« La Marmite de Koka-Mbala », suivie de « L’Oracle », Guy MENGA

« La Marmite de Koka-Mbala », suivie de « L’Oracle », Guy MENGA

L’ignorance est une drogue dangereuse qui nuit gravement à la clarté de l’esprit. Et si s’orienter c’est retrouver l’un des quatre points cardinaux, aller de l’avant dans le monde de ce temps, cela nécessite que l’on sache d’où l’on vient et que l’on ait la maîtrise de son passé, des lois et coutumes de sa tradition. On le sait, dura lex, sed lex, la loi est dure, mais c’est la loi. Mains quand c’est trop dur, ce n’est certainement plus la loi, entendu comme normes visant l’épanouissement des citoyens. On le sait aussi, les ruses ne l’emportent pas toujours sur la vérité. Guy Menga plante ici un décor pittoresque où il met en scène les couches juvénile et sénile. Dans « La Marmite de Koka-Mbala« , suivie de « L’Oracle« , l’auteur peint un tableau de la période post-coloniale. Nous irons ensemble à la découverte de cette oeuvre en jetant un regard sur la biobibliographie de l’auteur d’une part, et d’autre part en considérant le contenu pour en étudier la thématique et les personnages.

  • Présentation

La Marmite de Koka-Mbala suivie de l’Oracle. Ces deux pièces théâtrales sont toutes du Même auteur appelé Guy Menga. Publiée aux éditions CLE de Yaoundé (Cameroun) en 2001, l’œuvre que nous avons lue comporte 96 pages.

  • Biobibliographie

De son vrai nom Gaston Guy Bikouta Menga, Guy Menga (son nom de plume) est né en 1935 et est originaire de Man-kon-nongo, un village situé au bord de la rivière Foulaki, dans la région sud de la République Populaire du Congo.

Enseignant d’abord, il devient rapidement journaliste et il est un certain temps directeur des programmes à la Radio diffusion et Télévision congolaise. Il a aussi dirigé la section africaine de Radio France internationale en 1990 et il fut ministre dans le gouvernement d’André Milon-Go de Juin 1991 à Janvier 1992.

 

Son roman «La Palabre Stérile » lui a valu en 1969 le Grand Prix littéraire d’Afrique noire. Outre ce roman, il est aussi l’auteur d’autres œuvres comme :

  • Les Aventures de Moni-Mambou
  • Les indiscrétions du Vagabond
  • La Marmite de Koka-Mbala suivie de l’Oracle.

 

  • Problématique de l’œuvre

Cette dernière œuvre qui fait l’objet de cet exposé pose le véritable problème des années post-coloniales qu’est le conflit des générations. Quand la modernité emporte la jeunesse dans les méandres du progressisme, la vieillesse s’interpose et se porte conservatiste de la tradition et ses valeurs. L’œuvre fait donc ressortir le choc entre modernité et tradition, Jeunesse et Vieillesse.

  • Résumé
  • – La 1ère pièce théâtrale intitulée la Marmite de Koka-Mbala nous amène dans une citée appelée Koka-Mbala où les lois étaient impitoyables et les juges inflexibles. Certaines lois cruelles frappaient de la peine de mort une jeunesse qui aspirait à un mieux-être. Malheureusement, durant le règne du roi Bitsamou, les choses s’empirèrent parce que les juges devenaient extravagamment rigoureux et rigoristes, sans indulgence. Cet état de chose prenait un grand élan grâce à la marmite à esprits inventée par Bobolo, le premier conseiller du roi et en même temps le Grand féticheur du royaume. Cette marmite était destinée à faire peur à ceux qui hésitaient à prononcer la condamnation à mort de tout jeune surpris en flagrant délits. Cette suspicion nourrissait la crainte dans tous les cœurs et faisait grandement le malheur de la jeunesse qui enfin se révoltera contre les traditions passéistes pour briser la marmite et ses mythes.

 

  • Dans l’Oracle, la seconde pièce de théâtre, Guy Menga aborde la même problématique de conflit de générations à travers le mariage forcé. En effet, un vieux paysan du nom de Biyoki, face à la somme et aux richesses proposées par son ami Wamba, il veut retirer sa fille fraîchement adolescente de l’école pour la donner en mariage au neveu de cet ami. Alors que la fille réclame un peu de temps pour finir ses études en vue de devenir infirmière, son père l’assomme d’irrespect et de banaliser la tradition. Heureusement, vieux et rusé, le grand-père de la fille trouvera des astuces pour tourner dos aux cruautés de cette tradition. Ce mariage n’aura pas lieu.

 

  • Personnages

Dans la pièce « La Marmite de Koka-Mbala », nous avons :

Bitsamou : qui est le roi de Koka-Mbala. C’est lui qui mettra fin aux injustices des vieillards rusés et corrigera les mauvais penchants de la tradition.

Lemba, la reine, elle est le second personnage principal qui soutiendra son mari le roi à prendre ses décisions.

Nous dénombrons aussi Bobolo, Bitala, les Notables, les Gardes, la Veuve, le Danseur, des jeunes et la Marmite elle-même.

Au nombre des personnages ayant animé la pièce L’Oracle, nous citons, le jeune homme ; neveu de Wamba, Louaka, la fille de Bikoyi, Nzobo le sorcier et devin, Kolo son assistant, le vieillard, le Maître et Louvouézo, la femme de Biyoki.

Comme personnages principaux nous avons :

– Biyoki : le vieux paysan qui veut donner sa fille en mariage à l’âge de 16 ans

– Wamba : le paysan ami de Biyoki qui négocie la fille pour son neveu.

  • Thématique

Le thème principal qui ressort de la lecture de cette œuvre s’énonce comme nous le disions précédemment : Le Conflit des générations.

Au IV ème siècle avant Jésus-Christ, Socrate faisait déjà remarquer que : « Nos jeunes aiment le luxe, ont de mauvaises manières, se moquent de l’autorité et n’ont aucun respect pour l’âge ». Mais avant lui, Hésiode, 720 av. J.C. affirmait: « Je n’ai plus aucun espoir pour l’avenir de notre pays si la jeunesse d’aujourd’hui prend le commandement demain, parce que cette jeunesse est insupportable, sans retenue, simplement terrible ». C’est dire que le conflit de génération n’est pas le propre de l’Afrique et qu’elle ne date pas d’aujour’hui. Et il faut réaliser que dans le contexte qui est le nôtre en terre africaine, avant la décolonisation, la couche sénile, c’est-à-dire les personnes âgées, sauvegardait jalousement et de façon craintive les us et coutumes laissés par la classe ancestrale.

Dès lors, la tradition avait droit de cité et tout le monde se devait d’entrer dans ses lignes. Avec la colonisation, l’insertion de l’école coloniale dans les villages de l’Afrique, les esprits traditionalistes des jeunes scolarisés ont commencé à être formatés par l’Homme Blanc qui chantait les bienfaits de sa civilisation au grand dam de celle africaine.

Ainsi, les jeunes noirs scolarisés commençaient à se méfier de la tradition indigène sous prétexte qu’elle renfermait trop de cruautés.

Dans cet esprit, les Africains ont eu leur indépendance et presto, les pratiques rétrogrades, passées, traditionnelles se faisaient voir d’un mauvais œil par les enfants instruits du Continent. Essentiellement la couche juvénile qui a découvert les fruits du monde globalisé, du village planétaire, bref les fruits de la modernité, cette couche juvénile se trouvait très gênée face aux us et coutumes de sa tradition. Les jeunes opposaient alors un refus au respect des normes traditionnelles qu’ils jugeaient de passéistes et de rétrogrades. De l’autre côté ou en face, les vieillards, se portaient farouchement garants de la Tradition des dieux, des ancêtres et des génies. Ils voyaient donc de l’insolence dans ce refus des jeunes qu’il fallait selon eux, mater et punir. Ainsi naquirent les chocs, les combats entre vieux et jeunes, les conflits entre tradition et modernité. Ce conflit de génération a fait le thème principal de plusieurs œuvres africaines telles que « Sous l’Orage » de BADIAN ; « Les Soleils des indépendances » de Kourouma, « Le Respect des mort » d’Amadou KONE.

Comme Seydou BADIAN le dit in « Sous L’Orage » par la bouche des jeunes : « Tout change et nous devons vivre avec notre temps ».

Dans la Marmite de Koka Mbala, Bitala et les autres jeunes s’opposent à la domination superstitieuse des vieux en allant jusqu’à briser la Marmite fétiche. Cet acte courageux prouve combien la lutte de la liberté et surtout le désir de se sentir dans son époque, dans les réalités de son époque, sont de nobles et grandes envies qui déterminent le bien-être.

Dans l’Oracle, la jeune Louaka oppose un refus à son père pour poursuivre ses études et échapper au mariage forcé comme Kany le personnage de Sous l’Orage.

De tout ce qu’on vient de parcourir, il est clair que la jeunesse a eu au final le mot de la victoire sur la vieillesse.

Cette victoire de la modernité sur la tradition prouve vraiment que le monde change et qu’il il faut marcher avec lui. Néanmoins, les mêmes auteurs ont bien fait de sensibiliser cette même jeunesse à ne pas entrer dans les dérives trop fréquentes ces temps-ci dits de modernité dans lesquels la jeunesse se croit tout permis. La modernité n’est pas une suppression radicale ni totale de la Tradition. Elle vient juste faire avancer la tradition en corrigeant ses cruautés, ses inhumanités. Comme on le voit, Bitala est l’incarnation de cette jeunesse qui veut que les choses évoluent. Et l’auteur, implicitement fait adhérer le Roi à ses vues novatrices face à un Bobolo traditionaliste indéboulonnable, manipulateur fin, habile dans l’art de faire dire aux dieux ce que trame son cœur. Que le Roi, dans  la Marmite de Koka Mbala, et le Vieillard dans  l’Oracle, soient ouverts à la modernité, c’est le signe aussi que les sages africains ne sont pas des conservateurs bornés. Ils sont conscients de ce que quelques fois les jeunes peuvent sculpter le tam-tam qui fera danser tout le village, y compris les vieux.

  • Au-delà

Derrière le conflit de générations, se profile la question du statut de la femme dans les sociétés traditionnelles africaines. Au-delà du conflit de génération, c’est la notion de la chefferie qui est aussi mise à l’ordre du jour. Et c’est heureux que cette pièce théâtrale soit insérée dans le programme scolaire au Bénin et fasse objet d’étude et d’exposé dans les classes de première, séries littéraires en particulier. Ce bref exposé fait dans les lignes précédentes ne se réclame pas être un travail détaillé mais un travail introductif permettant aux élèves et lecteurs de bonne volonté d’approfondir leurs recherches et d’aiguiser leur désir de mieux découvrir cette œuvre.

 

Fabroni Bill YOCLOUNON

10 comments

J’ai trop aimé la large elle ma aidez a résumé rapidement et avec explication les deux ouvrage la marmite de koka M bala et l’oracle

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