Bonjour les amis. Voici l’intégralité de la nouvelle de la semaine du 22 au 28 Janvier 2018 sur votre blog : « S’y pique qui s’y frotte » de Amoni BACHOLA. Bonne lecture à tous et à chacun en compagnie de http://biscotteslitteraires.com/.

 

S’y pique qui s’y frotte

 

Tout a commencé un mercredi soir. Nous étions en avril. Le crépuscule venait de s’asseoir et la nuit signalait son arrivée sous peu. Les oiseaux effectuaient leurs derniers vols de la journée et les hommes dépités par le travail journalier se convainquirent à rentrer voir les leurs et se reposer.

Mais dans l’un des cybercafés de la ville, réunis en groupuscules d’adolescents, nous semblions plus occupés que des hommes d’affaires. Certains jouaient au jeu le plus grave du moment : » la Play station » qui avait son slogan de pari propre à lui « qui perd paie » . D’autres, câblés sur les postes ordinateurs, avaient l’air inquiet de la fermeture du Cyber. Il fallait juste voir Junior suer de toutes les parties du corps pour déduire de la démence qu’inflige internet.

– La fermeture sera effective dans 5 minutes. Commencez par sortir, finit malheureusement par marteler de façon tonitruante le secrétaire du Cyber.

Les cinq minutes passées, il fallait sortir. Toute la clientèle prit donc la porte. Ce qui semblait bien mystérieux ce soir-là, ce fut le sourire de Junior amplifié ensuite par son rire de satisfaction assimilable trait pour trait aux coassements intermittents des crapauds.

Rapidement, nous nous avançâmes vers lui. Paul, André, Jude et moi. Nous étions camarades de cours:

– Qu’est-ce-qui te met ainsi en joie, après 5 heures de temps, collé à un ordinateur ? Lui lança Paul.

– Je suis entrain de gagner le gros lot.

– Hein ? Tu as joué à la loterie?, lui demandai-je, jaloux.

-Loterie ? C’est rien ça. Moi je parle des euros, dollars et tout, puis, toi tu parles de loterie où la chance ne sourit qu’aux membres administrateurs du secteur où à leurs cousins.

– Dis-nous ta joie alors ? , s’essaya André dans la conversation.

– Bon, D’accord. Faites comme si vous n’aviez rien entendu. J’ai un oncle qui m’a initié à un club de riches, de jeunes riches, appelé « owonikoko » ou le gain est facile. Vous devenez riches en très peu de temps. Vous paraissez très vite show-gars.

– Des gars qui ont chaud ? Même sans rien faire ? S’interrogeait Jude à haute voix.

– Quel niais, tu fais !  Tu es toujours aussi bête,  partout, toi. Quelle réponse veux-tu ? L’interrompit rapidement Paul. « Continue, s’il te plaît Junior. »

– Il m’a dit que si je trouvais des amis qui voudraient s’essayer aussi, que je pourrais leur en parler. Mais moi, j’empocherais vos sous d’initiation. Si vous aussi, vous y amenez d’autres, vous empocherez leurs sous d’initiation. C’est ça le réseau d’affaires. C’est grâce à ça que j’ai payé ma nouvelle moto wave 110 que vous enviez tous d’ailleurs. Sans l’aide d’aucuns parents. Tout à l’heure, j’étais sur une affaire de 30 millions. Je ne voulais pas vous en parler, en effet. Mais, on est amis et la chance vous a souri ce soir. La vie n’offre pas deux fois cette aubaine. La richesse frappe à votre porte. Ouvrez-lui les battants. Essayer la richesse, dévêtez-vous de la pauvreté.

Sur le champ, Junior avait phagocyté les  autres amis dont les yeux pétillaient de joie déjé. Ils acceptèrent d’emblée. Bizarre. Mais moi, j’émis une réticence voilée.

– Et toi, Pierre ?

-Je suis chrétien, mon frère. Ce n’est pas parce que je suis rare à l’église que je ne devrais plus suivre les principes de ma religion.

– Reste là à attendre que l’argent te vienne du ciel. J’espère que c’est ta chrétienté qui va payer votre loyer à la fin du mois, ta mère et toi ? Ou ta pension à l’école ?, se moquait Junior avec un ton sarcastique. De toute façon, moins de personne dans le réseau, plus on gagne. Moi,  je n’ai même pas besoin de tes sous d’initiation. J’ai le pognon moi, ajouta t-il, sortant sept billets violets tous neufs (10 000 francs cfa × 7).

Je respirai profondément et soliloquai intérieurement. Quel argument pouvait être plus convaincant que ça? Tous les autres étaient éberlués, pas moi. Pourquoi ?

Il leur remit chacun un billet et deux à Jude pour qu’il arrête désormais d’être niais. Le pauvre aussi, comme un niais, les prit. Il fit fi de ma présence. Moi qui avais le plus besoin d’argent.

Par quelle alchimie ai-je pu résister à de l’argent? Je ne saurais le dire. J’étais pauvre, très pauvre. Je ruminais tous les jours devenir très riche quels qu’en soient les moyens mais je ne sais pas ce qui m’a retenu et m’a poussé à parler de chrétienté ce jour-là. Toutefois, je pensai trouver la réponse à l’église.

 

Alors dimanche matin, je me rendis à la messe bien qu’en retard. Je pénétrerai l’église après l’évangile et m’assit pour l’homélie. Homélie surprenante !

-« Soyez sobres et prêts car le royaume de Dieu est tout proche. Les signes se font certains et l’apocalypse adviendra sous peu. Le Christ reviendra dans sa gloire honorer les élus et renverrait au diable les déchus. Tout est écrit. Croyez en Dieu et repentez-vous. Il est encore temps. Aimez le peu de fruit que vous offrent vos labeurs. Restez loin des femmes trop faciles et matérialistes. Détachez-vous des hommes imbus d’eux-mêmes et sans vergogne qui ne craignent pas Dieu. Soyez pauvres de cœur, humbles. N’aimez pas l’argent. L’argent ne peut pas tout acheter. Pour finir, je vous en supplie, n’essayer pas le gain facile car un bien mal acquis ne profite jamais. » prêcha succinctement l’abbé Georges, Curé de la paroisse Ayékopkémedji.

Les fidèles, devenus perplexes et contrastés par de telles vives admonitions essayaient une introspection. L’église devint méditative.

Moi, pensif, je méditais sereinement les mises en garde du révérend qui particulièrement m’étaient adressées. Oui, particulièrement. Si non, comment comprendre que la seule fois que le seuil de l’église me revit depuis ma première communion, qu’un prêtre pût connaître autant les dessous de mes imaginations, de mon cœur et surtout le projet de Junior qui depuis peu me taraude l’esprit ?

Mais lui, prêtre, pouvait-il comprendre que j’en avais marre de la misère, marre d’être marginalisé ? Non.

Il faudrait que je m’émancipe financièrement coûte que coûte. Non, il faut plutôt. N’est ce pas le défaut d’argent qui entraîna mon père vers le tréfonds de la terre ? Où était Dieu dans tout ça ? Sûrement sur son trône. Isabelle, ma cousine, qui venait tous les jours à la messe, pourquoi devait-elle brouter les pissenlits par la racine si jeune pour cause de fistules obstétricales? Dieu ne la voyait-il pas à la messe ? Ce prêtre me dira sûrement que c’est le destin, que l’argent n’achète pas la santé, ni la vie. Mais sait-il qu’avec l’argent, on se soigne pour être en bonne santé? N’est ce pas acheter sa santé ça ? Sait-il qu’avec l’argent, une mère délivre plus aisément le bébé ? Car les docteurs s’occupent mieux d’elle. Avec l’argent, on soignerait plus d’un de ces personnes qui croupissent dans les hôpitaux sans sous et meurent de désespoir avant même de s’éteindre. Sait-il que sans argent, pas de prêtre, ni d’églises ou autres? Il ne peut le savoir: il vit de la charité du peuple, lui.

À ce stade de la réflexion, je broyais déjà le noir et ne pouvais plus me contenir. Subitement, je me levai, tous les regards étaient posés sur moi en pleine consécration de l’hostie. Je courus vers la sortie.

Le lendemain matin, je me rendis à l’école faisant l’effort d’oublier les événements de la semaine dernière. L’absence mystérieuse de mes amis semblait m’aider véritablement. Le cours allait bon train. Je pouvais donc focaliser tout mon esprit sur l’explication du professeur. Mais, ce fut un bonheur qui dura à peine le temps de prendre une douche pendant l’harmattan. Magistralement, le Directeur suivi du Comptable Général s’introduisirent sans permission, tous furieux.

– Il y a des voleurs parmi vous qui pensent échapper à ma vigilance. On ne vole pas l’éducation. On paye l’éducation. Jusque là, j’ai fait patience espérant que la première tranche par tous serait enfin soldée. Mais ce n’est point le cas. M. le Comptable, donnez-moi leurs noms!, finit rapidement le directeur.

– Ici, il ne reste que Pierre AK0. Il n’a réussi qu’à payer 5000 sur les 15000 de la première tranche, répondit-il après un coup d’œil sur ces documents.

Ce qu’il me restait à faire après la descente de ces autorités était bien connue. Je pris mon sac et fit dos à la porte. J’inspirais la pitié à mes camarades.

Mais, un malheur ne vient pas seul.

Rentré penaud et consterné, je trouvai ma mère anxieuse, les deux mains soutenant la tête. À peine remarqua t-elle ma présence pour lâcher faiblement une réponse à ma salutation. Toute suite, je compris le mal. C’est la fin du mois or, son commerce n’a rien produit. La poisse !

Cette fois-là, je croyais avoir trouvé de bonnes raisons pour accepter l’idée de Junior. Pourquoi penser à la moralité alors qu’on mourrait de faim bientôt ?

En pleurs, je me dirigeai vers la maison de Junior. Tous les quatre autres amis, absents en cours, étaient chez lui entrain de boire et de s’amuser avec une poudre blanche et d’autres accessoires de banditisme. La maison était luxueuse. Le bonheur y invitait. Tous me pointaient des yeux en questionnant mon silence. Je leur livrai rapidement mes intentions de prendre part aux activités du groupe après que je leur eus raconté mon histoire. Sans trop m’en vouloir ou discourir, Junior me souhaita la bienvenue et m’indiqua la manière dont les choses vont se dérouler.

Le soir déjà, nous devrions rencontrer son oncle pour officiellement adhérer, nous accorder sur les exigences du club, les modes d’opérations et se rendre enfin chez le gourou du club vers minuit.

Chez le gourou, on se croirait au paradis. Grande et belle maison. L’extérieur de sa villa était tel qu’on n’oserait jamais imaginer que le mal pouvait gésir dans un tel bien. Le gourou était vêtu de rouge et de noir. Il nous accueillit avec des incantations puis nous salua :

– Vous êtes donc ces jeunes gens qui veulent prendre part à la richesse immense de kotoko, le fétiche de la richesse…. Soyez les bienvenus.

– Merci, grand maître. Mes amis ont des problèmes financiers. Ils m’ont vu. Et comme vous me l’avez recommandé, j’ai voulu leur apprendre à pêcher au lieu de leur donner tout le temps du poisson, introduisit Junior.

Le gourou se mit à rire sans soin et finit en lui disant: Tu as bien fait. Se retournant vers nous autres assis à sa droite à l’opposé de junior, il enchaîna

– La richesse, la richesse, la richesse et encore la richesse. C’est ce qui vous attend. Kotoko va vous rendre riches, très riches. Mais devant lui et moi, acceptez-vous être fidèles et obéissants?

– Oui, avions-nous répondu en chœur.

– Donnez-leur l’eau de richesse. Qu’ils s’abreuvent à la source de kotoko.

Nous bûmes l’eau qui semblait bien sucrée.

– Chers jeunes gens, poursuivit autoritairement le gourou, passons aux choses sérieuses. Pour bénéficier pleinement des richesses, il faut vous préparer à faire des sacrifices. Kotoko se nourrit du sang. Pour que vos affaires marchent, vous devriez sacrifier de jeunes filles vierges en offrande. Si vos affaires fleurissent, vous reviendrez ici devant kotoko pour lui dire merci avec un petit flacon contenant la sécrétion génitale d’homme après un coït. Vous venez de boire l’eau de la richesse. Désormais, vous jouirez à plein temps de bons temps en respectant bien sûr les prescriptions d’offrande. Je vous rassure qu’il vous sera très difficile de nous quitter, poursuivit-il avec un rire détonateur.

Les anciens firent de même et sans maîtriser la quintessence d’une telle parole et de ce vilain rire, nous fîmes de même. Le gourou enchaîna solennellement :

-Désormais, chers confrères en kotoko, vous disposez de tous les charmes pour attirer l’argent vers vous. Ici, notre fondamentale activité, c’est gruger les blancs et quelques fois nos frères noirs riches. Bon, j’avoue qu’il nous arrive aussi de dévaliser des pauvres gens. L’internet est notre univers, notre piège tendu comme la toile de l’araignée est de les convaincre à nous envoyer de l’argent pour un terrain, un bien que nous n’avons pas mais que nous promettons de vendre. Soyez rassurés, kotoko leur ferme les yeux sur nos mensonges et les convainc de notre bonne volonté. Chacun d’entre vous doit avoir son nom d’opération. Car, nous n’avons rien moins que les opérateurs économiques et nous ne faisons rien de plus graves qu’eux. Nous vivons de Avalon et de Lexus comme voitures de modestie et des filles sexy en boites de nuit comme dîner. La belle vie, c’est nous, finit-il par conclure avec un sourire sauvage.

Ce gourou en était vraiment un. Et Son discours me semblait tellement long car la seule chose dont j’avais envie, c’est avoir rapidement de l’argent pour sauver mon inscription à l’école et payer le loyer. Je ne savais pas qu’un bonheur malheureux planait sur ma petite tête. Qui s’y frotte, s’y pique.

Après un long échange entre frères et confrères en kotoko, nous rentrâmes.

Lendemain matin. Nouveau jour. Nouvelle vie. J’avais changé. Toutes mes idées étaient portées vers l’argent.

Je me préparai rapidement et me rendit au cyber. Il fallait que j’essaye toutes ces belles paroles d’hier. Je pris rapidement 5 heures avec l’un des billets violets qui nous furent distribués la nuit. Je créai un nouveau compte Facebook avec un identifiant faux et la photo d’une très jeune et belle fille au profil. Je commençai une discussion avec l’un des hommes riches et avares du quartier. Il faut dire que comme c’était une jeune fille mi nue, mi vêtue, il s’obligea à être disposé à répondre. La perversité a gagné le monde, en effet. Et j’avoue que ce métier est passionnant. Je répondais comme une jeune fille, je lui transférais des photos sexy que je téléchargeais sur Facebook. Il les aimait, ce pervers, père de vingt-sept enfants et polygame bardé de quatre femmes et demi. Je lui promis le sexe mais à condition qu’il me versât 300 000 pour que je prépare la scène où nous nous rencontrerons, pour m’habiller et le transport. Et kotoko a fait son travail. Il accepta. J’étais si perdu dans cette naïveté du vieux père que j’éclatai de rire. C’est ainsi que je compris que l’argent pousse à rire mal.

Il n’était plus questions que j’aille au cours. L’argent m’avait aveuglé. J’ai rapidement grandi plus que mon âge.

À Ma deuxième opération, j’avais carrément septuplé le prix de la première tentative. Le piégé, cette fois-ci, était un blanc à qui je vendis des espaces privés appartenant à autrui ou même inexistants. Kotoko est quand même fort. Le con m’a transféré l’argent avant de se rendre compte du faux dans tout ce que je disais. Toutes les opérations suivantes avaient très bien marché et rapidement, je devins riche.

J’avais assez d’argent pour élire domicile en plein milieu de la ville de Cotonou où quiconque pourrait voir combien j’étais puissant. Je construisis un habitat qui n’enviait rien à un hôtel cinq étoiles où j’hébergeai ma tendre mère et un tendron qui me servait de femme au foyer malgré mes nombreux feux et bombes que je rencontrais en Night club. J’avais fini par me prendre un Avalon pour mes courses et un Lexus pour ma mère.

Tout allait bien. Ma mère finit par me lâcher avec les nombreuses questions sur cette richesse subite. Je me rappelle toujours cette sordide réponse que je lui servais : « c’est juste l’heure de la gloire. Papa s’occupe de nous depuis le ciel« . La pauvre, bien qu’insatisfaite de la réponse, se taisait et vaquait à d’autres occupations.

Un beau jour, alors que tout allait bien, ma mère piqua une crise cardiaque sans antécédent. À l’hôpital, le docteur qui l’avait ausculté annonça que l’organisme ne souffrait d’aucune anomalie mais que son état était critique. Elle respirait mal, en effet, à peine. Il fallait me voir dans tous mes états. Comment quelqu’un qui allait bien peut subitement tomber malade et sans raison ?

 

– Docteur, faites tout pour qu’elle aille bien. J’ai l’argent. Je suis riche. Je vous paierai le double de mon dû pour consultation, lançai-je au docteur hébété.

– L’argent, oui ! Sans l’argent, nous ne la soignerons certainement pas, vous savez. Si vous avez ce qu’il faut, nous la transférerons rapidement en salle d’opération pour mieux analyser la situation. Vous pouvez comptez sur moi, finit le docteur.

J’avais dépensé beaucoup d’argent pour les opérations et autres soins de ma mère mais jusque-là, aucune bonne nouvelle. Tout semblait tourner au vinaigre. D’ailleurs, Eline, vu la situation aggravante, l’état de santé de ma maman et ma dépression, mes poches tarissant également, s’en alla de ma maison et de ma vie sans crier gare mais n’oubliant point de me voler assez d’argent. Mais j’appris sans avoir vérifié qu’elle fut l’objet d’un braquage dans lequel elle laissa sa vie. Morte sans avoir pu bénéficié du butin.

Je croyais toujours que l’argent pouvait régler tous les problèmes du monde. Il fallait donc que je trouve encore un peu plus d’argent. Aller demander aux confrères me parut une bonne idée. J’allai d’abord chez Paul. Après lui avoir raconté les faits, je lui confirmai l’objet de ma venue:

– Je t’en prie, Paul, j’ai besoin de cet argent. Essaie de me trouver ça. Je te rembourserai.

– Mon frère, tu sais ce qu’il faut faire en ces cas. Fais un sacrifice humain à kotoko.

Il n’y a pas longtemps, j’ai eu un problème similaire. Tu as assisté à l’inhumation de Josey, la fille que j’aimais le plus au monde, le mois dernier, n’est ce pas ? C’est kotoko qui l’a tuée vu que je ne lui sacrifiais personne. Alors, il prit ce que j’aime le plus au monde. Il vit du sang humain. Nous avons voulu avoir de l’argent, la richesse, oubliant que pour kotoko, la richesse, c’est le sang. C’est à travers des sacrifices que kotoko nous rend plus puissants et riches. Va et agis. Je ne puis t’aider d’aucune autre manière que par ce conseil; coupa Paul.

– Conseil ? , sacrifice humain? Pourquoi dois-je tuer? Je savais que tu ne voudrais pas m’aider. Mais, donc, tu es devenu assassin ?

– Mon frère, nous avions fait le choix de la richesse par tous moyens et sans rien faire. Nous avions voulu le gain facile. Tu pensais donc, que ce serait si gratuit ou facile! Mon frère, rien n’est facile sur terre. En plus même d’être assassin, j’ai fait des choses plus horribles. J’ai couché avec un homme.

– Koyyiii ? C’est contre-nature ! Bouchai-je mes oreilles feignant ne pas l’entendre.

-Je sais que je ne suis pas le premier d’entre nous à le faire et je ne serais pas le dernier. C’est exactement pourquoi, les gens nous ont surnommés ou confondus aux gays. Tu devrais t’y essayer aussi. Tu ne seras pas déçu. Mais je peux déjà te donner un peu de sous pour un carton de couches. Tu en auras sûrement besoin, finit- il avec un rire sonore dépassant l’entendement.

Si jeune, devenir assassin et gayman ? Mon âme sera perdue à tout jamais. Et dans ses errances, elle finira par se faire adopter par le diable pour la géhenne. Mais ma mère, que faire ? Si, c’est kotoko qui est responsable de son état de santé et de la mort d’Eline, ai-je alors même le choix ? Monologuai- je tout bas.

Je me levai et partis. Je me rendis chez Jude, et ce fut le même conseil. J’étais dépassé. Mais pour rien au monde, je ne voulais perdre ma mère. Devenir orphelin de père et de mère ? Je devais agir et vite…

J’allai louer une vendeuse de plaisir dans l’un des quartiers les plus chauds de la ville. Elle devait coucher avec un homme afin de recueillir son liquide après jouissance. Ceci eu, je l’apporterais à kotoko pour sacrifice. Mais l’autre deviendra ainsi stérile.

J’avais tout planifié. Comme d’habitude, j’arrivai à mettre le grappin sur un homme avec mes stratégies. Je dois avouer qu’il faut réellement être un stratège pour faire le job. J’avais prévu l’hôtel et tout ce qui allait dans l’aboutissement parfait de mon plan. Ce qui le rendait excitant, c’était la grande volonté de la prostituée très chaude pour l’action.

Venue plus vite à l’hôtel, elle avait réellement l’air d’une bombe. Aguichante par un arrière-plan bien charnu et son devant bien relevé par les deux soutien-gorges que j’ai dû lui payer. En réalité, ses clients avaient détruit l’opulence de sa poitrine.

L’homme, venu 15 minutes après, avait manqué de préciser qu’il était un officier de police. La poisse ! Cependant, c’était encore gérable.

Mais savoir qu’ils étaient mariés tous deux avant que l’appétit sexuel démesuré de l’épouse, ma prostituée en question ne la conduise à l’infidélité et donc au divorce, ça, c’était ingérable. L’homme s’évanouit à la vue de son ex-femme. Je sortis rapidement de ma cachette et m’enfuit. C’était une nymphomane, la garce. Mon plan avait donc gravement échoué.

Je ne me décourageai, cependant point. Mais le temps pressait désormais. Ma mère ne respirait pratiquement que grâce à un système que j’ai pu lui faire placer après la vente de mes deux véhicules à ma disposition. Et bientôt, ce sera la maison et mes immeubles. Que faire ?

Je me décidai à faire selon la volonté de kotoko. Ma mère ne devrait pas mourir pour mes mauvais pas et choix.

Je me promenai dans la ville pour cibler certaines écoles où je pourrais trouver de filles vierges qui plairont à kotoko. Mon dévolu tomba sur l’école de la petite Aminata, la dixième année à peine. Il fallait miser sur une fille de cet âge car à Cotonou, il devient de plus en plus rarissime de trouver une fille de 13 ans qui soit encore vierge.

Après ses cours et après mes analyses, personne ne venait la chercher à l’école. Le dernier vendredi soir semblait l’idéale occasion pour attaquer. Je la pris par les bras simulant que j’étais un parent. Je la mis en confiance avec des bonbons. Elle ne riposta pas. Ceux qui me virent avec elle n’émirent aucun soupçon : pour eux, nos sommes de la même famille. Comme une enfant docile, elle me suivit jusqu’au lieu où j’avais préparé l’autel. Dans une petite brousse loin des regards.

Et kotoko savoura le sang de l’innocente par mes mains.

 

 

 

Les parents de l’enfant ne l’ayant pas vu à la maison allèrent à la police faire une déclaration d’absence de leur fille.

Très tôt le lendemain, les recherches furent engagées. De la sentinelle de l’école aux passants, témoins de ma présence dans les parages, des caméras de surveillance, au lieu de crime ou j’abandonnai le cimeterre, arme du crime, tout remonta vers moi. Sur le couteau, il y avait encore mes empreintes.

Mon absence à la maison conduisit la police à se rendre à l’hôpital. J’étais encore assis à côté de ma mère qui me conseillait comme si c’était la dernière fois qu’elle me parlait. Elle n’oublia aucun domaine de la vie. Aucun détail :

– Mon fils, Pierre, ton père est mort pauvre et fier. Sois fier de ce que tu es. N’engendre pas le mal pour faire le bien. Si non, ton bien est défaillant. Sois courageux et fort, tu es un grand garçon maintenant. Ne prends pas à autrui ce qui lui appartient, ni argent, ni bien matériel car mal acquis, ceci ne te profitera pas… Tu as le devoir d’aller de l’avant même si je ne suis plus là pour veiller sur toi. Prends soin de toi, me conseillait enfin l’aimable moribonde.

– Non, maman, dis pas ça. Je ferai tout pour que tout redevienne comme avant. J’ai besoin de toi pour vivre. Ma conscience est lourde et toi seule peux m’apaiser. J’ai encore besoin de toi. Donc n’empresse pas les a……

 

Soudainement, la police pénétra la salle et l’inspecteur entama la procédure d’arrestation. Devant ma mère, il récita les charges retenues contre moi, m’invita au silence et m’informa de mon pauvre plein droit de demander le ministère de mon avocat.

 

Devant ma mère effarée, les mains liées au dos et coincées entre deux menottes, j’atterris dans le véhicule de la Police….

 

Amoni BACHOLA