Chez le gourou, on se croirait au paradis. Grande et belle maison. L’extérieur de sa villa était tel qu’on n’oserait jamais imaginer que le mal pouvait gésir dans un tel bien. Le gourou était vêtu de rouge et de noir. Il nous accueillit avec des incantations puis nous salua :

– Vous êtes donc ces jeunes gens qui veulent prendre part à la richesse immense de kotoko, le fétiche de la richesse…. Soyez les bienvenus.

– Merci, grand maître. Mes amis ont des problèmes financiers. Ils m’ont vu. Et comme vous me l’avez recommandé, j’ai voulu leur apprendre à pêcher au lieu de leur donner tout le temps du poisson, introduisit Junior.

Le gourou se mit à rire sans soin et finit en lui disant: Tu as bien fait. Se retournant vers nous autres assis à sa droite à l’opposé de junior, il enchaîna

– La richesse, la richesse, la richesse et encore la richesse. C’est ce qui vous attend. Kotoko va vous rendre riches, très riches. Mais devant lui et moi, acceptez-vous être fidèles et obéissants?

– Oui, avions-nous répondu en chœur.

– Donnez-leur l’eau de richesse. Qu’ils s’abreuvent à la source de kotoko.

Nous bûmes l’eau qui semblait bien sucrée.

– Chers jeunes gens, poursuivit autoritairement le gourou, passons aux choses sérieuses. Pour bénéficier pleinement des richesses, il faut vous préparer à faire des sacrifices. Kotoko se nourrit du sang. Pour que vos affaires marchent, vous devriez sacrifier de jeunes filles vierges en offrande. Si vos affaires fleurissent, vous reviendrez ici devant kotoko pour lui dire merci avec un petit flacon contenant la sécrétion génitale d’homme après un coït. Vous venez de boire l’eau de la richesse. Désormais, vous jouirez à plein temps de bons temps en respectant bien sûr les prescriptions d’offrande. Je vous rassure qu’il vous sera très difficile de nous quitter, poursuivit-il avec un rire détonateur.

Les anciens firent de même et sans maîtriser la quintessence d’une telle parole et de ce vilain rire, nous fîmes de même. Le gourou enchaîna solennellement :

-Désormais, chers confrères en kotoko, vous disposez de tous les charmes pour attirer l’argent vers vous. Ici, notre fondamentale activité, c’est gruger les blancs et quelques fois nos frères noirs riches. Bon, j’avoue qu’il nous arrive aussi de dévaliser des pauvres gens. L’internet est notre univers, notre piège tendu comme la toile de l’araignée est de les convaincre à nous envoyer de l’argent pour un terrain, un bien que nous n’avons pas mais que nous promettons de vendre. Soyez rassurés, kotoko leur ferme les yeux sur nos mensonges et les convainc de notre bonne volonté. Chacun d’entre vous doit avoir son nom d’opération. Car, nous n’avons rien moins que les opérateurs économiques et nous ne faisons rien de plus graves qu’eux. Nous vivons de Avalon et de Lexus comme voitures de modestie et des filles sexy en boites de nuit comme dîner. La belle vie, c’est nous, finit-il par conclure avec un sourire sauvage.

Ce gourou en était vraiment un. Et Son discours me semblait tellement long car la seule chose dont j’avais envie, c’est avoir rapidement de l’argent pour sauver mon inscription à l’école et payer le loyer. Je ne savais pas qu’un bonheur malheureux planait sur ma petite tête. Qui s’y frotte, s’y pique.

Après un long échange entre frères et confrères en kotoko, nous rentrâmes.

Lendemain matin. Nouveau jour. Nouvelle vie. J’avais changé. Toutes mes idées étaient portées vers l’argent.

Je me préparai rapidement et me rendit au cyber. Il fallait que j’essaye toutes ces belles paroles d’hier. Je pris rapidement 5 heures avec l’un des billets violets qui nous furent distribués la nuit. Je créai un nouveau compte Facebook avec un identifiant faux et la photo d’une très jeune et belle fille au profil. Je commençai une discussion avec l’un des hommes riches et avares du quartier. Il faut dire que comme c’était une jeune fille mi nue, mi vêtue, il s’obligea à être disposé à répondre. La perversité a gagné le monde, en effet. Et j’avoue que ce métier est passionnant. Je répondais comme une jeune fille, je lui transférais des photos sexy que je téléchargeais sur Facebook. Il les aimait, ce pervers, père de vingt-sept enfants et polygame bardé de quatre femmes et demi. Je lui promis le sexe mais à condition qu’il me versât 300 000 pour que je prépare la scène où nous nous rencontrerons, pour m’habiller et le transport. Et kotoko a fait son travail. Il accepta. J’étais si perdu dans cette naïveté du vieux père que j’éclatai de rire. C’est ainsi que je compris que l’argent pousse à rire mal.

Il n’était plus questions que j’aille au cours. L’argent m’avait aveuglé. J’ai rapidement grandi plus que mon âge.

À Ma deuxième opération, j’avais carrément septuplé le prix de la première tentative. Le piégé, cette fois-ci, était un blanc à qui je vendis des espaces privés appartenant à autrui ou même inexistants. Kotoko est quand même fort. Le con m’a transféré l’argent avant de se rendre compte du faux dans tout ce que je disais. Toutes les opérations suivantes avaient très bien marché et rapidement, je devins riche.

J’avais assez d’argent pour élire domicile en plein milieu de la ville de Cotonou où quiconque pourrait voir combien j’étais puissant. Je construisis un habitat qui n’enviait rien à un hôtel cinq étoiles où j’hébergeai ma tendre mère et un tendron qui me servait de femme au foyer malgré mes nombreux feux et bombes que je rencontrais en Night club. J’avais fini par me prendre un Avalon pour mes courses et un Lexus pour ma mère.

Tout allait bien. Ma mère finit par me lâcher avec les nombreuses questions sur cette richesse subite. Je me rappelle toujours cette sordide réponse que je lui servais : « c’est juste l’heure de la gloire. Papa s’occupe de nous depuis le ciel« . La pauvre, bien qu’insatisfaite de la réponse, se taisait et vaquait à d’autres occupations.

 

A suivre…

 

Amoni BACHOLA

 

Lien des précédents épisodes :

1- http://biscotteslitteraires.com/sy-pique-sy-frotte-15/

2- http://biscotteslitteraires.com/sy-pique-sy-frotte-25/