S’il y avait une chose que Missouwa peinait toujours à faire et refusait de s’y adonner, c’était de chanter à des cérémonies funéraires. Elle jugeait que par respect pour le défunt, point besoin d’éclats ni de fastes. Il fallait juste l’inhumer et prier pour le repos de son âme. Elle avait en aversion les démonstrations d’opulence, les dettes faramineuses engagées à cet effet pour satisfaire le goût jouissif des endeuillés qui très tôt, oubliaient les pérégrinations du disparu sur terre alors qu’il ne bénéficiait d’aucune générosité de leur part mais devait subir à sa mort un étalement théâtral de compassion et de réjouissances en son honneur. Pourtant Simin et Sènou étaient venus pour ça. Pour solliciter les talents de Missouwa pour les cérémonies de la défunte décédée depuis un mois. Ils étaient venus du pays voisin et souhaitaient une fin glorieuse pour leur parente. Dès leur entrée, Sènou fut frappé par la sobriété de la demeure de la chanteuse mais aussi par sa beauté spectaculaire. Il l’observait beaucoup et parlait peu. Après les salutations d’usage, elle entama :

-Que puis-je pour vous ?

Sènou, plongé dans ses pensées, entendit à peine la question à laquelle Simin s’empressa de répondre :

-Nous souhaitons vous voir chanter aux funérailles de ma tante, la mère de Sènou.

Il lui lança un regard que son cousin acquiesça, puis il continua :

-La cérémonie est dans une semaine et nous y mettrons le prix qu’il faudra.

Il se tut pendant de longues secondes puis demanda :

-Combien voulez-vous ?

Sènou, un peu distant jusqu’alors reprit très vite :

-Madame, veuillez bien accepter de vous joindre à nous en ces moments douloureux.

Sènou avait veillé sa mère jusqu’à son dernier souffle. Atteinte du cancer du sang, elle avait souffert en silence le mal lancinant qui l’avait rongé jusqu’au dernier moment. Elle était la seule famille proche qui restait à Sènou. Missouwa répondit :

– Je suis bien honorée que vous vous soyez déplacés jusqu’ici pour me solliciter, mais je dois vous dire que je ne chante pas aux cérémonies de décès…

 

A suivre….

 

 

Myrtille Akofa

  1. « -Je suis bien honorée que vous vous soyez déplacés jusqu’ici pour me solliciter, mais je dois vous dire que je ne chante pas aux cérémonies de décès… »
    Si elle est au Bénin, elle devra savoir que cela fait aussi vivre l’artiste. Les « agɔ » ici ne s’animent que grâce aux artistes. Et ça paie bien en plus. Pas nécessairement une musique « du ventre » ou un art orienté à la satisfaction des « besoins alimentaires » mais il faut célébrer la mémoire du disparu avec bruit et brio. Missouwa n’a qu’à revoir sa copie (nukiko kɛɖɛ)

  2. Confirmé Destin! Ahurissante, cette identité béninoise. On n’y peut rien et ça fait le quotidien de chacun

  3. Jusqu’à là, tout va bien. Elle sait sans doute faire la différence entre un torchon et une serviette….

    • Exactement, Mr Padey. Attendons de voir ce que cette intriguante Missouwa et son auteure veulent bien cuisiner pour nous

  4. je sais qu’elle finira par accepter et peut-être si elle était un cœur à prendre il se passera des choses….. Mahou !!! Regina tu rêves trop ooooo !!! Bon, j’attends comme mon aïeul à Goho la suite.