leur erreur, mais c’était trop tard. Dans la population, se lisaient désolation, stupéfaction et détresse. Les personnes les plus chères mouraient aux yeux de tout le monde. De maison en maison, elle passait, son cahier en main, punissait, barrait les noms des punis. Il suffisait que la mort appelle ton nom, et puis, « paf », on mourait. Toute la famille de Ayadoudou avait déjà été décimée, mais lui, la mort l’épargna en ce moment-là. Mais un jour, vint le tour du subversif Ayadoudou. Il reçut la visite de la mort. La panique s’installa dans sa tête. La mort passa du temps avec lui. Sa seule présence dans la chambre de Ayadoudou était une mort pour ce dernier. Debout, il était déjà plus mort que vivant. Il rentra dans sa cuisine, y prépara un pain, qu’il offrit à la mort. Celle-ci, contrairement à ses habitudes, accepta et mangea. Quelques minutes plus tard, elle s’endormit. Ayadoudou en effet, avait mis dans le pain, un somnifère si puissant, que même la mort s’était endormie après l’avoir ingurgité. Notre Ayadoudou se leva, prit le cahier de la mort, effaça son nom et le mit en dernière position et remit le cahier dans la poche de la mort. A son réveil, elle s’étonna de s’être endormie, car c’était la première fois que cela lui arrivait. Jamais auparavant, elle ne s’était endormie nulle part. Jamais, un être humain ne lui avait donné à manger. Après s’être débarbouillée, elle remarqua qu’une main humaine avait touché son cahier. Fou de rage, elle prononça la sentence prévue. Instantanément, Ayadoudou fut foudroyé. Mais avant de rendre le dernier souffle, il confessa son mal et demanda à la mort de dire aux autres humains de quitter leur zone de désobéissance pour revenir à l’alliance avec Dieu. Il regretta cette lutte pour l’indépendance. Mais la mort devait l’achever…

Kouassi Claude OBOE

  1. Un récit sur la désobéissance de l’Homme vis à vis de Dieu au commencement de la vie humaine qui conduisit à la mort des hommes. Très bonne imagination, car le récit n’a rien avoir avec celui du livre de la genèse.

  2. Cette plume, ce récit me rappelle l’Afrique, notre continent qui depuis plusieurs décennies peine à tutoyer le chemin de la prospérité parce qu’un groupuscule d’ignares, que dis-je de bouffons comme le dira le ballet des bouffons s’est arrogé le droit de disposer tout ce qu’elle possède au prorata d’une jeunesse insouciante, inconsciente qui ne connaît pas la force qu’elle représente. En tout cas merci pour cette plume. Un jour viendra, un jour et puis …